« Nous dénonçons l’insupportable silence, voire complicité de nos politiques, et plus largement de la communauté internationale. » Plus de 4000 artistes de la scène française, travailleurs et travailleuses de l’art, unissent leurs voix pour exprimer leur solidarité envers le peuple palestinien. Ils et elles appellent à la mobilisation collective pour le cessez-le-feu, et à « mettre un frein à la politique coloniale de l’État israélien ».
Nous, artistes de la scène française, travailleurs et travailleuses de l’art, unissons nos voix pour exprimer notre solidarité et notre soutien au peuple palestinien.
Nous faisons appel à vous aujourd’hui Madame Rima Abdul-Malak, ministre de la culture, et vous directeurs et directrices d’institutions artistiques. Nous portons à votre attention notre profonde inquiétude face aux événements se déroulant actuellement dans la bande de Gaza et en Cisjordanie.
Contrairement à ce qui a été affirmé par le président de la République, tous les Français et Françaises ne se tiennent pas à ses côtés pour soutenir le régime colonial d’extrême-droite israélien qui, par son non-respect du droit international a mené à cette tragédie. Il s’inscrit d’ailleurs dans la succession des gouvernements israéliens qui ont bafoué eux-aussi le plan de partition convenu par l’ONU en 1947 comme les multiples résolutions adoptées par l’ONU depuis 1967.
C’est pour cette raison, et parce que nous refusons l’injonction selon laquelle le sionisme est une idéologie soutenue par l’intégralité de la communauté juive, et le Hamas représente l’intégralité de la communauté Palestinienne, que nous publions aujourd’hui cette tribune. Nous affirmons notre droit de remettre en question les actes commis par un gouvernement dont les dérives constituent des violations du droit international.
Nous rejetons l’association dangereuse qui tend injustement à mettre en opposition les civils israéliens et palestiniens, et appelons à combattre d’un élan commun l’antisémitisme sous toutes ses formes, tout autant que la haine envers les Palestiniens et Palestiniennes dont les conséquences dramatiques se lisent aujourd’hui dans les bombardements extrêmes que subissent les habitants de la bande de Gaza.
Si nous sommes choqués et émus face à la violence qu’ont subi les civils israéliens le 7 octobre, c’est avec solidarité que nous nous dressons ensemble et avec les Palestiniens contre toute politique de vengeance qui risquerait, comme l’ont signalé de nombreux universitaires et experts des Nations unies, de se révéler génocidaire, et que nous demandons que soient correctement contextualisés les évènements du 7 octobre.
Nous dénonçons la politique du deux-poids deux mesures à l’encontre d’un peuple occupé – le peuple palestinien – et d’un État occupant – Israël, un déséquilibre des rapports de force
que le gouvernement et la plupart des médias français omettent de rappeler. Nous dénonçons les nombreuses violations du droit international commises par Israël, dont la politique d’expansion est ouvertement colonialiste et militarisée.
On ne peut prétendre souhaiter la paix, lorsqu’un État prive un peuple de son droit à l’auto-détermination et le soumet à une occupation militaire brutale, une colonisation et un régime d’apartheid illégaux, comme cela a été documenté par de nombreuses organisations des droits humains et experts de l’ONU.
Nous parlons d’un État qui commet des expulsions forcées illégales de dizaines de milliers de Palestiniens et Palestiniennes, niant leur droit au retour garanti par le droit international et leur imposant de vivre dans des camps de réfugiés dans leur propre pays, au profit de colons souvent venus des États-Unis ou d’Europe.
Un État qui emprisonne des enfants de manière arbitraire et indéfinie, sous prétexte de « détentions administratives » (plus de 50 000 depuis 1967 selon l’association France-Palestine, avec 200 à 300 nouveaux emprisonnements de mineurs par mois).
Un État qui bombarde de manière indiscriminée des civils, y compris des enfants et dont les dirigeants appellent à rayer de la carte des villages palestiniens.
Un État qui prive depuis dix-sept ans 1 million d’enfants des ressources les plus basiques. Un État qui commet le crime d’apartheid (selon Amnesty International), en dépouillant les Palestiniens et les Palestiniennes de leurs droits, en raison de leur origine ethnique.
Un État qui a récemment admis être allé jusqu’à stériliser ses populations originaires d’Éthiopie durant les années 1980 en leur imposant la prise de Dépo-Provera.
Alors que nos médias et institutions évoquent le « droit d’Israël à se défendre », ils ne mentionnent que rarement le blocus que l’État israélien inflige depuis maintenant dix-sept ans aux habitants de Gaza, en dépit des multiples condamnations de l’ONU, ainsi que l’occupation militaire à l’origine du conflit actuel. Tout pays se doit de respecter le droit international. C’est avec lassitude que nous constatons les exceptions répétées concédées à l’état israélien, qui a enfreint le droit international des centaines de fois depuis 1948 — et ce sans aucune sanction.
C’est avec force que nous dénonçons l’amalgame criminel qui choisit de ne pas dissocier les civils palestiniens du Hamas (organisation classée terroriste par l’UE). Nous dénonçons également les discours qui prétendent que le problème de coexistence est lié à la religion musulmane et à l’islamisme : le traitement indécent dont souffrent les Chrétiens de Palestine nous montre que le problème qu’a l’État d’Israël avec ce peuple est lié au colonialisme et non à un conflit religieux.
Nous dénonçons avec colère et indignation la colonisation agressive que subit la Palestine en toute impunité, avec la complicité de notre gouvernement. Nous condamnons le déluge de bombes sur le territoire sans issue qu’est devenu Gaza.
Nous souhaitons dénoncer l’idée-même d’une empathie sélective, à la carte, qui voudrait hiérarchiser la valeur de la vie entre les individus en fonction de leur origine ethnique. Nous dénonçons l’insupportable silence, voire complicité de nos politiques, et plus largement de la communauté internationale.
Nous appelons à la responsabilisation de nos hommes et femmes politiques face à ces injustices, et appelons plus particulièrement les institutions, organismes et personnalités du monde des arts qui ont accueilli au sein de leurs espaces l’expression de trajectoires et vécus diasporiques, à utiliser leurs structures et plateformes comme des lieux de discussion et de réelle remise en question des injustices auxquelles nous assistons.
Nous, artistes, auteurs et autrices, travailleurs et travailleuses de l’art, appelons à une mobilisation collective pour soutenir l’effort de solidarité envers la Palestine occupée : d’abord, il est urgent que soit prononcé un cessez-le-feu. Nous demandons la réouverture des passages vers Gaza, et la reprise du réapprovisionnement en eau, nourriture, fuel, électricité internet, soins et médicaments, ainsi que la levée du blocus de Gaza (illégal selon le droit international).
Ensuite, il est indispensable de mettre un frein à la politique coloniale de l’État israélien, et de rendre justice au peuple palestinien, déchu de ses droits depuis trop longtemps. Il n’y a qu’en exigeant de l’État d’Israël qu’il respecte le droit international et les droits fondamentaux des Palestiniens et Palestiniennes que nous avons une chance que cette situation s’apaise. Cela ne doit pas se faire par une expulsion des habitants de Gaza mais simplement par le respect de leur droit au retour – pourtant affirmé par le droit international. Les Palestiniens et Palestiniennes veulent et doivent pouvoir rentrer chez eux.
*Texte modifié le 6 novembre 2023: clarifications juridiques sur les plans de partition de 1947 et les résolutions de l’ONU de 1967.
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Signataires (Une sélection de 2000 signataires sur 4231 à la date du 7 novembre 12 :00)