Ibrahim S.I Rabaia, Université de Birzeit[1] et Lourdes Habash, Université de Birzeit [2]
Introduction
Depuis le 7 octobre 2023, il a eu une escalade dramatique dans la rhétorique israélienne, tant officielle que publique, ciblant les institutions éducatives palestiniennes et les décrivant comme des centres pour éduquer au terrorisme et pour le produire. Les institutions d’enseignement supérieur (IES) palestiniens de Gaza ont été directement ciblées par Israël pendant la guerre, avec pour conséquence la destruction prolongée de 11 des 19 IES de Gaza [3]. Cette destruction a touché 4 des 6 universités principales de Gaza et, à la date du 13 février 2024, plus de 450 universitaires et personnel administratif avaient été tués [4]. Ce nombre inclut trois présidents d’université, sept doyens et 64 professeurs [5]. Le 11 octobre, l’Université islamique a été complètement détruite par l’aviation israélienne. Le siège de l’université Al-Azhar a été bombardé dans la ville de Gaza, ainsi que sa branche d’Al-Megraqa au sud de la ville de Gaza les 11 et 21 octobre. Le 7 décembre, l’université Al-Israa a été détruite et utilisée comme centre d’opération et de détention. Le 16 décembre, deux bâtiments principaux de l’université Al-Aqsa ont été entièrement détruits, et plusieurs autres l’ont été partiellement. De même, plusieurs bâtiments de l’université ouverte d’Al-Quds ont été partiellement détruits, dont la branche de Gaza et la branche Nord [6].
Les attaques sur l’enseignement supérieur gazaoui ont été justifiées, dans les termes du discours israélien, par la lutte contre le terrorisme. Le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahou a évoqué spécifiquement l’éducation dans un discours où il exprimait le désir d’établir à Gaza une nouvelle autorité qui n’« enseignerait pas le terrorisme ». Ce discours [7] est cohérent avec la politique coloniale de longue date qui a gouverné le secteur de l’enseignement supérieur palestinien depuis l’occupation de la Cisjordanie et de Gaza en 1967 [8]. Les autorités israéliennes ont construit une fragilité dans le secteur de l’enseignement supérieur palestinien et ont créé « une éducation dépouillée » [9] dans toutes les composantes de ce secteur. Cela a inclus des attaques physiques bien avant 2023. Depuis 2008, les institutions d’enseignement supérieur de la Bande de Gaza ont été ciblées, avec le bombardement et la destruction des laboratoires centraux de l’Université islamique, justifiés par l’allégation que les laboratoires auraient « été utilisés pour fabriquer et développer des roquettes et que les salles étaient utilisées pour des réunions de la direction du Hamas à Gaza [10] ».
Les provocations contre l’université ont augmenté après qu’Israël a obtenu un siège à l’UNESCO en 2012, quand le ministre israélien des Affaires étrangères a accusé le département d’ingénierie chimique de l’université de soutenir les Brigades Qassam ; l’université a clarifié qu’elle n’avait pas de section ni de spécialisation dans ce domaine spécifique. En 2014, l’université a été bombardée par des avions F-16, sous le prétexte qu’elle « collectait des donations pour le Hamas et formait un centre opérationnel pour les Brigades Qassam au niveau de la réhabilitation, de l’entraînement, du développement et de la production [11] ». Rien qu’en 2014, approximativement 12 institutions d’enseignement supérieur à Gaza ont été ciblées par les forces d’occupation. En 2018, l’université Al-Azhar a été attaquée, causant la destruction de plusieurs de ses collèges.
La situation s’est détériorée drastiquement au cours de la guerre actuelle. En cinq mois, environ 78000 étudiants gazaouis ont été privés de la possibilité de poursuivre leurs études. Le ciblage de l’enseignement supérieur a été délibéré et systématique ; 94 professeurs ont été ciblés et tués par l’occupation israélienne, tandis que des universités bien connues comme Al-Azhar et Al-Islamiah ont été le focus de la destruction. Ces institutions d’enseignement supérieur de premier plan ont été totalement démantelées, sans laisser la moindre trace. Les universités restantes à Gaza ont aussi souffert de lourds dommages, exacerbant l’impact désastreux sur l’enseignement supérieur.
