Quelques jours après que la Cour suprême ait approuvé l’ordre d’évacuer les résidents de Wadi Hummus, les Forces se déploient à l’aube, dans un mouvement qui, pour les militants concernés, crée un précédent qui peut affecter des milliers de personnes.
Lundi, les forces israéliennes ont commencé à démolir des immeubles dans un quartier de Jérusalem Est sous contrôle de l’Autorité Palestinienne, à la suite de la contestation juridique d’un ordre émis par le ministère de la Défense d’évacuer des appartements jugés trop proches de la barrière de séparation qui traverse la ville.
Des militants israéliens et internationaux ont dit que les forces se sont déployées à l’aube dans le quartier, évacuant une famille de l’un des bâtiments, ainsi que des militants qui manifestaient contre cette action.
Deux heures avant la démolition, les militants disent qu’ils ont vu les Forces de Défense Israéliennes placer des explosifs dans un bâtiment de huit étages en vue de sa démolition. Plus tard, les forces ont déménagé les meubles et les véhicules garés près des immeubles.
Aviv Tatarsky, chercheur pour l’organisation de gauche Ir Amim, a dynamité l’action, disant : « Au nom de la guerre démographique menée contre les résidents de Jérusalem Est, l’État d’Israël refuse d’approuver les projets de construction autorisant ces résidents à construire légalement dans la ville.
« Les résidents qui ne voulaient pas construire sans permis ont cherché une solution créative et obtinrent de l’Autorité Palestinienne des permis de construire dans les zones A et B où Israël n’a aucune autorité concernant les projets de construction. L’insistance d’Israël pour empêcher cette solution est une action très cruelle », a ajouté Tatarsky.
J’ai bâti cette maison pierre à pierre. C’était mon rêve de vivre dans cette maison. Maintenant, je perds tout », a dit Fadi al-Wahash, 37 ans, sa voix se brisant alors qu’un bulldozer détruisait sa maison de trois étages non terminée.
« J’avais un permis de construire de l’Autorité Palestinienne. Je pensais que j’étais dans mon droit », a-t-il dit.
Gilad Erdan, ministre de la Sécurité Publique d’Israël, a dit que 700 policiers et 200 soldats y étaient engagés.
Malgré un ordre du commandant militaire, les résidents d’ici fabriquent leur propre loi, en construisant. Il y a des centaines de structures illégales », a-t-il dit à la Radio de l’Armée d’Israël.
« A mon grand regret, l’administration est insuffisante ici. Mais ce n’est pas simplement le fait qu’il y ait là des centaines de structures – plusieurs dizaines d’entre elles se trouvent presque sur l’itinéraire de la barrière de séparation, mettant en danger les forces de sécurité qui s’y activent. »
Le Premier ministre palestinien Mohammad Shtayyeh a dit que les Palestiniens porteraient plainte devant la Cour Criminelle Internationale à propos des démolitions à Sur Baher.
« Le cabinet condamne cette grave agression. C’est une continuation du déplacement forcé de la population de Jérusalem de ses logements et de ses terres – un crime de guerre et un crime contre l’humanité », a dit Shtayyeh.
En juin, la Haute Cour de Justice d’Israël s’est déclarée en faveur de la démolition de 13 grands immeubles du quartier de Wadi Hummus, situé dans la périphérie de Jérusalem.
Il se trouve au bord du village palestinien de Sur Baher, au sud-ouest de Jérusalem. A la différence du reste du village, ce quartier avoisinant est situé au-delà des frontières municipales de la ville, en Cisjordanie. La majeure partie de la zone qu’il occupe est définie comme faisant partie de la zone A – c’est-à-dire sous le contrôle de l’Autorité Palestinienne.
Les résidents de Sur Baher disent que Wadi Hummus est la seule zone qui reste pour une future expansion du village qui est cerné par la barrière et des quartiers juifs.
Le ministère de la Défense a donné l’ordre de démolir quelque 70 appartements, invoquant des inquiétudes à cause de leur proximité avec la barrière de séparation, dont il dit que cela en fait une menace pour la sécurité. Deux des bâtiments promis à la démolition sur 13 sont habités par environ 17 résidents.
