Le soutien sans réserve de l’Allemagne au génocide sioniste a accéléré sa transformation de démocratie néolibérale déjà vidée de sa substance en société autoritaire.

Après 15 mois de crimes inhumains contre les Palestiniens, l’élite politique allemande est plus désireuse que jamais d’étouffer toute critique de cet odieux massacre.
Tout est mis en œuvre pour que le génocide sioniste ne soit pas décrit comme tel, et tout soutien en solidarité avec les victimes de l’un des pires crimes contre l’humanité de l’histoire moderne est criminalisé.
Avec l’adoption de la résolution de novembre 2024 ‘Plus jamais, c’est maintenant : Protéger, défendre et renforcer la vie des Juifs en Allemagne’, le Bundestag a donné la possibilité au gouvernement d’intervenir dans la vie sociale avant tout pour diffamer et punir en tant qu’antisémite quiconque – juif et non-juif – élève la voix contre le régime colonial d’apartheid et ses crimes de guerre.
Maintenant pourtant, le Bundestag s’attaque aux aspects centraux de la démocratie au service d’Israël.
L’attaque de l’État contre les universités et la recherche
Mercredi, quelques jours seulement avant les élections au Bundestag, le parlement a voté dans la précipitation une autre résolution intitulée ‘Antisémitisme et hostilité envers Israël dans les écoles et les universités’ sans presque que le public s’en aperçoive.
Cette résolution n’est rien d’autre qu’une attaque de grave envergure de l’État contre l’autonomie des universités et la liberté de la recherche et de l’enseignement.
A cause des expériences terribles dues à la politique culturelle et éducative centralisée des Nationaux Socialistes, la plupart des constitutions étatiques dans la République Fédérale d’Allemagne d’aujourd’hui accordent aux universités le droit à l’autogestion dans le cadre de la loi, tandis que la liberté de la recherche et de l’enseignement dans les universités et les universités de sciences appliquées est garantie dans l’article 5 (3) de la Loi Fondamentale et protège les professeurs et les universitaires contre l’ingérence de l’État dans leurs recherches et le contenu de leur enseignement.
Ce consensus post-fasciste est maintenant rompu par une grande coalition ‘démocratique’ de Sociaux Démocrates, Verts, libéraux et Chrétiens Démocrates.
La glorification de l’État d’apartheid sioniste et de son idéologie raciste par les parlementaires allemands va si loin qu’ils sont prêts à abandonner un droit fondamental inscrit dans la Loi Fondamentale et un élément central post-fasciste de l’ordre fédéral d’Allemagne.
Il s’agit d’une action incroyable d’oubli historique que le Bundestag allemand veuille restaurer le droit de l’État d’intervenir dans la souveraineté culturelle des états fédéraux à sanctionner étudiants, enseignants et professeurs à réduire au silence et à criminaliser ce qui reste de pensée critique dans les universités allemandes.
Tandis que ceci a déjà affecté en principe les étudiants et les universitaire juifs ainsi que les universitaires allemands critiques, à l’avenir ce genre de système éducatif restauré attaquera en priorité les membres de l’université, qu’ils soient allemands ou d’origine arabe, qui s’opposent à l’État d’apartheid colonial de peuplement et à ses crimes de guerre.
Placer ces étudiants et ces universitaires sous suspicion générale risque d’inciter et incitera leurs camarades étudiants et leurs collègues à les dénoncer et les diffamer.
Tout ceci est typique d’un système autoritaire et n’a rien à voir avec la protection du peuple juif – mais il y a déjà des cas d’obéissance anticipée.
Le cas de l’Université Technique de Munich
Le 22 janvier, les étudiants et le personnel de l’Université Technique de Munich (UTM) – l’une des universités d’excellence les plus réputées d’Allemagne – a demandé une réunion pour discuter de la coopération de l’UTM avec les universités israéliennes.
Dans une vidéo, on voit un représentant de l’administration laisser entrer les étudiants dans l’amphi, tandis qu’un agent de sécurité de l’UTM guide les participants à l’intérieur.