On peut analyser le ciblage systématique de Gaza à travers plusieurs lentilles, dont l’une est le concept de spatio-cide, décrit par Sari Hanafi [12] : le nettoyage de l’espace pour faciliter le transfert « volontaire » du peuple palestinien en ciblant l’espace palestinien. Cet article tente de suivre l’éradication de l’enseignement supérieur dans la Bande de Gaza sous occupation israélienne. Si le nettoyage spatial définit en partie la destruction du secteur de l’éducation dans Gaza, l’article soutient que les pratiques de l’occupation vont au-delà, incluant la création d’une vulnérabilité prolongée, l’élimination des opportunités pour récupérer, et l’élimination du personnel éducatif à la fois par des assassinats ciblés et le déplacement « volontaire ». En conséquence, la structure de l’enseignement supérieur dans la Bande de Gaza est confrontée à un éducide, après des décennies de mise en oeuvre d’un dé-développement et une stratégie d’élimination contre le secteur de l’éducation.
Contexte : Dé-développement de l’ES à Gaza
Le secteur de l’enseignement supérieur de Gaza a connu une croissance importante après l’établissement de l’Autorité palestinienne. En 1994, il y avait sept IES à Gaza, comprenant quatre instituts et trois universités. En 2017, ce nombre avait augmenté jusqu’à 28 institutions : 8 universités et 20 collèges universitaires. Selon des statistiques du ministère de l’Enseignement supérieur, en 2017, environ 80% des 87000 étudiants inscrits dans les IES de Gaza étudiaient à l’université, et les 20% restants étaient inscrits dans des collèges. Le livre de statistiques annuelles publié par le ministère en 2022 [13] a révélé que des 53 IES enregistrées et reconnues en Palestine, 18 étaient situées à Gaza[14]. Cela met en lumière la présence importante et la contribution du secteur de l’enseignement supérieur de Gaza à l’intérieur du paysage de l’enseignement supérieur palestinien.
Depuis 2008, les opérations militaires israéliennes à Gaza ont spécifiquement ciblé ces institutions d’enseignement supérieur, causant une destruction physique substantielle[15]. Dans la guerre israélienne de 2014 contre Gaza, le Conseil économique palestinien pour le développement et la reconstruction (Palestinian Economic Council for Development and Reconstruction, PECDAR) a fait état de pertes importantes dans le secteur de l’enseignement supérieur, estimées à environ 10 millions de dollars. Selon le rapport de PECDAR, trois universités ont subi la forme la plus dure de cette destruction. L’université Al-Azhar a souffert de la destruction complète de trois bâtiments, pour des pertes estimées à 3 millions de dollars. L’Université islamique a subi des dommages dans deux bâtiments, revenant à environ 4 millions de dollars. De plus, le Collège universitaire des sciences appliquées a été confronté à la destruction de salles de classes, de laboratoires scientifiques, de la bibliothèque centrale, du centre informatique, et des générateurs d’électricité, avec des dommages estimés à 2,5 millions de dollars [16]. Quelques estimations ont indiqué que les pertes totales en 2014 étaient de 33 millions de dollars [17]. Ces attaques ciblées sur l’enseignement supérieur ont eu un impact désolant sur l’infrastructure éducative, en entravant le progrès académique et le développement des générations futures à Gaza.