Jamie McGoldrick, coordinateur humanitaire des Nations Unies, et d’autres responsables de l’ONU ont appelé la semaine dernière les autorités israéliennes à arrêter leurs projets de démolition. L’Union Européenne a émis un communiqué qui dit : « La poursuite de cette politique sape la viabilité de la solution à deux Etats et la perspective d’une paix durable. »
Dimanche, le tribunal a rejeté une pétition demandant l’ajournement de la démolition, dont les militants palestiniens concernés disent que cela crée un précédent qui permettra de démolir des milliers d’immeubles en Cisjordanie, annulant en réalité la protection juridique dont jouissent les résidents d’autres zones contrôlées par l’AP.
« Certaines familles mettent tout ce quelles possèdent pour avoir un toit sur leur tête, et tout cela est ruiné devant leurs yeux par ce crime méprisable commis par Israël », a dit à Haaretz l’organisateur de la communauté Hamada Hamada.
« D’importantes forces sont entrées dans le quartier après 14 H., empêchant tout accès aux maisons et repoussant de force les résidents ainsi que des dizaines de militants présents sur place, les évacuant alors qu’on entendait les femmes et les enfants crier par derrière », a ajouté Hamada.
Les responsables palestiniens disent que certaines des structures menacées se trouvent à l’intérieur des zones qu’ils devraient contrôler. L’Organisation de Libération de la Palestine a émis un communiqué accusant le tribunal israélien de chercher à « créer un précédent pour permettre aux forces d’occupation israéliennes de démolir quantité de bâtiments palestiniens situés tout près » de la barrière.
Le bureau du président palestinien Mahmoud Abbas a émis un communiqué qui dit que « Israël porte l’entière responsabilité de cette dangereuse escalade à Sur Baher, qui fait partie de la mise en place du « deal du siècle » dont le but est d’enterrer la question palestinienne ».
Selon le communiqué, Abbas a pris contact avec les responsables internationaux et arabes afin de faire cesser les démolitions.
Le haut fonctionnaire palestinien Saeb Erekat a dit : « Nous ne renoncerons pas à nos terres, et tout ce qui a été démoli sera reconstruit. »
« Cette démolition est une mise en application de la conférence de Bahrein et nous avons déposé des milliers de documents et de pétitions à la Cour Internationale de Justice de La Haye contre Israël », a-t-il dit en faisant référence à la conférence économique de paix de Bahrein, parrainée par les Etats Unis, qui a eu lieu en juin.
Le porte-parole du Hamas, Sami Abu Zuhri, a dit : « La démolition des immeubles de Sur Baher par les autorités d’occupation est un crime méprisable, qui est le résultat direct de la conférence du Bahrein et des relations chaleureuses entre Israël et certaines nations arabes. »
L’armée israélienne n’a fait aucun commentaire immédiat lundi, mais un communiqué la semaine dernière de l’administration civile régie par l’armée d’Israël en Cisjordanie a dit que son exécution se ferait conformément à « des considérations opérationnelles » et « la politique de l’Etat ».
En 2004, la Cour Internationale de Justice de La Haye a émis un avis consultatif comme quoi construire la barrière sur un territoire occupé était « contraire au droit international ».
Israël a renvoyé cette décision non contraignante en tant que fondée sur des motifs politiques et a dit que la barrière jouait un rôle essentiel dans la réduction drastique du nombre d’agressions, qui ont atteint leur pic en 2002 et 2003 au cours du Second Soulèvement palestinien connu sous le nom d’Intifada Al-Aqsa.
La barrière de séparation de Cisjordanie, qui est en construction depuis 2003, devait passer par Sur Baher, mais sa route a été changée suite à une campagne des résidents. C’est ainsi que Wadi Hummus s’est retrouvé du côté israélien de la barrière, alors que, juridiquement, il fait partie de la Cisjordanie et se trouve sous l’autorité de l’AP.
De nombreux immeubles ont été construits dans le voisinage au cours de la dernière décennie ou à peu près, principalement habités par de jeunes couples et des familles du village. Les immeubles prévus à la démolition contiennent environ 100 appartements, dont 20 sont habités par des locataires, le reste étant encore en cours de construction.
Les permis de construire ont été émis par le ministère du Plan de l’AP. Cependant, sept ans plus tôt, le Commandement Central des Forces de Défense israéliennes a émis une injonction interdisant la construction de bâtiments à moins de 250 mètres de la barrière de séparation.
Les habitants locaux ont dit que cet ordre n’a pas été publié et qu’ils n’en avaient pas eu connaissance et que, de toutes façons, c’est l’AP qui détient l’autorisation de planification dans cette zone.
Reuters a contribué à cet article.