Vidéo: des contestations interrompent une conférence à Vienne de l’israélienne Ayelet Shaked, chantre du génocide

La ministre de la justice d’Israël, Ayelet Shaked a été confrontée à des interruptions répétées pendant une intervention qu’elle a faite à l’Université de Vienne mercredi. Les protestataires ont lu….

La ministre de la justice d’Israël, Ayelet Shaked a été confrontée à des interruptions répétées pendant une intervention qu’elle a faite à l’Université de Vienne mercredi. Les protestataires ont lu des mots qu’elle a postés sur sa page Facebook en 2014 appelant au génocide du peuple palestinien, y compris au meurtre de mères qui donnent naissance à de « petits serpents ».

Shaked a aussi des antécédents d’incitation à la haine raciale vis-à-vis de réfugiés et de migrants de pays africains.

La vidéo ci-dessus, tournée par des militants, comporte des enregistrements vidéos et audio faits avec plusieurs appareils.

Pour autant, le vice président de la faculté de droit de l’université de Vienne qui a présenté Shaked et a justifié le fait de l’inviter, a admis auprès de l’Electronic Intifada qu’il n’avait pas lu les commentaires que Shaked avait postés sur Facebook invoquant le destruction du peuple palestinien.

Une vidéo visible sur la page Facebook de BDS Autriche, un groupe qui milite pour les droits des Palestiniens, montre quelques unes des protestations.

De multiples interruptions

Les militants de BDS Autriche et les militantes des Femmes en Noir ont manifesté à l’intérieur de la salle de conférence et à l’extérieur du bâtiment, disent les organisateurs. Ceux qui étaient à l’extérieur brandissaient des panneaux avec des citations de Shaked. Dispersés dans la salle de conférence, des militants se sont levés l’un après l’autre et ont opposé à Shaked des déclarations qu’elle avait faites et cité des violations des droits humains commises par Israël.

« Désolé de vous interrompre » lance un homme quelques minutes après le début de l’intervention de Shaked. Il la défie sur la vantardise de Naftali Bennett, le leader de son parti, La Maison Juive, d’avoir tué « des tas d’Arabes ».

« Ce sont des milliers dont vous et votre gouvernement (êtes) responsables du meurtre » dit l’homme. Alors que Shaked continue à parler, on peut l’entendre soulever le cas de la politique israélienne de démolition de maisons et de punitions collectives de Palestiniens.

Un responsable de l’université essaie de faire taire le protestataire, mais il continue à parler sur le paradoxe qu’il y a à inviter Shaked à faire une conférence sur les droits humains.

Il est emmené hors de la pièce par deux hommes et il continue à s’exprimer en signe de protestation.

Quelques minutes plus tard, un autre protestataire se lève et lit le célèbre post de Shaked sur Facebook dans lequel elle republiait et soutenait un article de Uri Elitzur qui justifiait le massacre de masse de Palestiniens.

L’article déclare que « l’ennemi c’est la totalité du peuple palestinien » et justifie sa destruction, « y compris ses vieux et ses femmes, ses villes et ses villages, ses biens et ses équipements ».

« Je n’ai pas dit ça » répond Shaked. Le protestataire répond que bien que ce soient les mots d’Elitzur, c’est Shaked qui les a postés sur Facebook. Dans ce post, Shaked a dit que l’article d’Elitzur n’avait pas encore été publié.

Le protestataire est aussi emmené par la sécurité, mais les interruptions continuent et Shaked n’arrive pas à parler sans que ne soient rappelées constamment les violations des droits humains par Israël.

« Israël est un État d’apartheid criminel » s’écrie Ronnie Barkan, un militant israélien de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS). Il a fait sa propre vidéo de la manifestation.

« Menteur » répond Shaked, tandis qu’un agent de sécurité emmène Barkan, qui continue à protester pendant qu’on l’emmène.

Un peu plus tard, un autre s’écrie « je ne m’excuse pas de vous interrompre encore une fois, mais vous représentez un régime raciste d’apartheid. Et il est honteux que l’université de Vienne vous offre un lieu pour développer vos propos racistes et d’apartheid ».

Ce protestataire est le vidéographe de BDS Autriche et il continue à enregistrer tandis qu’on l’emmène. « Non à l’apartheid ! Palestine libre » crie-t-il.

Cette protestation fut semblable à l’interruption saisie en vidéo de l’ex premier ministre israélien Ehoud Olmert à l’université de Chicago en 2009, et d’autres qui ont harcelé des représentants israéliens et des suspects de crimes de guerre depuis cette date.

Lundi, l’ambassadeur d’Israël à l’ONU, Danny Danon, a été confronté à des manifestations du même type à l’Université Columbia à New York.

“Dialoguer” sur l’extermination des Palestiniens?

Des centaines d’universitaires et un groupe représentant des Juifs d’Allemagne avaient appelé l’université de Vienne à annuler la conférence de Shaked.

Mercredi, l’université a publié une déclaration justifiant l’invitation.

Celle-ci disait que Shaked avait été invitée dans le cadre d’un événement régulier, « Les séries de conférences d’experts ».

L’université a ajouté : « à la suite de leurs conférences nous invitons nos conférenciers à avoir un dialogue avec le public spécialisé et à s’engager dans la controverse et dans un débat ouvert, dans le cadre du discours académique. Ces discussions ne signifient pas que l’assistance adopte les thèses de nos invités, elles font plutôt office de forum de discussion ».

