Une université étatsunienne rejette des accusations d’antisémitisme contre un professeur de psychologie

Une enquête mandatée par l’Université George Washington conclut à l’absence de preuve qui permettrait de conforter les accusations d’antisémitisme contre Lara Sheehi

Une enquête indépendante mandatée par l’Université George Washington a lavé Lara Sheehi des accusations d’antisémitisme portées contre cette universitaire par un groupe pro-Israel plus tôt dans l’année.

Le résumé des conclusions de l’enquête publié lundi, a établi que les allégations d’antisémitisme de Sheehi non seulement n’avaient pas de preuves ni l’éléments les soutenant, mais que Sheehi avait « à plusieurs reprises reconnu les sentiments des étudiants, leur avait donné de l’espace pour exprimer leurs préoccupations et dénoncé l’antisémitisme comme danger réel et présent ».

« Nombre des déclarations que la plainte prétend avoir été faites par le Dr Sheehi étaient, selon ceux qui les ont entendus, citées de façon imprécise ou sorties du contexte et présentées de façon erronée » ; c’est ce qu’établit le rapport de l’enquête menée par le cabinet juridique Crowell and Moring LLP.

Dans une déclaration de l’ADC, le Comité Arabe-Américain contre la discrimination, Sheehi a bien accueilli les résultats et dit qu’elle espérait que les résultats du rapport, « adresseraient un message clair » à des groupes qui essaient de harceler et faire taire des universitaires comme elle.

« Je suis reconnaissante envers les enquêteurs et au travail dépensé pour documenter de façon méticuleuse ce que je savais depuis le premier jour : ceux d’entre nous qui luttent pour la libération palestinienne ne le font pas sur le dos de nos frères et sœurs juifs et nous ne faisons pas de discrimination, de représailles ou de manœuvres d’isolement envers les étudiants juifs dans nos cours » a-t-elle dit.

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Sheehi est professeur assistante en psychologie clinique à l’Université George Washington et elle est co-auteure du livre Psychanalyse Sous Occupation : Pratique de la Résistance en Palestine.

L’enquête a été faite après que StandWithUs (SWU – Avec Nous), une organisation pro-Israël a déposé une plainte au niveau fédéral contre l’université en janvier. La plainte avance que Sheehi a créé un environnement hostile pour les étudiants juifs dans un cours obligatoire sur la diversité pendant le semestre d’automne 2022.

La plainte s’est concentrée sur la définition de l’antisémitisme et a prétendu que Sheehi avait fait des remarques blessantes et nié que les étudiants aient fait l’expérience de l’antisémitisme. L’enquête de Crowell a cependant établi que “aucun des étudiants interviewés ne se rappelait avoir entendu le Dr Sheehi nier que l’antisémitisme existe ou nier que les étudiants aient vécu de telles expériences.

« Eu égard aux échanges qui ont eu lieu dans le cours du Dr Sheehi, pour être clair, l’enquête n’a trouvé aucune preuve que son discours ait franchi la ligne d’une parole antisémite » selon ce qu’établit le résumé de l’enquête.

« Si nous respectons le droit des individus au désaccord, nous dénonçons fermement les messages de haine et les menaces contre le Dr Sheehi et sa famille qui se sont exprimés depuis que SWU a fait connaître sa lettre à OCR ».

Accusations d’antisémitisme sur les campus étatsuniens

Alors que l’enquête indépendante a délivré Sheehi des accusations d’antisémitisme, la plainte de StandWithUs a été déposée auprès du Bureau des Droits Civils (OCR) du Département étatsunien de l’Éducation – et non à l’université – ce qui peut prolonger l’affaire.

StandWithUs  a dit dans une déclaration faite lundi que le groupe désapprouvait les résultats et a fait appel à l’université pour qu’elle publie le rapport dans son intégralité.

À la suite du dépôt de plainte de StandWithUS, un groupe israélien de plus de 700 universitaires a envoyé  une lettre à l’université en solidarité avec Sheehi, disant que l’universitaire était visée « précisément parce qu’elle est solidaire des Palestiniens ».

Sheehi s’est aussi défendue elle-même en février, argumentant dans un article publié dans le magazine CounterPunch que les allégations d’antisémitisme contre elle étaient une tentative de « fabriquer une controverse sur mon enseignement et sur mon militantisme sur la Palestine ».

La définition de l’antisémitisme est une question très présente aux États-Unis depuis quelques années, de nombreux groupes pro-Israël ayant poussé les universités à adopter la définition de l’IHRA, l’Alliance Internationale pour la Mémoire de l’Holocauste, qui a d’ores et déjà été adoptée par les gouvernements de plus de vingt pays, dont les États-Unis.

La définition de l’IHRA a une liste d’exemples d’antisémitisme, dont sept sont en rapport avec Israël et la définition a été critiquée comme tentative de supprimer la liberté de parole, y compris par des intellectuels juifs et par le Progressive Israel Network, le réseau progressiste d’Israël.

En janvier, l’OCR a annoncé que la décision attendrait celle à prendre sur la définition de l’antisémitisme de l’IHRA. L’OCR a servi de champ de bataille pour des groupes pro-Israël qui ont déposé contre des universités étatsuniennes de nombreuses plaintes au niveau fédéral sur des allégations d’antisémitisme.

L’Université George Washington a aussi été au centre de plusieurs affaires d’allégation de discrimination, notamment de la part d’étudiants palestiniens et de membres du personnel qui disent que l’établissement les a discriminés sur la base de leur « origine nationale ».

En février, plusieurs étudiants ont déposé plainte auprès de l’OCR pour atteinte aux droits civils, déclarant que l’université refusait des services aux étudiants palestiniens pour le traitement du traumatisme lié à l’occupation par Israël des territoires palestiniens.

En 2021, Palestine Legal a déposé une plainte similaire contre l’Université George Washington, cette fois au nom d’un membre du personnel disant que le personnel aussi était privé de l’accès au service de traitement des traumatismes mis à disposition par l’établissement.

En 2015, la police du campus a donné l’ordre à un étudiant de retirer le drapeau palestinien de sa fenêtre. Le président de l’université a ensuite présenté des excuses pour l’incident.