GENÈVE (18 septembre 2024) – Plus de 50 jours après que la Cour Internationale de Justice (CIJ) ait émis son Avis Consultatif historique, déclarant que l’occupation du territoire palestinien par Israël était illégale, des experts de l’ONU* avertissent que l’édifice du droit international est sur le fil du rasoir, la plupart des États n’ayant pas pris de mesures significatives pour se conformer à leurs obligations internationales réaffirmées dans l’arrêt.
GENÈVE (18 septembre 2024) – Plus de 50 jours après que la Cour Internationale de Justice (CIJ) ait émis son Avis Consultatif historique, déclarant que l’occupation du territoire palestinien par Israël était illégale, des experts de l’ONU* avertissent que l’édifice du droit international est sur le fil du rasoir, la plupart des États n’ayant pas pris de mesures significatives pour se conformer à leurs obligations internationales réaffirmées dans l’arrêt. Proposant des points d’action spécifique aux États qui se conformeraient à l’Avis de la CIJ et au droit international, un groupe d’experts a émis la déclaration suivante :
« Plus de 50 jours sont passés depuis que la Cour Internationale de Justice a émis un Avis Consultatif qui fait date. La CIJ a déclaré que l’occupation par Israël du territoire palestinien, qui comprend la Cisjordanie, dont Jérusalem Est, et la Bande de Gaza, était illégale selon le droit international et a souligné que les actions d’Israël équivalaient à une annexion. L’Opinion a fait remarquer que les actions d’Israël comprenaient le transfert forcé, la discrimination raciale et la ségrégation ou apartheid, et une violation du droit à l’autodétermination du peuple palestinien. Particulièrement alarmant est l’impact de ces violations sur des générations d’enfants palestiniens et ses effets disproportionnés sur les femmes, les personnes porteuses de handicap et les personnes âgées.
La Cour a réaffirmé qu’on ne peut laisser la réalisation de l’autodétermination à des négociations bilatérales entre deux parties inégales et asymétriques – l’occupant et l’occupé. Elle a appelé Israël à cesser immédiatement ses activités de colonisation illégales et à se retirer de ces zones aussi rapidement que possible. Plus important, la Cour a donné des instructions sans équivoque au sujet des responsabilités des États et des organisations internationales, concernant l’occupation israélienne illégale.
Malgré ces instructions catégoriques, les États restent paralysés face au bouleversement sismique que représente la décision de la Cour et semblent ne pas vouloir ou ne pas pouvoir prendre les décisions nécessaires pour remplir leurs obligations.
Les agressions dévastatrices à travers le territoire palestinien occupé démontrent qu’en continuant de fermer les yeux sur la situation dramatique du peuple palestinien, la communauté internationale contribue à la violence génocidaire. Gaza reste soumise au siège et à d’intenses bombardements, ses maisons, écoles, hôpitaux et camps densément peuplés de milliers de personnes déplacées régulièrement attaqués. L’étendue de la destruction et de la contamination environnementales de Gaza qui en résultent doit encore être complètement évaluée. L’échelle de la destruction du paysage palestinien et de son tissu urbain, dont les écoles et les universités, les hôpitaux, la violation de logements, de terres et de propriétés, la pollution et la dégradation de l’environnement, et l’exploitation des ressources naturelles, est extrême à Gaza et s’étend dans tout le reste du territoire occupé, suscitant des allégations de domicide, urbicide, scholasticide, médicide, génocide culturel et, plus récemment, écocide. L’extrême violence et l’intimidation à l’encontre des Palestiniens de Cisjordanie et les agressions armées contre les villes de Jénine, Naplouse, Tulkarem, Tubas et dans les zones rurales où les Palestiniens pratiquent le pastoralisme, sont toutes en augmentation.
Les États doivent agir maintenant. Ils doivent écouter les voix qui les appellent à agir pour arrêter les attaques d’Israël contre les Palestiniens et mettre fin à son occupation illégale. Tous les États ont une obligation légale de se conformer au décret de la CIJ et doivent promouvoir l’adhésion aux normes qui protègent les civils. Par conséquent, les États devraient :
1. Revoir immédiatement toutes leurs interactions diplomatiques, politiques et économiques avec Israël pour s’assurer qu’ils ne soutiennent pas ou ne fournissent pas de l’aide à sa présence illégale dans le territoire palestinien occupé.