L’université banalise de fait le point de vue de Shaked selon lequel le meurtre de mères pour empêcher des naissances dans un groupe spécifique de population – un acte qui entre précisément dans la définition internationale légale du génocide, est un sujet adapté à un « débat académique ».

Accepter de tels termes pour un « dialogue » banalise la thèse génocidaire que Shaked a endossée.

“Non”

En prononçant le discours d’ouverture de cet événement, Friedrich Rüffler, le vice-président de la faculté de droit, a rappelé l’histoire nazie de l’Autriche et de l’Université de Vienne, comme justification de l’invitation de Shaked.

« Une université et, en particulier, une faculté de droit, se doit d’être un lieu de liberté de parole, où des opinions sujettes à controverse peuvent et devraient être exprimées et débattues » a dit Rüffler.

Il a ajouté : « Ce serait un mauvais signal, ce serait erroné en soi que nous ne donnions pas la possibilité au ministre de la justice de l’État d’Israël d’exprimer son point de vue ici en Autriche et à la faculté de droit, vu l’histoire de l’Autriche et l’histoire de l’Université de Vienne dans les années 1930 et 1940 du siècle dernier ».

Joint par téléphone à son bureau de Vienne jeudi, Rüffler a dit à l’Electronic Intifada qu’il n’avait pas lu le célèbre post de Shaked de 2014 sur Facebook.

Lorsqu’on lui a lu quelques unes des déclarations de ce post, il a répondu : « je ne peux pas faire de commentaire là-dessus parce que je ne connais pas cette déclaration ».

« Je ne peux pas prouver que Mme Shaked a tenu ces propos» a-t-il ajouté.

Quand on lui a demandé s’il ferait un commentaire si on lui envoyait la preuve, Rüffler a répondu : « Non »

« Je ne veux pas prendre position dans ce débat sur le conflit du Moyen Orient » a dit Rüffler.

« Nous approuvons le fait que l’université devrait être un lieu de liberté de parole, mais ce qui se passe est plutôt à l’opposé » a dit à l’Electronic Intifada Marco Van Jura, un étudiant de la faculté de droit, cofondateur de BDS Autriche.

« Tout le monde à l’université sait très bien que le sujet de la Palestine, il ne faut pas en parler. Je ne dis pas qu’il y a une censure directe sur ce thème, mais personne n’y touche parce que cela peut bloquer votre carrière et vous causer beaucoup de problèmes ».

Van Jura disait l’an dernier qu’il avait posté des annonces d’événements liés à BDS sur la page Facebook de son département, et qu’elles ont été purement et simplement effacées par des administrateurs.

Résister à la haine

Il semble que la leçon tirée par les enseignants de l’Université de Vienne sur la persécution et le génocide des Juifs d’Europe, et de la résurgence considérable d’une idéologie d’extrême droite en Autriche, est que les représentants d’Israël, qui prétendent parler au nom des Juifs de partout, devraient être reçus comme des invités d’honneur même après qu’ils aient répandu des appels au génocide des Palestiniens.

Dans une déclaration expliquant son action, BDS Autriche a placé sa contestation dans le contexte de la résistance à la montée de l’extrémisme. « Pas de tribune pour la ministre israélienne raciste Ayelet Shaked » a déclaré le groupe. « Stop aux politiques haineuses d’extrême droite à l’Université de Vienne ».

L’Autriche ne met pas la liberté de parole au-dessus de la protection ou de la négation du génocide ; c’est pourquoi son droit contient une interdiction absolue de soutenir l’idéologie nazie.

Van Jura de BDS Autriche tire de l’histoire de son pays un enseignement différent de celui des administrateurs. « Je dis, et beaucoup d’autres aussi le disent, qu’à cause de notre histoire et des crimes terrifiants du régime nazi, nous devons nous exprimer publiquement » a dit Van Jura.

« Le sens de « jamais plus » c’est jamais plus pour qui que ce soit, jamais. Nous condamnons fermement Ayelet Shaked, pas seulement comme représentante du régime d’apartheid, mais Shaked a elle-même appelé au génocide ».

Il a souligné le tabou général sur la critique d’Israël en Autriche. L’an dernier, un événement prévu au Parlement en l’honneur de feu la survivante de l’holocauste et militante BDS Hedy Epstein, a été annulé après une campagne de diffamation par des anti Palestiniens.

« Et d’un autre côté, l’université invite ouvertement une ministre qui appelle au génocide » a dit Van Jura.

La liberté de parole est un droit fondamental, mais il n’oblige aucune institution, en particulier une faculté de droit, à offrir une tribune à des racistes génocidaires, ni d’accueillir et d’honorer des représentants officiels et des agents d’un État dont les crimes de guerre sont actuellement examinés par la Cour Pénale Internationale.

Ainsi que le déclarent les Juifs Européens pour Une Paix Juste d’Allemagne dans leur lettre ouverte à l’université, l’invitation de Shaked a été une trahison de leurs familles qui ont souffert de la persécution nazie en Europe.

En tant que personnes d’origine juive en Allemagne, écrivent-ils, « nous savons de l’expérience historique de nos ancêtres, la dégradation et la souffrance auxquelles sont soumis des êtres humains s’ils sont systématiquement l’objet d’exclusion et de privations ».

Leur appel à ne pas honorer Shaked comme hôte « distinguée », a été ignoré.