Une université israélienne convoque une étudiante pour « soutien au terrorisme » via une citation de Mahmoud Darwish

Lors d’un événement commémoratif pour la Journée de la Nakba organisé en mai dernier par la section Hadash du campus, Watan Madi a conclu son discours par ces mots de Darwish : ‘Nous n’oublierons pas les martyrs qui ont réalisé l’unité du pays, du peuple et de l’histoire.’

L’université Ben Gourion du Neguev a convoqué lundi Watan Madi, étudiante et militante de gauche, adhérente de la section sur le campus du parti Hadash, pour des mesures disciplinaires à cause d’une citation de Mahmoud Darwish qu’elle a lue lors du rassemblement pour la Journée de la Nakba – l’université déclare que lire l’appel du célèbre poète palestinien à ‘ne pas oublier les martyrs’ constitue un soutien au terrorisme.

Lors de l’événement commémoratif de la Journée de la Nakba organisé en mai dernier par la section Hadash du campus, Madi a conclu son discours avec les mots de Darwish : ‘Nous n’oublierons pas les martyrs qui ont réalisé l’unité du pays, du peuple et de l’histoire’.

La lettre de convocation a été envoyée mercredi à la suite d’une plainte déposée par la section universitaire d’Im Tirtzu, association sioniste de droite, selon laquelle l’étudiante est ‘soupçonnée d’une conduite qui implique une désobéissance, ou un refus d’obéir aux instructions des autorités’.

Lors d’une audience à la Knesset en mai dernier, Madi a dit que la citation qu’elle a produite ne concerne que les ‘martyrs qui sont tombés en 1948 et ont été expulsés de chez eux’. Les mots de Darwish se poursuivent avec le besoin d’insister sur ‘le chemin de la liberté et le chemin de la rébellion, jusqu’à ce que se rencontrent les deux jumeaux éternels : la liberté et la paix’.

En réponse aux déclarations comme quoi ces mots de soutien au terrorisme ont été lus et dits lors du rassemblement, le président de la branche Hadash de l’Université Ben Gourion, Guevara Bader, a dit à ce moment là à ‘Haaretz’ que l’événement était un rassemblement mémoriel et non une manifestation, et que par conséquent seuls des textes de mémoire et d’empathie avec les victimes ont été lus.

L’audience disciplinaire de Madi a amené Bader à traduire le texte complet de Darwish, en remplaçant le mot ‘martyr’ par le mot ‘mort’ : ‘Nous n’oublierons pas le commencement, ni les clés de nos maisons, ni les lampadaires allumés avec notre sang, ni les morts qui ont fertilisé notre terre, notre peuple et notre histoire, ni ceux qui sont nés et ont vécu sur les bas-côtés de la route qui nous conduira à la patrie spirituelle, aussi longtemps que l’esprit de la terre natale continuera de nous inspirer.’

L’université déclare qu’elle fonde ses allégations contre Madi sur les définitions du mot martyr (shahid) dans les dictionnaires d’hébreu en ligne, Milog et Matah. Ces dictionnaires expliquent le concept musulman de sacrifice de sa vie au nom des commandements religieux, et mentionnent aussi comment les Palestiniens utilisent ce terme en faisant référence aux terroristes.

‘Parmi les citoyens du pays et la foule des manifestants, le terme est communément utilisé pour décrire un kamikaze, a fait remarquer l’université dans un appendice à la convocation. ‘Ces mots font partie du soutien et de l’amour pour ceux qui utilisent la violence. Le soutien au terrorisme et à la violence peut aussi se manifester sous la forme d’une citation.’

Selon la convocation, l’université voit le fait d’agiter des drapeaux palestiniens pendant un événement comme un renfort apporté à la déclaration disant que Madi a exprimé un soutien au terrorisme.

Madi a dit à Haaretz qu’Im Tirzu ‘continue de poursuivre les gauchistes sur les campus. Il est difficile de savoir comment on transforme un passage qui se termine par un appel à la liberté et à la paix en un soutien au terrorisme. C’est absurde !’

L’université Ben Gourion a déclaré que ‘le comité décidera si la plainte est justifiée. L’université encourage la liberté d’expression, mais ne tolérera pas de violations de la discipline’.

Après l’événement de la Journée de la Nakba, où des drapeaux palestiniens ont été agités, le ministre des Finances Avigdor Liberman a préconisé une réduction du financement de l’État à l’université Ben Gourion. Liberman a demandé un examen de la conduite de l’université, avec à l’esprit l’intention de réduire son budget.