Lettre ouverte de solidarité avec Satyel Larson et en soutien à la liberté académique

À la lumière des attaques de l’extrême-droite sioniste contre le projet du professeur Satyel Larson d’enseigner “Le Droit de Mutiler: Faiblesse, Capacité, Invalidité de Jasbir Puar dans le cours NES 301,….

Green Hall houses Princeton’s Department of Anthropology.

À la lumière des attaques de l’extrême-droite sioniste contre le projet du professeur Satyel Larson d’enseigner “Le Droit de Mutiler: Faiblesse, Capacité, Invalidité de Jasbir Puar dans le cours NES 301, nous, soussignés, sommes solidaires du professeur Larson dont nous estimons et admirons beaucoup l’enseignement et l’érudition.

Nous sommes profondément troublés par la tentative de censurer le professeur Larson, d’interdire le livre de Puar, de limiter la recherche intellectuelle et de faire taire l’échange entre le corps enseignant et les étudiants au sein des salles de cours et en dehors, en particulier sur des questions aussi significatives des points de vue politique, moral et philosophique.

Récemment, le Centre de la vie juive  (CJL) Hillel de Princeton a mené une campagne d’intimidation contre la liberté d’expression du professeur Larson. Le 14 août, son directeur exécutif, le Rabbin Gil Steinlauf (diplômé en 1991), a rendu publique sa tentative de censure : « Nous avons écrit directement au Chef du département et au professeur du cours en leur demandant de rechercher… des moyens alternatifs pour enseigner le cours sans (ce livre) ».

Steinlauf n’est pas seul. D’autres dirigeants d’institutions juives ont essayé de faire pression sur l’université pour que ce livre soit interdit. Ronald Lauder, le président du Congrès Juif Mondial , a réclamé que ce livre ne soit pas utilisé en cours. De plus, il a appelé  “l’Université à annuler immédiatement le cours en question et à licencier son professeur, Satyel Larson ». De façon tout aussi inquiétante, le gouvernement israélien a écrit au président Eisgruber le 9 août en lui demandant « d’agir immédiatement pour retirer le livre du cursus ».

Alors que des dirigeants juifs d’extrême droite en Amérique et en Israël prétendent parler pour nous, ce n’est pas le cas . Cette dernière tentative de silencier le discours éducatif en lien avec Israël-Palestine fait partie d’un projet dans lequel le CJL vise à interférer avec des événements académiques et hors cadre universitaire, avec la recherche et le débat sur les campus.

La suggestion du CJL selon laquelle les étudiants et le corps enseignant de Princeton ne devraient pas étudier des textes controversés constitue une attaque sur le mandat-même de l’université qui est de créer un environnement dans lequel nous luttons avec les idées et les mettons en question, y compris – cela devrait aller de soi – quelques-uns des problèmes les plus pressants de notre temps.

Ce printemps, lorsqu’il convenait au CJL  de défendre la liberté de parole pour justifier d’accueillir Ronen Shoval, le “fondateur d’un groupe israélien ultra-nationaliste , c’est ce qu’ils ont fait. Il est clair, maintenant que l’engagement du CJL pour la liberté académique et la liberté de parole ne s’applique qu’à des activistes de droite et non à ceux qui sont concernés par les violations des droits humains. Et ce n’est pas la première fois  que le CJL a tenté la censure. 

S’ajoutant à notre indignation face à cette menace sur la liberté académique et d’expression, nous sommes désolés que la réponse du CJL fasse défaut aux valeurs juives qui nous sont les plus chères. Plutôt que de s’inspirer de la tradition juive consistant à étudier des textes difficiles et une myriade d’interprétations de toute leur complexité, la tentative du CJL  de supprimer le débat et de censurer le livre de Puar est exactement à l’opposé.

Les actions engagées par le CJL, l’État d’Israël et le Congrès Juif Mondial sont d’autant plus perturbantes dans le contexte de la vague actuelle d’interdictions de livres et d’attaques contre la théorie critique de la race, des efforts continuels pour faire taire les voix marginalisées, en particulier celles des queer et des communautés BIPOC (L’alliance des non-Blancs). Le choix du CJL d’avoir recours à ces stratégies de droite d’interdiction de livres démontre où se situe sa véritable solidarité.

Plutôt que composer avec l’horrible fait qu’Israël, comme d’autres pays se livre à la violation des droits humains — ayant illégalement prélevé les organes à la fois des Palestiniens et des Israéliens , ce qui est bien documenté  — le CJL perpétue une rhétorique d’exceptionnalisme juif et israélien, hautement problématique.

En tant qu’étudiants, anciens élèves, enseignants, parents juifs et alliés non juifs, nous voulons exprimer notre gratitude envers les professeurs de Princeton qui prennent du temps et de l’attention pour délivrer un enseignement sur des questions complexes et controversées de la plus haute importance.

Il y a à peine quelques mois, le président de l’Université, Christopher L. Eisgruber (diplômé en 1983) a donné pour mission  aux diplômés de 2023 et à l’Université plus largement, de « soutenir et défendre ensemble les valeurs de la liberté d’expression et de pleine inclusivité pour les personnes de toutes identités ». Maintenant, nous faisons appel à lui pour qu’il soit fidèle à cet engagement. Face à des gouvernements étrangers et à des entités qui leur sont affiliées dans la menace sur la liberté de parole sur ce campus, nous demandons à l’administration de l’Université de réaffirmer son engagement à la liberté académique et à la liberté de recherche.

La liste complète des signataires est disponible ici