Les opérations israéliennes précédentes et le blocus sur Gaza ont laissé le secteur de l’enseignement supérieur dans un état vulnérable pendant les derniers 17 ans. La combinaison de l’obsolescence de l’infrastructure et de l’équipement, de fournitures électriques limitées, de restrictions sur les transactions financières et de la rareté des ressources a entravé le développement du secteur et a sévèrement limité les efforts de reconstruction après chaque opération israélienne [18]. Le gouvernement israélien a mis en oeuvre un blocus complet et multi-dimensionnel hermétique, qui a eu des effets néfastes sur divers aspects de la vie à Gaza, dont l’éducation. En conséquence, le secteur de l’enseignement supérieur a souffert d’un dé-développement, et a été confronté à de nombreux problèmes et contradictions. Alors que des tentatives locales étaient faites pour construire et améliorer l’infrastructure éducative, les actions israéliennes ont causé une destruction tant physique qu’intangible qui minait ces efforts [19]. Le blocus de 17 ans et le dé-développement résultant ont imposé diverses limitations structurelles sur le secteur de l’enseignement supérieur à Gaza :
Dé-mobilité: Les IES de Gaea ont été contraints de concevoir leurs plans et leurs programmes uniquement sur la base des capacités locales, les interactions avec les partenaires régionaux et internationaux, y compris les universités et les institutions spécialisées, étant limitées et incertaines. L’isolement a entravé la participation de Gaza à des programmes d’échange, puisque les étudiants et le personnel universitaire sont incapables de voyager hors de Gaza, et que le personnel étranger est confronté à des restrictions pour se rendre dans les universités de Gaza. Par conséquent, les capacités et la qualité des IES ont été sapées.
De plus, la connexion entre les IES dans Gaza et leurs analogues en Cisjordanie a été coupée, à cause de cette dé-mobilité. Il vaut la peine de remarquer que la situation dans les IES de Cisjordanie est aussi problématique, caractérisée par des restrictions imposées par Israël sur l’emploi des universitaires étrangers dans les universités, limitant leur travail à cinq ans et imposant un plafond de 100 professeurs et 150 étudiants [20].
Depuis 2000, les autorités israéliennes ont imposé des restrictions strictes sur tout étudiant gazaoui qui souhaite poursuivre son éducation à l’étranger. La plupart des demandes de déplacement ont été rejetées, limitant sévèrement leurs opportunités. En 2015, Israël a introduit des mesures pour « alléger » les restrictions de voyage en accordant 50 permis à des étudiants gazaouis qui voulaient étudier en Cisjordanie. Cependant, ultérieurement, les autorités israéliennes ont gelé cette mesure. Cela a causé une diminution importante du nombre d’étudiants gazaouis en Cisjordanie au cours des années. En 1998, il y avait environ 1000 étudiants poursuivant leurs études en Cisjordanie. Mais leur nombre s’est réduit à quelques dizaines à cause des restrictions de déplacement actuelles [21].
Les impacts de la dé-mobilité étendent les limitations sur le voyage étudiant ; cela affecte l’infrastructure et le matériel éducatif des IES. Importer des articles essentiels, comme de l’équipement de laboratoire et des livres, a été interdit, entravant encore davantage le progrès des activités universitaires. L’Université islamique est un exemple évident, les attaques israéliennes y ayant conduit à la destruction d’environ 74 laboratoires. Des projets de recherche de la Faculté d’ingénierie ont dû être arrêtés à cause de l’impossibilité pour l’université d’importer les articles nécessaires, malgré le besoin urgent de remplacement de l’équipement. De même, depuis 2005, l’université Al-Azhar a été incapable d’importer de nouvelles publications dans les collections de sa bibliothèque, ce qui a limité l’accès des étudiants et des enseignants à des ressources à jour et pertinentes [22].
Ces conditions ont posé des problèmes importants à la communauté de l’enseignement supérieur de Gaza. La guerre de 2014 contre Gaza a souligné les conditions désastreuses auxquelles les étudiants et leurs enseignants sont confrontés, avec des possibilités limitées de s’échapper et des abris inadéquats pour les protéger de situations potentiellement mortelles. Depuis 2007, l’expérience de risques vitaux a été constamment répétée, forçant la communauté de l’enseignement supérieur à faire de la simple survie sa priorité. Pendant la guerre de 2014, l’impact désastreux sur le secteur de l’enseignement supérieur a été indiscutable, environ 407 étudiants et 9 membres du personnel, tant universitaire qu’administratif, ont été tués, et 1128 étudiants ont été blessés [23].
Problèmes financiers : Les capacités financières des familles gazaouies ont diminué de manière significative à cause du blocus et d’un chômage croissant depuis la deuxième intifada en 2000. Les ressources financières des IES de Gaza ont été directement affectées par ces facteurs. Les principales sources financières pour ces institutions sont les droits d’inscription des étudiants et les allocations annuelles du ministère de l’Enseignement supérieur. Mais depuis 2016, ces allocations du ministère ont été abandonnées, exacerbant le problème financier auquel sont confrontées ces institutions.
