La décision de WOCMES de déplacer une conférence hors de Tunisie pour arranger l’apartheid israélien est orientaliste et contraire à l’éthique

La décision de WOCMES de déplacer une conférence hors de Tunisie pour arranger l’apartheid israélien est orientaliste et contraire à l’éthique

La Campagne Palestinienne pour le Boycott Académique et Culturel d’Israël (PACBI) et la Campagne Tunisienne pour le Boycott Académique et Culturel d’Israël (TACBI), soutenues par l’écrasante majorité des universitaires palestiniens et par la Fédération des Syndicats de professeurs et d’employés d’universités (PFUUPE), protestent énergiquement contre la décision du Congrès mondial des Études Moyen Orientales (WOCMES) de déplacer sa sixième conférence de sa localisation initialement prévue à l’Université de la Manouba en Tunisie du 19 au 23 septembre 2022. La décision de WOCMES d’annuler la conférence de Tunisie et de relancer un nouvel appel pour l’accueillir à une date ultérieure a été prise lorsque cet organisme a réalisé que les universitaires israéliens n’auraient pas de visas pour la Tunisie.

La Tunisie, qui n’a pas de relations diplomatiques avec Israël et qui a été attaquée par l’armée israélienne, a une position ferme et admirable de soutien au peuple palestinien et d’opposition à l’occupation militaire, au colonialisme de peuplement et à l’apartheid du régime israélien. Elle ne s’engage avec Israël à aucun niveau, y compris académique. Par conséquent, le fait de ne pas délivrer de visas à des Israéliens, dont des universitaires, n’est pas une politique discriminatoire, mais plutôt une politique basée sur une position fermement anticoloniale envers un régime d’apartheid. Cette position devrait recevoir le soutien de la part de congrès et d’institutions universitaires supposés défendre la liberté, la justice et l’égalité des droits pour tous et rejeter le colonialisme et l’apartheid.

Comme PACBI l’a déclaré ailleurs, les peuples du monde arabe, avec leurs origines et leurs identités nationales, religieuses et culturelles diverses, sont organiquement liés à la lutte de libération de la Palestine. La Palestine est une cause arabe et pas seulement la cause des Palestiniens. En plus d’une parenté historique avec le peuple palestinien, plusieurs peuples arabes continuent à être confrontés à de graves menaces politiques, économiques et militaires de la part d’Israël. Tant que l’oppression israélienne continue, tout engagement d’Arabes et d’institutions arabes avec des Israéliens (individus ou institutions) qui ne soit pas inscrit dans le cadre d’une pleine reconnaissance de l’intégralité des droits du peuple palestinien et de co-résistance à l’oppression, aboutit à justifier ou à couvrir la normalisation du régime israélien d’oppression. Il est donc impératif que toute relation entre des gens du monde arabe et des Israéliens soit basée sur la co-résistance. Ceci n’est pas un appel à s’abstenir de comprendre les Israéliens, leur société ou leur politique. C’est plutôt un appel à conditionner tout savoir et tout contact aux principes éthiques de résistance conjointe pour le démantèlement des structures du régime israélien de colonialisme de peuplement et d’apartheid.

Il n’est pas inutile de rappeler à WOCMES que de nombreux États, en particulier en Afrique, ont mené la même politique envers l’Afrique du Sud de l’apartheid et ont refusé de s’engager dans quelque relation que ce soit avec ce pays, y compris en ce qui concerne les relations académiques.

Le consensus international va croissant sur le fait qu’Israël pratique l’apartheid et la persécution, qui sont deux crimes contre l’humanité, contre le peuple palestinien. Suivant l’exemple d’organisations et de défenseurs des droits palestiniens, Human Rights Watch->https://www.hrw.org/fr/news/2021/04/27/des-politiques-israeliennes-abusives-constituent-des-crimes-dapartheid-et-de] a récemment publié une analyse juridique accablante du régime israélien contre le peuple palestinien en concluant qu’il relève de la définition internationale de l’apartheid. [B’Tselem, la principale organisation israélienne de défense des droits humains, avait quelques mois plus tôt publié son propre rapport intitulé : Un régime de suprématie juive du Jourdain à la Méditerranée : l’apartheid.

Les universités israéliennes sont profondément complices par la conception, la mise en œuvre, la justification et le blanchiment de ce régime israélien d’oppression et de ses graves violations du droit international. Elles produisent de la recherche, du savoir et les outils techniques qui permettent et justifient le déni permanent des droits des réfugiés palestiniens, une politique illégale de transfert de population, de démolition de maisons, de murs d’apartheid, de massacres aveugles, et du vol de terres, d’eau et de ressources naturelles. Cette politique est conçue pour ancrer et faciliter le nettoyage ethnique systématique des Palestiniens autochtones dans le but de construire et d’étendre un État juif suprématiste

Les institutions académiques d’Israël sont des partenaires actifs et indispensables de ce régime d’oppression coloniale et d’apartheid. Elles ont activement participé au développement de systèmes d’armement et de doctrines militaires, dont les doctrines Dahiya et Hannibal de « force disproportionnée » contre la population civile, qui ont donné corps à la politique interdite de la terre brûlée déployée dans les guerres récentes d’Israël contre le Liban et contre Gaza.

De plus, les universités israéliennes pratiquent une discrimination systématique contre les étudiants « non juifs » pour les inscriptions, l’éligibilité au logement, l’aide financière et imposent des processus restrictifs destinés à exclure systématiquement les étudiants palestiniens de la vie académique.

Pas plus tard que vendredi dernier, Israël a brutalement attaqué des fidèles palestiniens sur l’esplanade de la mosquée Al-Aqsa en blessant plus de 200, ce qui s’ajoute à son attaque perverse contre des familles palestiniennes du quartier de Sheikh Jarrah dans Jérusalem occupée pour les chasser de leurs maisons et les donner à des colons israéliens en violation flagrante du droit humanitaire international. L’université Hébraïque a commis des crimes similaires de déplacements forcés de Palestiniens pour l’extension de ses services depuis 1968 tandis que l’Université de Tel Aviv a été construite sur les ruines du village autochtone de Sheikh Muwannis proche de Jaffa, qui a subi un nettoyage ethnique.

WOCMES ne devrait pas s’impliquer dans la tentative clairement tendancieuse d’ébranler la position légale et politiquement louable de la Tunisie et de ses institutions académiques contre le fait de s’engager avec Israël et ses institutions complices. En déplaçant sa conférence hors de Tunisie, WOCMES « punit » sans états d’âme la Tunisie pour sa position du côté juste de l’histoire contre le colonialisme et l’apartheid. Par ce déplacement, WOCMES va normaliser l’acceptation de l’apartheid israélien dans la « plus pure » tradition des institutions orientalistes et coloniales du passé. Nous appelons les membres de WOCMES et les organisations affiliées à faire pression pour convaincre cette organisation de mettre fin à ce parti pris et de tenir son congrès en Tunisie. C’est la position morale à adopter

Enfin, nous rendons hommage à nos collègues tunisiens de l’Université de Manouba pour leur défense des principes moraux contre le colonialisme en dépit des manœuvres d’intimidation de WOCMES.

TACBI et PACBI