Cependant, une fois à l‘intérieur, les étudiants et les employés ont immédiatement été enfermés pendant trois heures dans la pièce tandis que l’UTM les accusait d’intrusion et appelait la police de Munich.
Cette privation de liberté, à l’instigation de la direction de l’UTM, s’est conclue avec l’identification et la fouille approfondie de tous les participants.
Ce dont le personnel et les étudiants voulaient discuter, c’était les résultats d’une étude de l’association affiliée à l’UT, Universitaires pour la Justice.
L’UTM, pour ne nommer qu’un des six cas mis en lumière, travaille en coopération avec l’Université d’Ariel, qui est située dans une colonie illégale de Cisjordanie et est elle même rejetée par les universitaires et les étudiants en Israël et à l’international.
Trois aspects sont intéressants ici, alors que la coopération viole à la fois le droit international et la position du gouvernement allemand, qui classe les colonies illégales comme contraires au droit international. Néanmoins :
- L’UTM propose un poste de doctorant en partenariat avec l’Université d’Ariel, assorti d’un logement sur le campus. Le rapport souligne l’importance de cette collaboration, citant des activités telles qu’un atelier conduit par l’UTM dans la colonie illégale et une proposition de recherche conjointe publiée en 2024.
- Participation actuelle de l’UTM à un projet de recherche de la société d’armement Rafael de l’État d’Israël.
- Recherche militaire actuelle de l’UTM avec l’Université Technion d’Israël et coopération étroite avec le Prof. Ben-Asher, expert en guidage de missiles et en défense antimissiles balistiques. Ben-Asher est un expert militaire de haut rang et a travaillé pendant des dizaines d’années pour des entreprises israéliennes d’armement.
L’excellent UTM, comme le montrent ces collaborations, ne se soucie pas le moins du monde du droit international, et même jusqu’à 200.000 civils palestiniens assassinés ne leur suffisent pas pour mettre fin à leur honteuse collaboration avec les universités israéliennes, qui font tout simplement partie du régime sioniste d’extermination.
Tandis que les actions de la direction de l’UTM peuvent sembler choquantes, à la suite de l’adoption de la résolution du Bundestag, ce pourrait bientôt être l’expérience quotidienne des étudiants, du personnel et des professeurs dans les universités allemandes alors qu’ils s’opposent au soutien sans réserve de l’Allemagne au nettoyage ethnique et au génocide sionistes.
Cependant, l’unité dans l’establishment politique, de l’extrême droite à la gauche, pour soutenir sans réserve cette résolution n’aurait pas été possible sans et la répression et le consentement des fabricants.
Les grands prêtres répressifs de l’antisémitisme
Ces dernières années, prétendant combattre l’antisémitisme, l’Allemagne a implanté une nouvelle caste dans la société allemande appelée Commissaires pour l’Antisémitisme (Antisemitismusbeauftragte), dont les représentants sont maintenant présents dans presque chaque institution publique, dans les administrations publiques, les institutions culturelles, les organisations et les universités.
Ces commissaires sont puissants et savent visiblement infailliblement ce qui est antisémite. Leur tâche principale est donc d’accuser quiconque s’oppose à la position allemande officielle sur ce que les sionistes font de l’antisémitisme, sans fondement et calomnieusement.
Leur jugement a pour effet de détruire des carrières professionnelles et donc les projets de vie d’individus, retirant le financement d’institutions culturelles ou d’organisations de la société civile et créant un climat social répressif et de peur.
Tout ceci montre que le terme ‘Commissaire pour l’Antisémitisme’ est une terme complètement trompeur, parce que ces grands prêtres sont en réalité des ‘commissaires pour sionisme’.
Au lieu de protéger les Juifs en Allemagne, ils défendent le régime sioniste génocidaire colonial de peuplement ; au lieu de soutenir les Juifs quand ils déclarent que le génocide en Palestine n’a pas lieu en leur nom, ils les soumettent à des campagnes de dénigrement et font tout ce qui est en leur pouvoir pour les réduire au silence pour protéger l’État sioniste d’apartheid colonial de peuplement.