La disparition des ressources financières a provoqué une diminution importante du nombre d’étudiants inscrits dans les trois universités principales de Gaza : l’université Al-Azhar, l’université Al-Islamiah et le Collège universitaire de sciences appliquées. Le nombre total d’étudiants inscrits dans ces universités a diminué, de 45000 en 2010 à 3000 en 2019. À la suite du déclin des droits d’inscription et de la dette accumulée, plusieurs formations diplômantes et départements ont été fermés [24]. Un important problème financier structurel est apparu dans les IES à cause de la chute notable du taux d’inscription, puisque seulement 20% à 40% des étudiants ont été capables de payer les frais d’études ces dernières années. Une moyenne de 30000 diplômés n’ont pu recevoir leur certificat en janvier 2023 pour des raisons financières [25]. En 2019, la dette moyenne des universités a atteint 30 millions de dollars, et en conséquence le paiement des salaires a été intermittent, en plus du remplacements des salaires par des primes financières instables. Cela a conduit les universités à avoir recours à de l’emploi à temps partiel pour gérer leurs difficultés financières [26].
Les IES à Gaza après le 7 octobre
La destruction massive des IES de Gaza a été suivie d’importantes critiques internationales, y compris dans l’affaire d’allégation de génocide porté par l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice (CIJ). Le 23 janvier 2024, après le bombardement de l’université Al-Israa, les États-Unis ont demandé une explication officielle ce ciblage de l’université. Dans sa réponse, donnée par le chef du personnel de l’armée israélienne, Israël a annoncé une enquête sur l’incident, affirmant que l’enquête préliminaire avait révélé que « le Hamas utilisait l’université et ses alentours pour des opérations terroristes contre l’armée » [27]. Cependant, aucun bilan officiel de cette investigation n’a été publié ensuite [28]. Afkhai Adre, le porte-parole arabe de l’armée israélienne, a affirmé que l’armée israélienne avait « détruit un certain nombre de bâtiments contenant l’infrastructure du Hamas à l’université Al-Azhar [29].
Cependant, selon Omar Al-Hendi, le président du Bureau de direction de l’université, la destruction de l’université n’a pas été un incident isolé, mais un simple élément d’une plus vaste campagne ciblant le secteur de l’enseignement supérieur très longtemps avant la guerre, campagne qui inclut l’assassinat d’universitaires et d’étudiants, l’interdiction de voyager et de recruter des universitaires, des restrictions sur la recherche scientifique, etc [30].
Éducide
La requête de l’Afrique du Sud à la Cour internationale de justice a éclairé l’éducide systématique caractérisé par la pré-détermination d’Israël à cibler et à détruire les IES de Gaza. Cette pratique destructive a mené à la perte des universités et à la mort tragique d’universitaires palestiniens estimés. Le professeur israélien Neve Gordon a exprimé son inquiétude, affirmant que « le monde universitaire a été détruit » à Gaza dans le cadre d’un « éducide ». Gordon a alerté sur le fait qu’il « faudra entre 10 et 20 ans pour récupérer des dommages causés en trois mois » [31]. Dans sa requête à la CIJ, l’Afrique du Sud a détaillé le ciblage systématique de l’enseignement supérieur à Gaza :
« Israël a ciblé chacune des quatre universités de Gaza — y compris l’Université islamique de Gaza, la plus ancienne institution d’enseignement supérieur du territoire, qui a éduqué des générations de médecins et d’ingénieurs, entre autres, en détruisant des campus destinés à l’éducation des futures générations de Palestiniens de Gaza. Au milieu de tant d’autres personnes, Israël a tué des universitaires palestiniens de premier plan, dont : le Professeur Sufian Tayeh, président de l’Université islamique— physicien primé, détenteur de la chaire UNESCO d’astronomie, d’astrophysique et de sciences de l’espace de Palestine — qui est mort avec sa famille lors d’une frappe aérienne ; Dr Ahmed Hamdi Abo Absa, doyen du département d’ingénierie logicielle à l’université de Palestine, qui aurait été abattu par des soldats israéliens alors qu’il s’éloignait après sa libération de trois jours de disparition forcée ; le professeur Muhammad Eid Shabir, professeur d’immunologie et de virologie, ancien président de l’Université islamique de Gaza et le professeur Refaat Alareer, poète et professeur de littérature comparée et d’écriture créative à l’Université islamique de Gaza, qui ont été tous deux tués par Israël avec des membres de leurs familles. Le professeur Alareer était le co-fondateur de ‘We are Not Numbers’ [Nous ne sommes pas des nombres], un projet pour la jeunesse palestinienne qui cherchait à raconter les histoires personnelles derrière ce qui serait sinon des comptes rendus impersonnels sur des Palestiniens en général — et des morts palestiniennes — aux informations [32]. »
