Exclusif : Philippe Sands KC[1] dit qu’un avis consultatif sera néanmoins considéré comme un « énoncé de droit faisant autorité ».
Le Royaume Uni devrait cesser d’armer Israël afin de respecter l’avis consultatif historique de la plus haute cour de l’ONU selon lequel les États ne devraient pas « apporter aide ni assistance » à l’occupation des territoires palestiniens, a dit un avocat qui représente la Palestine.
Par un avis important et accablant publié ce mois-ci , la cour internationale de justice (CIJ) a établi que la politique israélienne des colonies et l’occupation des territoires contrevenaient au droit international . Elle a aussi dit que les États membres de l’ONU étaient dans l’obligation de ne pas reconnaître l’occupation comme légale et de ne pas l’encourager.
Le Royaume Uni étant déjà sous pression au sujet des ventes d’armes à Israël dans son offensive sur Gaza lancée en réponse aux attaques du 7 octobre et qui ont tué au moins 40 000 Palestiniens, le professeur Philippe Sands KC, membre de l’équipe légale de Palestine devant la CIJ, a dit que l’avis de la cour avait d’importantes répercussions pour le Royaume Uni.
« L’enjeu le plus immédiat est l’obligation faite par l’avis consultatif aux États, dont le Royaume Uni, de ne pas aider ni assister le maintien de la situation actuelle dans les territoires occupés de Cisjordanie, dont Jérusalem (Est) », a dit Sands.
« Cette obligation légale exclut les ventes de matériel militaire qui pourrait être utilisé directement ou indirectement à aider Israël à maintenir son occupation illégale des Territoires Palestiniens occupés ».
Le secrétaire aux affaires étrangères, David Lammy, a dit que des fonctionnaires sont, selon ses instructions, engagés dans une « révision exhaustive du respect par Israël du droit international humanitaire » et il a signalé qu’il envisage d’interdire les ventes de certaines armes à ce pays.
Sands a dit que la décision de la CIJ, en tant qu’avis consultatif demandé par l’assemblée générale des Nations Unies, n’était pas directement contraignant vis-à-vis du Royaume Uni ou d’autres États membres individuellement, mais qu’elle serait « reconnue comme un énoncé de droit faisant autorité, que l’ONU et ses agence spécialisées suivraient comme une loi ».
Sands, qui est professeur de droit à University College de Londres et professeur invité à la faculté de droit d’Harvard, a dit que la décision affectait aussi la légalité des importations en provenance des colonies israéliennes vers le Royaume Uni et d’autres pays.
« Tout ce qui est produit dans les territoires occupés, comme l’alimentaire, ou qui est vendu par internet, est en principe sujet à une interdiction internationale, si l’on peut dire que cela aide ou assiste le maintien de l’occupation illégale » a-t-il dit.
Sands a dit que de telles décisions de la CIJ étaient d’ordinaire suivies d’un vote deux ou trois mois plus tard à l’assemblée générale de l’ONU sur l’opportunité de leur adoption et que la position du Royaume Uni serait instructive. Le Royaume Uni a déjà voté contre une recommandation de la CIJ et a ensuite présenté un avis juridique de 43 pages s’y opposant .
« Comment le Royaume Uni va-t-il voter sur cet (avis) ? a dit Sands. Votera-t-il contre ou va-t-il s’abstenir ? Si le gouvernement est fidèle à ses propos sur le respect du droit international, étant donné la nature et les détails de l’avis consultatif de la CIJ, on s’attendrait au moins à ce qu’il ne vote pas contre. Ce pourrait être un premier écueil dans les relations avec les États-Unis, qui vont presque certainement voter contre, même si le juge états-unien a fait partie d’une large majorité ».
Parmi les arguments qu’il a avancés pendant la session de la CIJ en février, Sands a mentionné le droit des Palestiniens à l’autodétermination. Dans son avis consultatif, la cour s’est référée à « la réalisation du droit du peuple palestinien à l’autodétermination, incluant son droit à un État indépendant et souverain ».
Tandis que le Labour s’est engagé à reconnaître un État palestinien, il n’a pas établi de calendrier et a dit que ce serait « une contribution à un processus de paix renouvelé qui aboutira à la solution de deux États ».
Sands a dit : “Au final, la reconnaissance d’un État est une question politique, non une obligation juridique, donc c’est un élément facultatif. Les juges de la CIJ ont néanmoins clairement déclaré que l’autodétermination signifie que le peuple palestinien « a le droit à un État indépendant et souverain ». 150 États environ (sur près de 200) ont reconnu la Palestine en tant qu’État ; le Royaume Uni fait partie d’un petit groupe en diminution qui refuse de le faire ».
Après l’avis consultatif de la CIJ, le bureau du Royaume Uni pour les affaires étrangères, le Commonwealth et le Développement a dit le 19 juillet qu’il « examinait sérieusement la question avant de répondre » et qu’il « respectait l’indépendance de la CIJ ».
[1] KC pour King’s Councel est un titre honorifique donné à des juristes particulièrement éminents