Le chef de l’UNRWA admet que des employés accusés par Israël ont été évincés sans preuve

Philippe Lazzarini dit que le licenciement immédiat de neuf employés était une « inversion de la procédure normale » après qu’Israël a prétendu qu’ils avaient aidé l’attaque du Hamas

Le chef de l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens a dit qu’il avait mené une « inversion de la procédure normale » en congédiant neuf membres du personnel accusés par Israël  d’être impliqués dans les attaques du Hamas le 7 octobre.

Philippe Lazzarini, commissaire général de l’UNRWA, a dit qu’il n’avait pas enquêté sur ce qu’Israël avait déclaré contre les employés avant de les licencier et de lancer une investigation.

Lors d’une conférence de presse à Jérusalem, il a été demandé à Lazzarini s’il avait examiné s’il y avait une preuve contre les employés et il a répondu : « Non, l’enquête est en cours maintenant ».

Il a décrit la décision prise comme « une inversion de la procédure normale » et a ajouté : « J’aurais pu les suspendre mais je les ai licenciés. Et maintenant il y a une enquête et si l’enquête nous dit que l’accusation était fausse, dans ce cas, à l’ONU nous prendrons une décision sur la manière de (les) dédommager correctement.

Lazzarini a dit qu’il avait pris une décision exceptionnelle et rapide » de mettre fin aux contrats des membres du personnel à cause de la nature explosive des affirmations. Il a ajouté que l’agence subissait déjà « des attaques féroces et laides » au moment où elle fournit de l’aide à près de 2 millions de Palestiniens dans la bande de Gaza .

« Bien sûr, j’ai licencié sans la procédure normale parce que j’ai senti à ce moment-là que non seulement la réputation mais aussi la capacité de l’ensemble de l’agence à continuer à opérer et à apporter une assistance humanitaire critique était en jeu si je ne prenais pas une telle décision » a-t-il dit.

« Mon jugement, fondé sur le fait que cette affaire devienne publique, vraie ou non, était que je devais prendre la décision la plus rapide et la plus audacieuse pour montrer que l’agence prenait cette allégation au sérieux ».

Israël a prétendu que pas moins de 10% du personnel soutient le Hamas et veut que l’organisation soit démantelée. Il a accusé une dizaine des 13000 employés de Gaza d’avoir pris part aux attaques du Hamas le 7 octobre qui ont tué 1200 personnes en Israël.

Un diplomate du ministère israélien des affaires étrangères a parlé à Lazzarini des allégations du 18 janvier et 9 des 12 employés de l’UNRWA ont été licenciés (deux autres étaient déjà morts). Les allégations ont poussé Le Royaume Uni, les États Unis et 14 autres pays  à geler environ 350 millions £ (409,8 million €) de financement destiné à l’agence.

Lazzarini a dit que le représentant israélien lui avait dit les noms des employés accusés et les accusations portées contre eux. Il a dit que le représentant lisait cela dans un « gros dossier » mais l’agence n’en a pas eu copie. Il a dit qu’il avait vérifié les noms sur une base de données du personnel avant de prendre la décision de les licencier.

« J’ai vu que cette personne avait dans cette pièce un gros dossier émanant de leurs propres services de renseignement ; il le lisait et me traduisait » a-t-il dit.

« Il y avait de lourdes allégations, avec des noms et à chacun était associée l’activité qu’il avait eue ce jour-là ».

Mais il a dit qu’Israël n’avait pas exprimé de préoccupation sur ces individus quand leurs noms avaient été présentés pour vérification avec ceux des 30 000 employés de l’UNRWA qui travaillent avec les réfugiés palestiniens à Gaza, en Cisjordanie, en Jordanie, au Liban et en Syrie.

« Jeudi, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a défendu la décision de licenciement des employés tant qu’une enquête n’était pas aboutie, invoquant la « crédibilité » de l’information venue d’Israël et il a jouté : « Nous ne pouvions pas prendre le risque de ne pas agir immédiatement étant donné que les accusations étaient liées à des activités criminelles ».

Le Bureau des services de l’ONU de contrôle interne mène l’enquête sur les allégations et doit rendre un rapport préliminaire dans quelques semaines. Un examen indépendant est conduit séparément sur les procédures de gestion du risque de l’agence par l’ancienne ministre française des affaires étrangères, Catherine Colonna.

Lazzarini a dit que l’agence agissait dans un environnement « hostile » et qu’elle avait été confrontée à de nouvelles « restrictions » depuis que les allégations d’Israël ont été rendues publiques.

Il a dit qu’un compte de l’UNRWA dans une banque israélienne avait été gelé et que l’agence avait été avertie que ses avantages fiscaux seraient annulés. Lazzarini a ajouté qu’une cargaison d’aide alimentaire de la Turquie contenant de la farine, des pois chiches, du riz, du sucre et de l’huile de cuisine destinée à soutenir 1,1 million de personnes pendant un mois était bloquée au port israélien d’Ashdod.

Il a déclaré que l’entrepreneur avait dit que les autorités israéliennes avaient donné instruction à sa société pour que le bateau ne bouge pas et de ne pas accepter de paiement d’une banque palestinienne.