Auteurs Autrices : Amira Hass

Amira Hass

Israël et Gaza, dans quelques années

Dans quelques années, un jeune père prendra son bébé dans les bras, son premier-né et, tout d’un coup, il sera ébranlé par un souvenir : un père portant son bébé dans ses mains, à côté de lui une femme la tête couverte d’un hidjab et deux ou trois enfants, tous marchant vers le sud avec des centaines d’autres, au milieu de fragments d’asphalte, de tas de sable, dans un brouillard de poussière soulevée sur leur marche. De la fumée s’élève à une certaine distance, un drone vrombit sans cesse au-dessus d’eux, des bombes explosent l’une après l’autre.

On n’est en sécurité nulle part : des médecins de Gaza « vivent dans les salles d’opération »

Contrairement à d’autres zones de combat ou de catastrophe, le personnel médical des ONG dans la minuscule bande de Gaza met sa vie en danger lorsqu’il s’efforce de sauver des vies. Un employé décrit des médecins qui s’agenouillent sur le sol pour s’occuper des blessés et des milliers de personnes déplacées qui se réfugient dans les hôpitaux.

L’armée d’Israël presse les habitants de Gaza de s’en aller au sud, mais ils ont peur d’être bombardés en chemin

La famille de Manal choisit de rester dans un abri à Jabaliya ; la mère de Nadeem ne répond pas aux textos même lorsque les communications sont rétablies. Leurs maisons dans le nord de Gaza ont été détruites et elles savent qu’Israël a l’intention d’empêcher leur retour pour créer une zone de sécurité.

Retour au cycle de la vengeance

En quelques jours, les Israéliens ont traversé ce dont les Palestiniens ont fait l’expérience de façon routinière pendant des décennies, et dont ils font encore l’expérience – incursions militaires, mort, cruauté, enfants assassinés, cadavres empilés sur la route, siège, peur, anxiété pour les êtres chers, captivité, être la cible de la vengeance, de tirs mortels aveugles sur ceux qui sont impliqués dans le combat (les soldats) et ceux qui ne le sont pas (les civils), être en position d’infériorité, destruction de bâtiments, vacances ou fêtes gâchées, faiblesse et désespoir face à des hommes armés tout-puissants, et humiliation brûlante.