Les principes enchevêtrés de dé-développement, de nettoyage spatial et d’éducide brossent une peinture sombre de la guerre cachée contre l’éducation. Au cours des années qui ont suivi 2007, il y a eu une escalade des politiques de nettoyage spatial et de dé-développement qui ont posé les bases de l’attaque d’Israël contre l’éducation à Gaza. Le dé-développement peut être perçu à travers la restriction systématique imposée aux institutions éducatives, qui perturbe l’accès immédiat à l’éducation, et mine le développement à long terme de ce secteur. En empêchant le déplacement des universitaires et en limitant leur capacité à avoir des collaborations universitaires internationales, les forces d’occupation isolent aussi systématiquement le système d’éducation palestinien, entravant sa croissance et son développement.
Le nettoyage spatial inclut la destruction délibérée et le ciblage d’espaces physiques liés à l’enseignement supérieur. Cela veut dire que les bâtiments de l’université, les laboratoires et d’autres établissements essentiels sont intentionnellement démolis, perturbant de manière effective, et démantelant, le secteur de l’enseignement supérieur. Le nettoyage spatial qui inclut aussi le déplacement forcé et l’enlèvement des Palestiniens de leurs maisons, occupe une position cruciale dans le processus de l’éducide. En déracinant les gens de leurs environnements familiers, le nettoyage spatial perturbe le processus éducatif, avec un effet de ricochet sur l’ensemble du système éducatif.
Les étudiants déplacés sont privés d’accès aux universités et leur progrès universitaire est entravé. Le nettoyage spatial éclaire la nature systématique des politiques d’occupation, qui s’étend au-delà des pures actions militaires. L’éradication délibérée de ces espaces vitaux démontre un effort concerté pour étouffer la croissance intellectuelle et éducative de la population palestinienne.
La destruction du système éducatif ne dénie pas seulement aux personnes leur droit à une éducation, mais elle met aussi en péril le capital intellectuel et humain de la société toute entière. Elle étouffe le potentiel et les ambitions du peuple palestinien en éliminant méthodiquement les enseignants et les élèves, étendant ainsi un cycle de contrôle et d’oppression. En se concentrant sur les facultés et les universités, Israël ne fait pas que démanteler physiquement l’infrastructure, il cible aussi l’identité nationale palestinienne et son histoire. Cette destruction intentionnelle dénie aux Palestiniens une éducation satisfaisante, en perpétuant un cycle de privation éducative et de marginalisation et en bloquant leur capacité à construire un avenir plus brillant. Cela entrave le progrès collectif et le développement de la société dans son intégralité.
Conclusion
La progression du nettoyage spatial et du dé-développement vers l’éducide décrit de manière précise les techniques intentionnelles employées pour saper le progrès et le potentiel des humains palestiniens. C’est une stratégie calculée, conçue pour affirmer son contrôle et supprimer tout ce qu’il y a de palestinien en détruisant les espaces où la pensée critique et l’échange des idées fleurissent. Ces trois éléments œuvrent ensemble en tant que stratégie pour démolir systématiquement le secteur de l’enseignement supérieur et pour dénier aux Palestiniens leur droit fondamental à l’éducation. En outre, ils visent à effacer la mémoire collective, l’héritage culturel, la croissance intellectuelle du peuple palestinien. En maintenant un contrôle et en étouffant toute forme de résistance ou d’avancement intellectuel, ils entravent effectivement l’accès palestinien à la connaissance et au développement intellectuel.