2. S’abstenir de reconnaître ou prendre des mesures pour annuler la reconnaissance de tout changement dans le caractère physique ou la composition démographique, la structure institutionnelle ou le statut du territoire palestinien occupé, y compris dans leurs relations contractuelles avec Israël et alors qu’il agissent en tant que membres des organisations internationales.
3. Prendre toutes les mesures permettant d’assurer que le peuple palestinien dans le territoire palestinien occupé peut pleinement exercer et réaliser son droit à l’autodétermination, y compris la reconnaissance de l’État de Palestine.
4. Imposer à Israël un embargo total sur les armes, arrêter tous accords, importations, exportations et transferts d’armes, y compris les objets à double usage, qui pourraient être utilisés contre la population palestinienne sous occupation.
5. Interdire aux marchandises et services issus à la fois de la colonisation du territoire palestinien occupé et autres activités illégales qui pourraient porter préjudice aux droits des Palestiniens, d’entrer sur leur territoire et leurs marchés et prendre des mesures pour étiqueter et autoriser les marchandises et services provenant d’individus ou d’organismes palestiniens dans le territoire occupé.
6. Annuler ou suspendre les relations économiques, les accords commerciaux et les relations académiques avec Israël qui pourraient contribuer à sa présence illégale et au régime d’apartheid dans le territoire palestinien occupé.
7. Imposer des sanctions, y compris le gel d’avoirs, aux individus, entités y compris les entreprises, corporations et institutions financières israéliennes, impliquées dans l’occupation illégale et le régime d’apartheid, ainsi que sur toute entité ou individu étranger ou national soumis à leur juridiction qui fournit des marchandises et des services qui pourraient aider, assister ou permettre l’occupation et l’apartheid.
8. Empêcher tous ceux de leurs citoyens qui ont la double nationalité avec Israël de servir dans l’armée israélienne ou autres services qui contribuent à l’occupation et au régime d’apartheid ou d’acheter ou louer une propriété où que ce soit en territoire palestinien occupé.
9. Enquêter et poursuivre les personnes relevant de leur compétence qui sont impliquées dans des crimes en territoire palestinien occupé, y compris les citoyens qui servent dans l’armée d’Israël, y compris les mercenaires ou ceux qui sont impliqués dans la violence coloniale.
10. Abolir la législation et la politique qui criminalisent et pénalisent la défense des droits des Palestiniens à l’autodétermination et à l’opposition non violente à l’occupation israélienne et à l’apartheid, y compris le soutien au mouvement de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS).
11. Diffuser largement les conclusions de la Cour, en s’assurant que le statut d’occupées de la Cisjordanie, dont Jérusalem Est, et de la Bande de Gaza, et que l’illégalité de la présence d’Israël sont reprises dans les documents publics et les systèmes éducatifs.
12. Faire des propositions à la CPI afin qu’elle enquête sur les crimes internationaux inclus dans l’avis de la CPI.
13. Convoquer les Assemblées Générales des États parties sous le Statut de Rome ou la Quatrième Convention de Genève, pour assurer un respect total de toutes les parties en Palestine et en Israël du droit humanitaire international et du droit pénal international.
14. Assurer la protection totale des Palestiniens, spécialement les femmes, les enfants, les personnes porteuses de handicap et les personnes âgées en installant une présence protectrice et en assurant un accès sûr et total à des experts et des mécanismes indépendants chargés de contrôler et d’enquêter sur les violations des droits de l’Homme et les crimes internationaux dans le territoire palestinien occupé.
On a besoin d’une action décisive. Face à l’inaction irresponsable de la plupart des gouvernements, il incombe maintenant aux organisations de la société civile et aux Institutions Nationales des Droits de l’Homme de se mobiliser et d’appeler leurs États à se conformer à l’Avis Consultatif historique de la CIJ. Il est temps de frapper à la porte de chaque dirigeant politique et de tout fonctionnaire responsable d’un ministère à travers le monde pour mettre fin à l’occupation illégale, à l’apartheid, et au massacre du peuple palestinien par Israël et finalement, d’assurer la vérité, la justice et la responsabilité. Nous le devons spécialement aux femmes et aux enfants, qui ont été touchés de façon disproportionnée par la catastrophe en cours.
Ne pas agir maintenant met en péril la totalité de l’édifice du droit international et de l’état de droit dans les affaires mondiales.
