Un porte-parole de Gaza dit qu’Israël a tiré avec des tanks et des drones, tandis que l’armée israélienne reconnaît que ses troupes ont tiré vers des « suspects ».
Au moins 27 personnes ont été tuées par des tirs israéliens alors qu’elles attendaient de la nourriture à un centre de distribution établi à Gaza par une fondation soutenue par les Israéliens, selon des responsables de la santé dans la Bande de Gaza.
C’est le troisième incident de cette sorte en trois jours, Israël admettant mardi pour la première fois que ses forces armées avaient tiré sur des individus qui se dirigeaient vers elles.
Le porte-parole de la Défense civile de Gaza, Mahmoud Bassal, a déclaré à l’Agence France-Presse : « Les forces israéliennes ont ouvert le feu, avec des tanks et des drones, sur des milliers de civils qui s’étaient rassemblés depuis l’aube près du rond-point al-Alam dans la zone d’al-Mawasi, au nord-oust de Rafah ». C’est le même site où plus de 30 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens dimanche alors qu’ils se dirigeaient vers le centre de distribution.
Le ministre de la Santé de Gaza a dit que 27 personnes avaient été tuées tôt mardi dernier. Des médias affiliés au Hamas ont aussi transmis des rapports.
Le chef des droits humains des Nations Unies, Volker Türk, a décrit « les attaques meurtrières » sur des civils autour de la distribution alimentaire comme un crime de guerre.
« Ces attaques meurtrières contre des civils désemparés essayant d’accéder aux quantités dérisoires d’aide alimentaire [disponibles] dans Gaza sont inadmissibles », a dit Türk. « Des attaques dirigées contre des civils constituent une grave violation du droit international et un crime de guerre.»
« Il y avait trois enfants et deux femmes parmi les morts », a dit au Guardian Mohammed Saqr, le chef des soins infirmiers à l’hôpital Nasser, qui a reçu les 27 corps. « La plupart des patients avaient des blessures par balles, d’autres des éclats d’obus sur tout le corps, ce qui signifie qu’ils ont été pris pour cibles par des tanks ou des munitions d’artillerie. ».
Les médecins de l’hôpital Nasser ont dit que les forces israéliennes avaient principalement ciblé la tête, la poitrine et les parties supérieures des corps des victimes et que l’établissement de santé était à court d’unités de sang [pour les transfusions] et de fournitures médicales.
Hisham Mhanna, porte-parole pour le Comité international de la Croix-Rouge, a confirmé que son hôpital de terrain de Rafah avait reçu 184 personnes blessées, dont 19 avaient été déclarées mortes à l’arrivée. Huit autres sont plus tard décédées de leurs blessures.
Une vidéo circulant sur les réseaux sociaux a documenté l’arrivée à l’hôpital de la Croix-Rouge de personnes blessées en provenance d’un point de distribution alimentaire dans le gouvernorat de Rafah à Gaza. Elle montrait des cadavres et des personnes blessées trainés par des gens à l’intérieur de l’établissement de soins.
Dans une déclaration, les Forces de défense d’Israël (FDI) ont dit que les troupes avaient tiré des coups de feu près d’un complexe de distribution alimentaire après avoir remarqué « de nombreux suspects se dirigeant dans leur direction ».
« Les forces armées ont tiré des coups de feu dissuasifs et comme les suspects ne se sont pas éloignés, des tirs supplémentaires ont été tirés à proximité des individus suspects qui avançaient vers les forces. Les individus se dirigeaient vers les forces armées d’une manière qui leur posait une menace », a dit l’armée, sans spécifier qui étaient les suspects.
Un porte-parole de la Fondation humanitaire pour Gaza (GHF), une organisation soutenue par les Israéliens qui a pris en charge la distribution alimentaire à Gaza, a dit à The Associated Press que le groupe « était attristé d’apprendre que beaucoup de civils avaient été blessés et tués après s’être déplacés au-delà du couloir de sécurité désigné. »
Des témoins ont dit au Guardian que les tirs ont commencé dans la zone du rond-point du Drapeau dans la ville, à environ 1km du centre de distribution alimentaire.
Fadi Abu Mohammad, 43 ans, a dit qu’un membre de sa famille, Mohammad Abu Shamala, 22 ans, a été tué près du site de l’aide alimentaire.
« Quand ils ont ouvert le feu sur les civils, il a été frappé par une balle dans le dos et il est mort sur le coup », a-t-il dit. « Il devait se marier le mois prochain. »
« Retourner à la distribution de nourriture est un risque immense et potentiellement une sentence de mort, mais tous les gens qui y vont n’ont pas d’autre choix. S’ils ne sont pas tués par des balles ou des obus, ils mourront de faim », a dit Fadi.
