Le grand rabbin Haïm Korsia, en approuvant sans réserve l’intervention militaire meurtrière menée par le gouvernement d’extrême droite israélien, ne peut qu’alimenter l’antisémitisme, dénoncent plusieurs personnalités civiles juives vivant en France.
«Plus fort que le glaive est mon esprit» : cette inscription gravée sur le fronton de la synagogue de Strasbourg ne semble pas concerner Haïm Korsia, le grand rabbin de France. Réagissant lundi 26 août sur BFM TV à la tentative d’incendie de la synagogue de la Grande-Motte survenue le samedi 24 août, il a ajouté à la condamnation de cet acte des commentaires sur la situation en Israël et à Gaza qui nous ont indigné·es.
Comparant l’attaque criminelle du 7 octobre, au cours de laquelle le Hamas a tué près de 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et enlevé 251 otages, aux crimes de guerre commis par l’armée israélienne depuis onze mois à Gaza, «ce n’est pas du même ordre», a assumé Haïm Korsia, affirmant que «je n’ai absolument pas à rougir de ce qu’Israël fait dans la façon de mener les combats». Plus même, il indique que «tout le monde serait bien content qu’Israël finisse le boulot et qu’on puisse construire une paix enfin au Proche-Orient», comme si la paix pouvait être construite sur un amoncellement de cadavres, comme si la guerre était un travail comme un autre et comme si les Palestiniens – civils comme combattants du Hamas – étaient les incarnations indifférenciées d’une humanité niée et propre à être éliminée. Français juives et juifs, nous ne nous reconnaissons en rien dans sa justification des massacres commis par l’armée israélienne depuis onze mois à Gaza. L’intervention de l’armée israélienne à Gaza a provoqué la mort de plusieurs dizaines de milliers de Palestiniens, en grande majorité des femmes et des enfants. Elle a organisé la destruction systématique des habitations et des infrastructures, n’épargnant ni les écoles ni les hôpitaux, elle a délibérément conduit à affamer et à priver de soins la population, tout en interdisant l’accès du territoire à la presse.
Le grand rabbin fait honte à son titre religieux en témoignant d’un mépris humain et d’une négation de l’autre, propres au racisme et à la mentalité coloniale. En tant que citoyens, qu’êtres humains, que juives et juifs. Associer judaïsme et défense inconditionnelle du gouvernement criminel d’extrême droite israélien est d’autant plus inacceptable que cela ne peut qu’alimenter l’antisémitisme en laissant croire que tout juif serait solidaire et donc complice des crimes contre l’humanité et du génocide en cours à Gaza.
Dignité et sécurité aux deux peuples
L’indispensable lutte contre l’antisémitisme, recrudescent en France et en Europe, ne peut qu’être affaiblie par de telles indignités. En tant que juives et juifs, nous refusons d’être associés à ces propos, comme nous dénonçons les amalgames grossiers entretenus par les instances de représentation du judaïsme en France accusant d’antisémitisme tous ceux qui critiquent la politique du gouvernement israélien. Juives et juifs vivant en France, nous écoutons avec respect et soutenons les courageuses voix juives qui en Israël parlent de paix, condamnent la guerre de Gaza, dénoncent l’occupation, appellent à la reconnaissance des droits nationaux du peuple palestinien et à une solution pacifique qui, seule, apportera la dignité et la sécurité aux deux peuples palestinien et israélien.
Nous affirmons en particulier notre solidarité avec B’Tselem (Centre israélien d’information pour les droits de l’homme dans les Territoires occupés), Breaking the silence (regroupant des anciens soldats), Standing together (militant pour un avenir commun entre les deux peuples), les Refuzniks (jeunes Israéliens refusant d’aller combattre à Gaza ou dans les Territoires occupés) et toutes celles et ceux qui s’opposent aux actes criminels menés par Nétanyahou et ses ministres, comme Meir Baruchin, enseignant de philosophie et d’éducation civique dans un lycée de Tel-Aviv, inculpé pour «troubles à l’ordre public» et «intention de trahir l’Etat d’Israël» après la publication, en octobre 2023, sur Facebook, de deux courts textes dénonçant la mort de civils palestiniens, tués dans des frappes de l’armée israélienne sur la bande de Gaza.
Signataires : Isabelle Avran Journaliste Simone Bitton Cinéaste Alain Lipietz Economiste, ancien député européen Rony Brauman Ex-président de Médecins sans frontières (MSF) Alain Champaux Professeur agrégé Nicole Lapierre Socio-anthropologue Georges Yoram Federmann Psychiatre gymnopédiste Dominique Glaymann Professeur émérite en sociologie Véronique Hayem Pilitante pour la paix Pierre Khalfa Economiste, Fondation Copernic Danièle Lochak Universitaire Véronique Nahoum-Grappe Chercheure en sciences sociales Claude Szatan Militant associatif Dominique Vidal Journaliste et historien Michèle Zémor Ex-conseillère région Ile-de-France, vice-présidente agglomération Plaine commune Agnès Zissmann Militante associative.