Lettre de l’AURDIP à la Présidente de l’Université de New York

Les 11 et 12 décembre, des étudiants et des enseignants de NYU ont manifesté pacifiquement en soutien à la Palestine. La police est intervenue à la demande de l’administration, a procédé à des arrestations, et trois enseignants ont été déclarés « persona non grata » (sic) sur le campus, sanction inédite, arbitraire et scandaleuse.

Madame la Présidente,

Nous avons appris que des membres du corps enseignant de la NYU ont été arrêté·es dans le cadre de leur soutien à des étudiant·es qui manifestaient pacifiquement leur soutien à la Palestine sur le campus, et que trois d’entre eux au moins avaient été déclaré·es “personae non gratae” sans procédure régulière, sans aucune raison explicite et, selon les informations disponibles, sans notification appropriée.

L’AURDIP, Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine, soutient la position de l’AAUP selon laquelle les membres du corps enseignant s’exprimant par écrit ou oralement en tant que citoyen·nes ne devraient pas subir de censure ou de mesures disciplinaires institutionnelles. Nous souhaitons aussi souligner que de telles pratiques vont jusqu’à mettre en question le statut d’université de la NYU. Les universités sont des lieux d’apprentissage mutuel où l’enseignement et la recherche se déroulent dans une atmosphère intellectuelle libre de toute coercition, où les professeurs et les étudiants apprennent de façon réciproque. Ce ne sont pas des bâtiments, quelle que soit l’abondance de leurs équipements et de leurs installations. Ce ne sont pas des écoles militaires, où l’obéissance et la conformité font partie de la formation. Ce ne sont pas des États, les professeurs ne sont pas les envoyés de puissances étrangères qui pourraient être déclarés personae non gratae au moindre caprice. Dwight Eisenhower, qui était alors président de l’université Columbia, commença un discours en employant pour s’adresser au corps enseignant le terme d’“employés de l’université” et fut interrompu par Isidore Rabi, qui déclara “Monsieur le Président, nous ne sommes pas les employés de l’université. Nous sommes l’université.”

Il aurait dû, bien sûr, ajouter les étudiants. La tradition séculaire qui rassemble enseignants et étudiants dans la liberté est encore vivante dans le monde entier, et les tentatives faites par la NYU de mêler la police à des débats internes et de traiter le corps enseignant comme des envoyés d’une puissance étrangère la couperont de la communauté universitaire internationale.

Recevez, Madame, mes respectueux hommages

Ivar Ekeland

Président de l’AURDIP

Ancien Président de l’Université Paris-Dauphine

Traduction SM pour l’AURDIP