Ahmad al-Shaer, 22 ans, qui est allé au centre de distribution d’aide alimentaire avec son ami Hasni Abu Shanab, 35 ans, a dit que les coups de feu ont commencé vers 5 h du matin. « Quand les tirs ont commencé, Hasni s’est aplati sur le sol pour éviter les balles, mais même comme cela une balle l’a frappé, elle a transpercé une de ses jambes, est ressortie et a alors pénétré dans l’autre jambe où elle est restée. Les tirs venaient de toutes les directions et les balles tombaient partout autour de nous », a-t-il dit.
Shaer a dit qu’Abu Shanab a été emmené à l’hôpital Nasser et que l’établissement était « plein de gens dans un état critique. Il n’y avait pas assez de lits, de chambres ou d’équipement médical pour tout le monde ».
Il a ajouté : « Hasni est allé au site d’aide parce qu’il n’avait pas d’autre choix. Il était désespéré pour nourrir ses trois enfants. Il n’avait rien à leur donner et ne pouvait pas satisfaire leurs besoins de base. »
Tamer Nassar, 33 ans, de Beit Hanoun, et qui a été déplacé d’al-Mawasi à Khan Younis, a dit : « Je suis allé à l’aube au point de distribution américain d’aide alimentaire à Rafah. Les tirs ont éclaté brusquement et délibérément contre tous les gens présents dans la zone. Les balles pleuvaient sur nous de partout : de la mer, de l’air, des collines, de toutes les directions. J’en ai été victime, comme beaucoup d’autres autour de moi ; quelques-uns ont été blessés, d’autres ont été tués. J’ai levé mon épaule en essayant de m’aplatir sur mon estomac et c’est à ce moment-là que la première balle a frappé mon épaule », a-t-il dit. « Quiconque essayait d’aider les blessés se faisait aussi tirer dessus. Nous avons décidé d’aller là aujourd’hui malgré le danger extrême. Si nous avions eu de la nourriture à la maison pour apaiser la faim de nos enfants, nous ne serions pas allés risquer nos vies. Ils ont pris des photos de mes blessures et ils ont découvert que la première balle était entrée et sortie, mais que la deuxième restait logée dans l’os et l’avait brisé. »
Les tirs suivent d’autres incidents similaires récents au cours desquels des Palestiniens ont été tués et blessés par des tirs israéliens alors qu’ils venaient chercher de la nourriture dans les points de distribution récemment établis.
Le 28 mai, le Hamas a accusé Israël d’avoir tué au moins trois Palestiniens et d’en avoir blessé 46 autres près des sites de distribution de la GHF. L’armée israélienne a dit que ses troupes ont tiré en guise d’avertissement dans une zone à l’extérieur du centre pour rétablir le contrôle quand des milliers de Palestiniens se sont précipités vers le site de distribution d’aide.
Plus de 30 Palestiniens ont été tués dimanche par des tirs israéliens alors qu’ils allaient recevoir de la nourriture à un point de distribution établi par la fondation soutenue par les Israéliens, selon des témoins. Un hôpital géré par la Croix-Rouge a confirmé qu’il traitait de nombreux blessés.
Les forces israéliennes ont nié « tirer vers des civils » dans l’incident de dimanche. Cependant, un responsable des Forces de défense d’Israël a admis que des soldats israéliens avaient tiré « des tirs d’avertissement en direction de plusieurs suspects qui avançaient vers les troupes », près du site de distribution d’aide, sans spécifier qui étaient ces suspects.
Le Bureau des médias du gouvernement de Gaza a dit qu’Israël avait tué plus de 102 civils depuis l’ouverture des centres d’aide alimentaire dirigés par la Fondation humanitaire pour Gaza.
Israël a imposé un blocus sur toutes les provisions en mars, disant que le Hamas s’emparait des provisions pour ses combattants, ce que le groupe nie. Plus tôt ce mois, un observatoire mondial de la faim a dit qu’un demi-million de personnes de la Bande de Gaza était confronté à la famine.
La GHF a pris en charge le traitement de l’aide humanitaire malgré les objections des Nations Unies et d’autres organisations humanitaires, qui ont critiqué le nouveau système pour la distribution de la nourriture, disant qu’il ne serait pas capable de satisfaire les besoins des 2, 3 millions d’habitants de Gaza, et qu’il permettait à Israël d’utiliser la nourriture comme une arme pour contrôler la population.The Associated Press, Reuters et l’Agence France-Presse ont contribué à ce rapport.