Stella Maris critique la décision de la démettre de deux de ses fonctions après qu’elle a accusé Israël de génocide et d’apartheid.
La rectrice[1] de l’université St Andrews a été démise de ses fonctions au sein de l’organe directeur de l’institution et de sa position de trustee après avoir accusé Israël de génocide et d’apartheid.
Stella Maris a critiqué la décision de la démettre de ces deux fonctions, décision qui a été prise après que l’université a commissionné une investigation à propos d’un email qu’elle a envoyé en novembre à tous les étudiants de St Andrews, appelant à un cessez-le-feu immédiat à Gaza.
L’investigation, menée par Morag Ross, avocate et Conseillère du roi, dont le rapport a été rendu public le jeudi 1er août, a conclu qu’il serait « disproportionné » de renvoyer Maris. Mais le Conseil de l’université – l’organe de direction de St Andrews – a dit avoir néanmoins agi ainsi parce que Maris avait refusé à plusieurs reprises d’accepter les conclusions de Ross, dont celle affirmant qu’à cause d’elle plusieurs étudiants « craignaient pour leur sécurité ».
Ray Perman, senior lay member[2] et président du Conseil, a déclaré : « Selon la loi régissant les organismes caritatifs et le code écossais de bon gouvernement dans l’enseignement supérieur, malheureusement, le Conseil n’a pas d’autre choix que de démettre Stella Maris de deux des rôles administratifs qui sont traditionnellement associés à la position de rectrice d’une université. »
« Le Conseil aimerait souligner que cette décision n’a aucune incidence sur la liberté d’expression de Ms Maris, à laquelle elle a droit et pour laquelle, comme n’importe qui d’autre, elle est personnellement responsable. Nous reconnaissons que certaines parties de la déclaration de la rectrice ont été une source importante de réconfort pour des étudiants affectés par le conflit à Gaza. »
Dans son message aux étudiants, Maris a qualifié les attaques d’Israël contre Gaza de « génocidaires » et a condamné ses pratiques incluant « l’apartheid, le siège, l’occupation illégale et la punition collective ». Maris a aussi dénoncé « les crimes de guerre » du Hamas, en particulier la prise d’otages et le ciblage délibéré des civils.
Dans son rapport, Ross a dit que quelques étudiants, particulièrement des étudiants juifs, ont été bouleversés et « ont craint pour leur sécurité », alors que d’autres se sont sentis « justifiés et entendus ». Il y a eu des lettres ouvertes à la fois pour soutenir et pour critiquer Maris.
L’avocate a dit qu’il y avait « une tension claire »’ entre « la critique énergique de la position israélienne », y compris l’utilisation des termes « génocide » et « apartheid » et l’objectif affirmé par la rectrice, qui était de souligner que « les personnes doivent se rapprocher, que toute forme de sectarisme et de haine doit être condamnée et que la paix est le but ».
Le rapport a dit que des termes comme « apartheid » et « génocide » étaient « contestés » et qu’au moment de la déclaration « il y avait des nombres croissants de personnes appelant à un cessez-le-feu, même si c’était une question politiquement controversée ». Ross a dit que la déclaration de Maris « bien qu’elle ne soit pas en elle-même antisémite … pourrait encourager, directement ou indirectement, l’expression de l’antisémitisme par d’autres ». Ses posts ultérieurs sur les réseaux sociaux pour répondre aux critiques ont été décrits comme « inopportuns ».
Cependant, la Conseillère a conclu : « Un renvoi interférerait avec les droits à la liberté d’expression de Ms Maris d’une manière injustifiée ».
Maris, qui restera rectrice jusqu’à la fin de son mandat en octobre 2026, a dit qu’elle était désappointée par la décision, « qui montre un manque de respect pour le rôle de la rectrice — parler de manière indépendante pour les étudiants en tant que leur représentante élue —, et crée un précédent dangereux pour la liberté d’expression dans l’enseignement supérieur »
« Il est clair que j’ai été renvoyée du Conseil de l’université parce que j’ai appelé à mettre un. terme aux crimes de guerre d’Israël contre les Palestiniens et je ne présenterai pas d’excuses pour l’avoir fait. En tant que jeune femme noire neurodiverse avec des ressources financières limitées, j’ai été confrontée à la pleine force de l’université, y compris à une investigation par une Conseillère du roi, tout cela parce que j’ai fait une déclaration soutenant la majorité écrasante des étudiants, et appelant à mettre fin à un génocide. »
Elle a souligné l’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ), qui a jugé que l’occupation par Israël de territoires palestiniens violait le droit international, et la plainte déposée par l’Afrique du Sud contre Israël à la CIJ, alléguant un génocide à Gaza, ce qu’Israël nie.
Maris a dit qu’elle « avait pleinement l’intention de faire appel de la décision » avec le soutien du Centre européen de soutien juridique, ajoutant : « L’idée que les droits humains palestiniens et les crimes de guerre d’Israël à Gaza ne peuvent être discutés dans l’enseignement supérieur est très inquiétante ».
Elle a été soutenue par le professeur Ghassan Abu-Sittah, recteur de l’université de Glasgow et chirurgien qui a apporté son témoignage sur la guerre d’Israël à Gaza après y avoir opéré pendant le conflit, et qui a déclaré : « Réduire au silence les voix pro-palestiniennes ou anti-génocide est la raison pour laquelle ce génocide continue après 10 mois. »
[1] À l’université St Andrews, le recteur ou la rectrice préside en principe les réunions du Conseil d’administration (University Court) qui gère l’université (décidant entre autres des budgets et des politiques académiques et financières, ainsi que du personnel). La rectrice (qui ne doit être ni étudiante, ni membre du personnel de l’université) est élue pour trois ans par les étudiants et doit s’assurer que leurs voix et les problèmes soient pris en compte dans les projets et la gestion de l’université.
[2] Le Conseil d’administration de l’université St Andrews inclut des membres extérieurs (lay members), bénévoles, dont le plus important est le senior lay member, qui est garant du bon déroulement des réunions du Conseil et de la bonne représentation de l’université dans différents organismes extérieurs. Il préside le Conseil en l’absence de la rectrice.