Le monde est sur le fil du rasoir : Soit nous partons collectivement vers un avenir de juste paix et de légalité – soit nous nous précipitons vers l’anarchie et la dystopie et un monde où la force fait la loi. »
*Les experts : Francesca Albanese, Rapporteure spéciale sur la situation des droits de l’homme dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967 ; Balakrishnan Rajagopal, Rapporteur Spécial sur le Droit à un Logement Convenable ; Tlaleng Mofokeng, Rapporteur Spécial sur le droit de chacun à jouir du meilleur standard atteignable de santé physique et mentale ; Farida Shahid, Rapporteure Spéciale sur le droit à l’éducation ; George Katrougalos, Expert Indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable ; Nicola Levrat, Rapporteur Spécial sur les questions de Minorité ; Cecilia M Bailliet, Experte indépendants sur les droits de l’Homme et la solidarité internationale ; Irene Khan, Rapporteure Spéciale sur le droit à la liberté d’opinion et d’expression ; Gina Romero, Rapporteure Spéciale sur les droits à la liberté d’Assemblée Pacifique et d’Association ; Tomoya Obokata, Rapporteure spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris ses causes et ses conséquences ; Alexandra Xanthaki, Rapporteure Spéciale dans le champ des droits culturels ; Heba Hagrass, Rapporteure Spéciale sur les droits des personnes porteuses de handicap ; Ashwini K.P., Rapporteur Spécial sur les formes contemporaines de racisme, de xénophobie et l’intolérance qui y est liée ; Olivier DeSchutter, Rapporteur Spécial sur l’extrême pauvreté et les droits de l’Homme ; Pedro Arrojo Agudo, Rapporteur Spécial sur les droits de l’Homme à l’eau potable et à l’hygiène ; Paula Gaviria Betancur, Rapporteure Spéciale sur les droits de l’Homme des personnes déplacées à l’intérieur d’un pays ; Michael Fakhri, Rapporteur Spécial sur le droit à la nourriture ; Rim Alsalem, Rapporteure Spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences ; Marcos A. Orellana, Rapporteur Spécial sur les implications pour les droits de l’Homme de la gestion et l’élimination respectueuses de l’environnement des substances et déchets dangereux ; Richard Bennnett, Rapporteur Spécial sur la situation des droits de l’Homme en Afghanistan ; Barbara G. Reynolds (présidente), Bina D’Costa, Dominique Day, Groupe de Travail d’Experts sur les Personnes d’Origine Africaine ; Mary Lawlor, Rapporteure Spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’Homme ; Ms. Fernanda Hopenhaym (Présidente), Ms. Pichamon Yeophantong, Mr. Damilola Olawuji, Mr. Robert McCorquodale et Ms. Lyra Jakuleviciené, Groupe de Travail sur la question des droits de l’Homme et et des corporations transnationales et autres entreprises ; Laura Nyirinkindi (Présidente), Claudia Flores (Vice-Présidente), Dorothy Estrada Tanck, Ivana Krstic et Haina Lu, Groupe de Travail sur les discriminations contre les femmes et les filles ; Geneviève Savigny, présidente rapporteure, Carlos Duarte, Uche Ewelukwa, Shalmali Guttal, Davit Hakobyan, Groupe de Travail sur les droits des paysans et autres travailleurs en zones rurales
Rapporteurs Spéciaux, Experts Indépendants et Groupes de Travail font partie de ce que l’on connaît sous le nom de Procédures Spéciales du Conseil des Droits de l’Homme. Procédures Spéciales, organisme le plus grand d’experts indépendants dans le système des Droits de l’Homme de l’ONU, est le nom général des mécanismes indépendants d’établissement et de suivi des faits du Conseil qui traitent soit des situations dans un pays spécifique, soit de questions thématiques dans toutes les parties du monde. Les experts des Procédures Spéciales travaillent sur la base du volontariat ; ils ne font pas partie du personnel de l’ONU et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et servent selon leur capacité individuelle.
Pour toute information supplémentaire et les demandes des médias, veuillez contacter – HRC-SR sur les Droits de l’Homme dans les TPO hrc-sr-opt@un.org
Pour les enquêtes de médias au sujet d’autres experts indépendants de l’ONU, veuillez contacter Dharisha Indraguptha (dharisha.indraguptha@un.org) ou John Newland (john.newland@un.org)
Suivez les nouvelles en lien avec les experts indépendants en droits de l’homme de l’ONU sur Twitter : @UN_SPExperts