Ces mesures prises ensemble sont un coup sérieux au système d’enseignement supérieur de Gaza. La perte des vies et la destruction des universités sont des facteurs de l’éducide. L’éducide a des effets considérables en freinant la croissance et le progrès de la société. L’éducide de Gaza encourage un cercle vicieux d’oppression et de contrôle, et encourage les violations des droits humains : il est nécessaire de reconnaître et de prendre en compte ce phénomène.
Références :
[1] The Department of Political Science, Birzeit University, irabaia@birzeit.edu.
[2] The Director of Ibrahim Abu-Lughod Institute of International Studies, Birzeit University, lhabash@birzeit.edu.
[3] Federation of Arab Scientific Research Councils condemns the Israeli attack and targeting the scientific institutions [La fédération des Conseils de la recherche scientifique arabe condamne l’attaque israélienne et et son ciblage des institutions scientifiques]. WAFA. 22/12/2023. https://www.wafa.ps/Pages/Details/86868
[4] Shms: The Israeli destruction of the schools and universities in Gaza, is systematic de-education policy [La destruction israélienne des écoles et des universités de Gaza est une politique systématique de dé-éducation]. Shams. 07/11/2023 https://www.shams-pal.org/?p=5795 .
[5] An updated list of the names of professors and academics killed by Israel’s genocidal military campaign in Gaza Strip [Une liste à jour des noms des professeurs et universitaires tués par la campagne militaire génocidaire dans la Bande de Gaza]. The official MOHE page on Facebook.
[6] Israel’s demolition of educational institutions, cultural objects in Gaza is additional manifestation of genocide [La démolition des institutionnelles éducatives et des objets culturels de Gaza par Israël est une manifestation additionnelle de génocide]. Euro-mid Human Rights Monitor. 16/02/2024. https://2u.pw/uuP16x0
[7] Ben Gvir calls to kill “The candy distributors” and Netanyahu challenges international pressures to end the war. [Ben Gvir appelle à tuer les « distributeurs de bonbons » et Netanyahou défie la pression internationale à mettre fin à la guerre] Al-Jazeera. 12/11/2023. https://2u.pw/4TDdPRC.
[8] Rahmah Hussein. How Israel Destroyed High Education Sector in Gaza? [Comment Israël a-t-il détruit le secteur de l’enseignement supérieur à Gaza ?] .7ibr. 24/01/2024. https://2u.pw/zI2BVlM
[9] Pour plus d’information sur l’éducation nue en Palestine, voir l’article “Exception of the Exception: Palestinian « Bare » Education under Colonialism in Palestine” [Exception de l’exception : l’éducation « dépouillée » palestinienne sous colonialisme en Palestine] in Omran, volume 9 : 33, été 2020. Cet article démontre les manières par lesquelles la colonisation israélienne a affecté la structure de l’éducation palestinienne dans les Territoires occupés depuis 1967.
[10] Saad Al-Waheidi. The Islamic University of Gaza: A History of Israeli Targeting [L’université islamique de Gaza : une histoire du ciblage israélien]. Al-Jazeera. 03/11/2023. https://2u.pw/zcpz9Gx .
[11] Saad Al-Waheidi. Ibid.
[12] Sari Hanafi. (2009). Spacio-cide: colonial politics, invisibility and rezoning in Palestinian territory [Spacio-cide : politiques coloniales, invisibilité et redécoupage du territoire palestinien]. Contemporary Arab Affairs, 2(1), 106-121.
[13] En 2022, environ 10 IES de Gaza n’étaient pas reconnus par le ministère de l’Enseignement supérieur, certaines étaient des branches d’universités de Cisjordanie, comme l’université ouverte Al-Quds.
[14] Higher Education Statistical yearbook (2021-2022). (Ramallah: MOHE, 2022). P.29.