Et au lieu de prendre en compte que, dans plus de 80 pour cent des cas de crimes antisémites en Allemagne, les auteurs sont des Allemands de l’extrême droite, ils fantasment sur ce qu’ils appellent « de l’antisémitisme importé », répandent de la propagande pour le génocide et placent toute opinion divergente sous le verdict de l’antisémitisme.
Et, bien sûr, ils ont été des acteurs essentiels d’un processus politique dans lequel la critique légitime d’Israël a été redéfinie comme « antisémitisme en lien avec Israël » que l’Allemagne considère maintenant comme une offense antisémite et qui – comme c’en est l’intention – augmente le nombre de crimes antisémites supposés.
En plus, avec la « Société germano-israélienne » ou le « Conseil Central des Juifs d’Allemagne », associations allemande d’intérêt sioniste justifiant le génocide, ils activent le sentiment antimusulman, anti-arabe et spécialement anti-palestinien afin de discréditer et de criminaliser les migrants venus de Moyen-Orient et ainsi blanchir les crimes des Allemands d’extrême droite.
Et alors, tous ces acteurs pro-sionistes non seulement rejoignent la politique d’extrême droite de l’Allemagne, mais en sont en fait les étriers dans tout le pays.
Consensus fatal en Allemagne
Ni cette répression de toute critique du sionisme et du régime sioniste, ni le climat de peur ne seraient possibles dans l’Allemagne d’aujourd’hui sans la propagande pro-sioniste dans les grands médias allemands qui, au cours des années, a également joué un rôle décisif dans la transformation de l’Allemagne en une société dans laquelle l’opposition à la promotion du génocide par les dirigeants est vue comme une insulte plutôt que comme une vertu démocratique.
L’évolution de l’Allemagne vers un régime autocratique, non démocratique, n’est pas sans rappeler les pires moments du pays. En 2023, d’après Hans Kundnani, le journal allemand Die Zeit a publié un rapport d’enquête choquant fondé sur la fuite d’e-mails du PDG de Springer, Mathias Dopfner. Dans l’un de ces e-mails, Dopfner donne un résumé de ses convictions politiques qui se termine par une phrase extraordinaire et glaçante qui décrit également pertinemment le consensus politique qui a émergé en Allemagne au cours de ces dernières décennies : « Zionism über alles ».
Cette confession d’un Allemand, qui est le personnage le plus puissant du système médiatique européen, est choquante, de même que son « Sionisme avant tout » rappelle fatalement le premier vers de l’hymne national allemand de l’époque nazie : « Deutschland, Deutschland über alles ».
Cette résonance n’est pas une coïncidence. Elle présente plutôt Dopfner comme un défenseur radical d’une idéologie de la suprématie blanche, comme on peut la trouver tout à fait naturellement dans le soi-disant « journal de qualité » de Springer Die Welt ou le tabloïd Bild.
Ces journaux de Springer répandent la haine des Musulmans et des Arabes et ont déshumanisé les Palestiniens pendant les 15 mois du génocide sioniste d’une façon qui rappelle à tout lecteur capable d’utiliser son cerveau les jours les plus sombres de la publication des journaux en Allemagne.
La répression comme le contrôle du débat public par les commissaires pro-sionistes d’Allemagne et leurs alliés et l’agitation raciste de la presse de Springer ont ouvert la voie à la transformation autoritaire de l’Allemagne au nom d’une prétendue lutte contre l’antisémitisme.
Avec l’adoption d’une autre désastreuse résolution pro-sioniste, les députés allemands ont maintenant fait avancer de manière décisive ce processus.
L’Allemagne s’égare.
Jürgen Mackert est professeur de sociologie à l’Université de Potsdam, en Allemagne. Il a été professeur temporaire de structure des sociétés modernes à l’Université d’Erfurt et professeur invité en sociologie politique à l’Université Humboldt de Berlin. Parmi ses ouvrages récents figurent On Social Closure. Theorizing Exclusion, Exploitation, and Elimination (Oxford University Press, 2024) et Siedlerkolonialismus. Grundlagentexte und aktuelle Analysen (coédité avec Ilan Pappé ; Nomos, 2024).