SHIRA KLEIN | SOURCE : JOURNAL OF GENOCIDE RESEARCH10 janvier 20125 Un fossé s’est creusé entre des spécialistes de l’Holocauste au sujet d’Israël/Palestine et il est en train de s’approfondir de façon….
SHIRA KLEIN | SOURCE : JOURNAL OF GENOCIDE RESEARCH
10 janvier 20125
Un fossé s’est creusé entre des spécialistes de l’Holocauste au sujet d’Israël/Palestine et il est en train de s’approfondir de façon incommensurable depuis le 7 octobre 2023. Contrairement à de précédentes controverses dans ce domaine, ce qui divise n’est pas seulement historique ou méthodologique ; c’est autour du rôle des universitaires dans le monde d’aujourd’hui, en particulier sur la position qu’ils choisissent d’avoir sur Palestine/Israël et le sionisme. Deux camps principaux se sont formés. Pour faire court, l’un défend Israël et l’autre les Palestiniens, bien que des différences entre individus dans chaque camp présentent un spectre plutôt qu’une division claire. Comment, malgré une diversité d’idées et de focus dans chaque camp, deux antipodes académico-politiques se sont solidifiées sur plusieurs décennies et comment le 7 octobre et la guerre qui s’en est suivie ont élargi le fossé entre eux ?
À une extrémité du spectre, se trouvent des intellectuels qui ont défendu la politique israélienne. Leur approche repose souvent sur une compréhension de l’Holocauste comme événement exceptionnel, qui fait d’Israël un cas exceptionnel par extension. Dans leur interprétation, les attaques contre Israël constituent la dernière tendance de l’antisémitisme. Depuis le 7 octobre ils ont pris position publiquement en justifiant l’offensive militaire contre les habitants de Gaza. De l’autre côté du spectre se trouvent des intellectuels qui ont critiqué la politique et les pratiques d’Israël pour la souffrance qu’il inflige à des militions de Palestiniens. Pour nombre de ces intellectuels, la position sur Israël renvoie à la perception de l’Holocauste comme un cas de génocide parmi d’autres génocides et à un point de vue concomitant selon lequel Israël, loin d’être exceptionnel, a évolué dans le cadre du colonialisme de peuplement. Depuis le 7 octobre, ces individus ont exploité leur expertise sur le racisme et la violence d’État pour protester contre l’attaque d’Israël contre Gaza. Les mois écoulés depuis le 7 octobre ont aiguisé la division, à la fois en volume, avec les intellectuels qui s’expriment publiquement sur les événements du Moyen Orient plus que jamais auparavant, et en substance, dans la mesure où ils proposent des commentaires sur le génocide, les crimes de guerre, l’antisémitisme et le sionisme. Cet article est centré sur les intellectuels aux États-Unis et en Israël. La façon dont les spécialistes de l’holocauste en Europe abordent le thème Palestine/Israël est à traiter dans des recherches futures.
Pourquoi ce que les spécialistes de l’Holocauste disent sur Israël/Palestine importe-t-il ? pourrait-on se demander. En présence d’allégations de crimes de guerre et de génocide, nombreux sont ceux qui désirent savoir ce que pensent les spécialistes de l’Holocauste. Leur opinion, en tant que personnes ayant consacré leur carrière à étudier les crimes de guerre et le génocide, donne un poids moral et académique à la question de savoir comment caractériser ce qui se produit en Israël/Palestine. Les médias sont après les spécialistes de l’Holocauste pour des tribunes et des interviews, comme le montrent les nombreux exemples ci-dessous. Ils font autorité, en particulier parmi les Juifs ; les Juifs ont un intérêt profond pour l’Holocauste, aussi s’intéressent-ils à ce que les spécialistes de l’Holocauste ont à dire. Comme l’a montré Hasia Diner, « peu de questions ont une place aussi grande ou sont porteuses d’autant de valence dans la représentation de l’identité juive que l’Holocauste ». L’approche de leur catastrophe par les Juifs a atteint un point de « sanctification de l’Holocauste », comme l’a décrit Adi Ophir. « Un autel central a été élevé, des formes de pèlerinage s’établissent et déjà une mince couche de prêtres de l’Holocauste, de gardiens de la flamme, grossit et s’institutionnalise » a-t-il écrit, une déclaration qui sonne aussi vraie aujourd’hui qu’il y a quarante ans. Dans le monde post-7 octobre, la voix des spécialistes de l’Holocauste compte même davantage, si l’on considère la panique parmi de nombreux Juifs pour lesquels « on commence à avoir un sentiment qui rappelle les années 1930 ». Les spécialistes de l’Holocauste, en tant qu’experts sur la violence contre les Juifs, ont donc un mégaphone sur tout ce qui importe aux Juifs. La façon dont ils choisissent d’en user est la question à l’ordre du jour.
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