Les célébrations de la Journée de l’Indépendance ont eu lieu cette année à l’ombre de la menace du projet du gouvernement de remaniement judiciaire et d’une profonde inquiétude pour l’avenir des droits humains et civiques en Israël.
Cette inquiétude est particulièrement grande en ce qui concerne les droits des femmes. L’histoire de Muna (ce n’est pas son véritable nom), résidente palestinienne de Jérusalem Est, est un exemple de la façon dont souffrent les femmes là où les droits de l’être humain ne sont plus une valeur absolue. Des milliers d’autres femmes de Jérusalem Est sont dans une situation similaire, comme Noa Limone l’a rapporté au début du mois dans l’édition en hébreu de Haaretz.
Muna était enceinte et avait décidé d’accoucher à l’Hôpital Universitaire Hadassah de Jérusalem, sur le Mont Scopus, parce qu’elle craignait que son fœtus souffre d’une malformation cardiaque et qu’elle pensait que Hadassah pourrait prodiguer les meilleurs soins à elle et à son bébé. Mais quand elle est allée s’inscrire à l’hôpital quelques semaines avant la date prévue de l’accouchement, elle a découvert que pour ce faire, elle devait fournir à l’hôpital un chèque de 16.000 shekels (4.400 $) sous forme de dépôt. Cette exigence est due à la demande de l’Institut National des Assurances (INA) disant que son statut de résidente de Jérusalem devait être réétudié parce que son mari réside en Cisjordanie. L’enquête demande trois à quatre mois. En d’autres termes, elle prendrait fin longtemps après la date prévue de l’accouchement.
Après avoir franchi une série d’obstacles bureaucratiques qui impliquaient de sauter de l’hôpital à l’INA à Jérusalem Est avec des relevés bancaires, des fiches de paie et autres documents, et avoir même subi la visite à domicile d’inspecteurs de l’INA qui ont jeté un œil dans son réfrigérateur et questionné ses voisins, Muna a finalement été obligée d’accoucher dans un hôpital de Jérusalem Est, malgré sa peur que cet hôpital ne soit pas en mesure de prendre correctement soin de son nouveau-né. Alors même qu’elle est une résidente de Jérusalem qui paie ses impôts et a une assurance maladie, elle ne pouvait courir le risque de ne pas récupérer l’argent déposé ; rappelons que le taux de pauvreté à Jérusalem Est est d’à peu près 80 %. Pourtant, les appels téléphoniques de l’INA ont continué de la harceler, même au cours de l’accouchement.
Les Palestiniens de Jérusalem vivent sous la menace de voir leur résidence révoquée à tout moment, et toute tentative pour exercer leurs droits fondamentaux est conditionnée à un nouvel examen pour déterminer si le « centre de leur vie » est bien dans la ville. D’après l’association des travailleurs Maan, les Palestiniens sont souvent déchus de leur droit de résidence, sans aucune enquête et même s’ils n’exigent pas leurs droits. Et, une fois qu’ils ont perdu leur droit de résidence, ils perdent aussi quantité d’autres droits.
La pratique scandaleuse qui consiste à refuser d’enregistrer la naissance d’enfants nés de Palestiniennes de Jérusalem Est sans le paiement préalable des dépenses de leur hôpital, simplement parce que leu mari n’est pas israélien, n’est qu’un des exemples de la façon dont la politique israélienne dans la partie orientale de la ville nuit en premier lieu aux femmes. Il s’agit d’une violence bureaucratique massive et intolérable qui aboutit dans les faits à priver la mère et son nouveau-né de leur droit fondamental à un traitement médical.
Le combat pour la démocratie d’Israël ne prendra pas fin si la législation pour affaiblir la Cour Suprême est mise en veilleuse ; il requiert aussi une longue liste de changements fondamentaux dans le statut des résidents palestiniens, leurs droits et la façon dont l’État les traite.