Déclaration des institutions culturelles allemandes sur la résolution parlementaire du Bundestag concernant le mouvement BDS.
En tant que représentantes et représentants d’institutions culturelles et scientifiques publiques, nous sommes unis par une mission d’état, celle de promouvoir l’art et la culture, la recherche historique et l’éducation démocratique, et de les rendre accessibles à la communauté. Pour cela nous dépendons d’une sphère publique qui, sur la base normative de l’ordre constitutionnel, permet des débats combatifs et controversés. Nous payons une attention particulière aux voix marginalisées et ignorées, qui soutiennent la diversité culturelle et les perspectives critiques. Notre combat commun contre l’antisémitisme, le racisme, l’extrémisme de droite et toute forme de fondamentalisme religieux avec une propension à la violence est au centre de notre initiative.
Aujourd’hui, un enjeu spécifique est de notre responsabilité : transmettre les particularités du passé allemand à nos partenaires du monde entier pour construire un présent et un avenir communs. Un passé, qui est marqué d’une part par le génocide sans exemple des juifs et juives européens et d’autre part par un hésitant travail de mémoire sur l’histoire coloniale allemande. Cela requiert un engagement actif envers la multiplicité des positions juives et une ouverture à d’autres visions sociales apportées par le monde non-européen.
Il n’est pas productif, il est même nuisible, pour la sphère publique démocratique que des voix importantes, locales et internationales, doivent être exclues d’un dialogue critique, comme cela s’est produit dans les débats autour d’Achille Mbembe. La responsabilité historique de l’Allemagne ne permet pas, moralement et politiquement, d’en arriver à délégitimer en bloc d’autres expériences historiques de violence et d’oppression. La confrontation et l’échange doivent justement être possibles dans les lieux de culture et de discours publiquement patronnés. Dans ce contexte, l’application de la résolution BDS du Parlement nous cause une grande inquiétude. Parce que nous considérons l’échange culturel et scientifique comme fondamental, nous rejetons le boycott d’Israël par BDS. En même temps nous considérons comme dangereuse la logique anti-boycott que la résolution BDS du Parlement a déclenchée. Par le recours à cette résolution des voix importantes seront mises à l’écart et des positions critiques représentées de manière biaisée, à travers des applications dévoyées d’accusations d’antisémitisme.
Pour cette raison nous nous sommes rassemblés dans l’« initiative GG 5.3 Ouverture au monde » pour unir nos compétences et nos forces afin de nous engager dans la défense d’un climat de polyphonie, de réflexion critique et de reconnaissance de la différence. Le nom de l’initiative renvoie à l’article 5, paragraphe 3, de la loi fondamentale [de l’Allemagne], dans lequel est garantie la liberté de l’art et de la science. L’ouverture au monde, comme nous la comprenons, met en avant une esthétique politique de la différence qui comprend l’altérité comme une qualité démocratique et l’art et l’éducation comme les espaces dans lesquels on doit tolérer l’ambivalence et autoriser les positions divergentes. Elle implique aussi de garantir des espaces libres à la multiplicité des voix et d’ouvrir à la critique sa propre position privilégiée en tant que norme implicite.
Nous défendons une société ouverte qui se bat pour l’égalité de tous les êtres humains avec les moyens de l’état de droit et du discours public et autorise la différence d’opinions et les solidarités multiples. C’est le fondement qui permet aux artistes et aux scientifiques de continuer à exercer leur fonction spécifique : celle de la réflexion critique des ordres sociaux et de l’ouverture à des visions alternatives pour notre monde.
Groupe de travail
• Berliner Festspiele, Thomas Oberender (administrateur)
• Berliner Künstlerprogramm des DAAD, Silvia Fehrmann (directrice)
• Bündnis Internationaler Produktionshäuser:
• FFT Düsseldorf (Forum Freies Theater ), Kathrin Tiedemann (directrice artistique et générale)
• HAU Hebbel am Ufer / Berlin, Annemie Vanackere (administratrice)
• HELLERAU – Europäisches Zentrum der Künste / Dresden, Carena Schlewitt (administratrice)
• Kampnagel / Hamburg, Amelie Deuflhard (administratrice)
• Künstlerhaus Mousonturm / Frankfurt am Main, Matthias Pees (administrateur)
• PACT Zollverein / Essen, Stefan Hilterhaus (administrateur)
• tanzhaus nrw / Düsseldorf, Bettina Masuch (administratrice)
• Deutsches Theater Berlin, Ulrich Khuon (administrateur)
• Einstein Forum Potsdam, Susan Neiman (directrice)
• Goethe-Institut, Johannes Ebert (secrétaire générale)
• Haus der Kulturen der Welt, Bernd Scherer (administrateur)
• Jüdisches Museum Hohenems, Hanno Loewy (directeur)
• Kulturstiftung des Bundes, Hortensia Völckers (directrice artistique)
• Moses Mendelssohn Zentrum für Europäisch-Jüdische Studien, Miriam Rürup (directrice)
• Museum am Rothenbaum – Kulturen und Künste der Welt (MARKK), Barbara Plankensteiner (directrice)
• Stiftung Humboldt Forum im Berliner Schloss, Hartmut Dorgerloh (administrateur général)
• Wissenschaftskolleg zu Berlin, Barbara Stollberg-Rilinger (rectrice)
• Zentrum für Antisemitismusforschung, TU Berlin, Stefanie Schüler-Springorum (directrice)
Autres signataires
• Deutscher Bühnenverein, Carsten Brosda (président)
• DOK Leipzig, Christoph Terhechte (directeur artistique et général)
• Düsseldorfer Schauspielhaus, Wilfried Schulz (administrateur général et administrateur du festival « Theater der Welt 2021 »)
• Forum Transregionale Studien, Andreas Eckert (président du directoire)
• Münchner Kammerspiele, Barbara Mundel (administratrice)
• Nationaltheater Mannheim, Christian Holtzhauer (administrateur des spectacles)
• Schauspiel Köln, Stefan Bachmann (administrateur)
• Staatsschauspiel Dresden, Joachim Klement (administrateur)
• Theater Krefeld-Mönchengladbach, Michael Grosse (administrateur général)
• Thalia Theater, Joachim Lux (administrateur du Thalia Theater et président du
Deutschen Zentrums des Internationalen Theaterinstituts (ITI))
• Völkerkunde Museen in Leipzig, Dresden und Herrnhut,
Léontine Meijer-van Mensch (directrice)
• Württembergischer Kunstverein, Hans D. Christ und Iris Dressler (directeurs)
Le groupe de travail remercie pour leurs conseils techniques et leur contribution à la discussion
• Aleida Assmann (professeure émérite d’anglais et de littérature)
• Stephan Detjen (journaliste)
• Emily Dische-Becker (journaliste)
• Anselm Franke (curateur)
• Andreas Görgen
• Wolf Iro (manager culturel et auteur)
• Wolfgang Kaleck
• Christoph Möllers (professeur de droit public et de philosophie du droit)
• Michael Wildt (professeur d’histoire allemande du XXe siècle, spécialiste du national-socialisme)
Contact :
SteinbrennerMüller Kommunikation
weltoffenheit[at]steinbrennermueller.de