[15] Rahmah Hussein. How Israel Destroyed High Education Sector in Gaza? [Comment Israël a-t-il détruit le secteur de l’enseignement supérieur de Gaza?]. 7ibr. 24/01/2024. https://2u.pw/zI2BVlM
[16] Pecdar: $22 Million the losses of Public Schools and Universities in Gaza [22 millions de dollars : les pertes des écoles et des universités publiques de Gaza]. Maan News. 02/09/2014. https://www.maannews.net/news/724870.html
[17] Rahmah Hussein. Ibid.
[18] Rahmah Hussein. Ibid.
[19] Mona Jebril (2023) Between construction and destruction: the experience of educationalists at Gaza’s universities [Entre construction et destruction : l’expérience des éducateurs dans les universités de Gaza], Compare: A Journal of Comparative and International Education, 53:6, 986-1004, DOI: https://doi.org/10.1080/03057925.2021.1987190
[20] A Palestinian University Refuses the Israeli Restrictions on employing and registering foreigners in WB [Une université palestinienne refuse les restrictions israéliennes sur l’emploi et l’enregistrement des étrangers en Cisjordanie]. Al-Jazeera. 13/03/2022. https://2u.pw/EJINLSx .
[21] Freedom of Movement Human rights situation in the Occupied Palestinian Territory, including East Jerusalem [Situation des droits humains à la liberté de déplacement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est]. UNHR. (Annual Report). February 2016. .https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Countries/PS/SG_Report_FoM_Feb2016.pdf, P.11.
[22] Situation of the Right of Higher Education in Gaza under Blockade [Situation du droit de l’enseignement supérieur à Gaza sous blocus]. Mezan. (Report) May 2010. https://www.mezan.org/uploads/files/11343.pdf
[23] : Sansom Milton, Ghassan Elkahlout & Sultan Barakat (2023) Protecting higher education from attack in the Gaza Strip [Protéger l’enseignement supérieur de l’attaque sur la Bande de Gaza], Compare: A Journal of Comparative and International Education, 53:6, Pp. 1024-1042. https://doi.org/10.1080/03057925.2021.1987192
[24] Financial crises ravage Gaza universities and warn of imminent collapse [Des crises financières ravagent les universités de Gaza et avertissent d’un effondrement imminent]. Al-Jazeera. 23/07/2019. https://2u.pw/rlgAcol
[25] National Campaign to Demand a Reduction in University Fees [Campagne nationale pour demander une réduction des tarifs universitaires]. https://www.facebook.com/edu.palstine/
[26] Financial crises ravage Gaza universities and warn of imminent collapse. Ibid.
[27] With Photos and Videos: BBC Records the Destruction of Most Gaza’s Universities [Avec des photos et des vidéos : la BBC enregistre la destruction de la plupart des universités de Gaza]. BBC Arabic. 10/03/2024. https://www.bbc.com/arabic/articles/czqz1w49j41o
[28] Emanuel Fabian. IDF says it is probing demolition of campus in Gaza last week, after US voiced ire [Les Forces de défense israéliennes disent qu’elles examinent la démolition du campus de Gaza la semaine dernière après que les USA ont‡ exprimé de la colère]. Time of Israel. 21/01/2024. https://www.mako.co.il/news-military/2024_q1/Article-6528ae7f23c2d81026.htm
[29] Israel: We destroyed Hamas infrastructure at University in Gaza [Israël : Nous avons détruit l’infrastructure du Hamas à l’université dans Gaza]. Sky News Arabia. 08/12/2023. https://2u.pw/E2iroSz.
[30] Al-Israa University Page on Facebook. 24/01/2024. https://www.facebook.com/israaedu
[31] Patrick Jack. Academia in Gaza ‘has been destroyed’ by Israeli ‘educide’ [Le système universitaire de Gaza « a été détruit » par « l’éducide » israélien]. The Times Higher Education. 29/01/2024. https://www.timeshighereducation.com/news/academia-gaza-has-been-destroyed-israeli-educide
[32] Application of the Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide in the Gaza Strip (South Africa v. Israel) [Application de la convention sur la prévention et la punition du crime de génocide dans la Bande de Gaza (Afrique du Sud vs Israël). ICJ. 28/12/2023. https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20231228-app-01-00-en.pdf