La droite fait l’éloge de ce vote comme d’un ‘jour historique pour le mouvement des colonies’ | Cette loi autorise Israël à déclarer les terres privées palestiniennes comme propriété de l’État | L’opposition israélienne met en garde : cette loi conduira Israël à La Haye.
Lundi soir, les législateurs israéliens ont adopté par 60 voix contre 52 un projet de loi controversé qui légaliserait rétroactivement l’expropriation de terres propriétés privées palestiniennes.
Certains craignaient que le vote soit retardé, mais le premier ministre Benjamin Netanyahu a dit lundi dans la journée que tout continuerait comme prévu après qu’il ait fait le point sur ce vote avec la Maison Blanche.
Le député d’extrême droite Bezalel Smotrich s’est félicité du passage de ce projet dans la loi, disant que c’était un « jour historique pour le mouvement des colonies et pour Israël. Aujourd’hui, Israël a décrété que développer la colonisation en Judée Samarie (la Cisjordanie) est dans l’intérêt d’Israël. Nous pouvons maintenant poursuivre l’expansion de la souveraineté d’Israël [sur la Cisjordanie] et continuer à construire et à développer les colonies à travers le pays ».
Le législateur Isaac Herzog, président de l’opposition, a pris la parole à la Knesset avant le vote et a mis en garde comme quoi « il n’était pas trop tard pour arrêter l’horreur de ce train de marchandises. Le train part d’ici et ne s’arrêtera qu’à La Haye », a dit Herzog en référence à la Cour Pénale Internationale.
« Ses voitures vont transporter des condamnations internationales contre Israël et les soldats et les officiers juifs. Et cette condamnation sera signée par le premier ministre d’Israël. »
Le but de ce projet de loi, dit une version révisée, est de « fixer les règles de la colonisation en Judée et Samarie [la Cisjordanie] et de permettre la poursuite de son installation et de son développement ».
Le ministre de l’Education Naftali Bennett s’est félicité de ce vote comme d’une preuve que « la détermination paie », référence à peine voilée aux tensions politiques en coulisses entre lui et Netanyahu. Bennett et son parti Habayit Hayehudi (Maison Juive) ont fait pression pour le vote du projet de loi, tandis que Netanyahu craignait qu’il n’irrite la nouvelle administration de Washington.
« A nos amis de l’opposition qui expriment leur surprise lorsqu’un gouvernement nationaliste adopte un projet de loi au profit de la colonisation : C’est la démocratie. Le conseil des ministres réalise exactement l’objectif pour lequel il a été élu : gouverner », a dit Bennett.
Le vote du projet de loi, qui ouvre la voie à la légalisation des constructions illégales sur les terres palestiniennes dans toute la Cisjordanie, a été reporté il y a environ un mois et demi. Selon la version la plus récente du projet de loi obtenue par Haaretz, dans un premier stade, des mesures d’application de la loi contre 16 colonies et avant-postes seront suspendues pour une période d’un an à dater de la publication de la loi.
En cours d’année, une décision sera prise pour savoir si ces terres peuvent être expropriées.
Ensuite, la ministre de la Justice Ayelet Shaked pourra allonger la liste au moyen d’un arrêté et avec l’approbation du Comité Constitution, droit et Justice de la Knesset. Le procureur général Avichai Mendelbit continue à s’opposer au projet de loi et des personnalités de son entourage soulignaient dimanche qu’il n’a pas l’intention de le soutenir, même dans sa formulation actuelle, au cas où la Haute Cour de Justice enregistrerait des pétitions pour le dénoncer.
Cet après-midi, à l’extérieur de l’assemblée de la Knesset, avant les délibérations sur cette loi, des députés d’opposition ont annoncé qu’ils n’avaient pas l’intention de coopérer avec la coalition et la séance d’avant-vote a été ajournée. Résultat, la longue séance de vote dont on s’attendait à ce qu’elle se prolonge dans la nuit a été considérablement raccourcie et, au lieu d’environ trois heures, on s’attend à ce qu’elle dure moins d’une heure. La décision de l’opposition de retirer ses objections prévues laissait attendre une réduction significative du programme, si bien que le premier ministre Benjamin Netanyahu, attendu cette nuit de retour de Londres, ne sera probablement pas rentré à temps pour voter cette loi à la Knesset.
Haaretz écrivait dimanche que Netanyahu cherchait à remettre cette loi à plus tard, mais lundi il a dit qu’il avait informé la Maison Blanche de son intention de faire voter cette mesure législative et il adit qu’il rentrerait lundi soir du Royaume Uni pour y participer. Pourtant, il n’a pas réussi à arriver à temps pour pouvoir voter.
La première ministre britannique May, de son côté, a mis Netanyahu en garde contre ce vote, disant qu’il était inutile et qu’il rendrait les choses plus difficiles pour les amis d’Israël à l’étranger.
La loi devrait permettre à l’État de déclarer des terres privées palestiniennes, sur lesquelles des colonies ou des avant-postes ont été construits, « en toute bonne foi ou sur ordre de l’Etat » comme propriétés du gouvernement, et dénier à leurs propriétaires le droit d’utiliser ou de posséder ces terres jusqu’à ce qu’il y ait une résolution diplomatique du statut des territoires.
Cette mesure fournit un mécanisme de compensation pour les Palestiniens dont les terres ont été saisies. Un propriétaire peut recevoir un paiement annuel d’utilisation de 125 % de la valeur de la terre, tel que déterminé par un comité d’évaluation, pour des périodes renouvelables de 20 ans, ou une autre parcelle de terre si cela est possible, à lui de choisir.
La mesure a également été revue dimanche pour ajouter 16 colonies et avant-postes à la liste d’endroits envisageables pour y appliquer la loi.
Des ordres de démolition de maisons construites sur une terre revendiquée par des propriétaires palestiniens pourraient être gelés pour un an en attendant de savoir si l’État peut se saisir de la terre.
La suspension des démarches juridiques et administratives pourrait s’appliquer aux propriétés qui se trouvent dans les colonies d’Ofra, Eli, Netiv Ha’avot, Kokhav Hashahar, Mitzpe Kramim, Alon Moreh, Ma’aleh Mikhmash, Shavel Shomron, Kedumim, Psagot, Beit El, Yitzhar, Har Bracha, Modi’in Illit, Nokdim et Kokhav Yaakov.
Cette mesure pourrait aussi autoriser la ministre de la Justice Ayelet Shaked à ajouter d’autres colonies et avant-postes à la liste des zones où on pourrait se saisir des propriétés des Palestiniens, avec l’aval du Comité Constitution, Droit et Justice de la Knesset.