[Cela est vraiment remarquable !
Comme l’a récemment écrit un fan de Lorde : Oh Lorde !
Le journal le plus diffusé de Nouvelle-Zélande ne défend pas seulement, dans l’éditorial ci-dessous, la décision de Lorde de tenir compte des demandes de fans et de militants BDS et d’annuler son concert à Tel-Aviv. Il défend aussi le droit de choisir la stratégie pacifique du BDS pour mettre fin à l’occupation et aux violations du droit international d’Israël. Il compare également le BDS pour les droits des Palestiniens au mouvement mondial de boycott qui soutint la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud.
Il accuse le régime israélien de reprendre certains des arguments anti-BDS les plus utilisés par la propagande du régime d’apartheid d’Afrique du Sud.
Phan Nguyen fut sans doute le premier, à ma connaissance, à faire des recherches et à exposer avec brio les différents aspects du plagiat de cette propagande dans un article sur Mondoweiss (je vous le recommande vivement).
Yousef Munayyer, directeur de la Campagne US pour les Droits des Palestiniens, a aussi écrit un bel article sur l’annulation de Lorde. Vous pouvez le lire ici.
Parmi tous les commentaires positifs concernant le refus de Lorde d’être complice du blanchiment par l’art des crimes violents israéliens contre le peuple palestinien, on ne peut qu’être d’accord avec la conclusion de Yuval Ben-Ami, un auteur israélien qui a écrit un livre sur Lorde. Il déclara à Newsweek :
“Plusieurs autres grands artistes ont annulé leurs concerts, [mais Lorde] est la première de sa génération, et cela est significatif. Je suis un grand fan de Lorde, mais je suis encore plus fan de l’égalité. Aussi longtemps qu’il y aura des gens ici qui vivront sans droit, ce sera la bonne décision à prendre, et si le mouvement BDS fait des émules ailleurs où les droits humains sont en question, alors c’est une bonne nouvelle.”
Je vous souhaite à tous une heureuse nouvelle année, plus juste et en paix !
Omar Barghouti]
L’éditorial du New Zealand Herald – Lorde était peut-être jeune quand elle a commencé à monter les hautes marches de la musique pop, et elle l’est encore, mais comme ses chansons le montrent, elle pense. Il serait injuste de suggérer qu’elle aurait « cédé aux pressions », comme le dit la Fédération sioniste de Nouvelle-Zélande, en annulant son concert en Israël.
Il est possible qu’aujourd’hui elle aimerait que Tel-Aviv n’ait jamais figuré dans sa tournée mondiale de l’année prochaine mais, comme cela a été le cas, elle n’aurait pas pu échapper aux critiques. Le chemin le plus simple pour elle aurait été d’ignorer les critiques et de maintenir son programme. Elle aurait pu insister sur le fait qu’elle n’était qu’une artiste naïve, ne connaissant pas la politique et les affaires internationales. Ces critiques, limitées aux réseaux sociaux, n’auraient duré qu’un jour ou deux.
Mais en réfléchissant aux problèmes et en décidant de retirer le concert de son itinéraire, elle s’est exposée à des attaques bien plus importantes et à des insinuations désagréables de la part de certains partisans d’Israël.
La Fédération sioniste l’accusa de succomber aux pressions « de ceux qui veulent voir Israël détruit » et ajouta « Si Lorde annule son concert de Tel-Aviv pour des raisons politiques, nous pouvons donc imaginer qu’elle annoncera bientôt l’annulation de ses concerts en Russie à cause de l’occupation russe de la Crimée, de son soutien au régime de Bashar al-Assad en Syrie et autres violations des droits humains. Si elle ne le fait pas ça sentirait le sectarisme et la discrimination contre l’État Juif ».
Foutaises. Il est parfaitement possible de s’opposer aux colonies juives en Cisjordanie, et de nombreux Juifs le font, en Israël et ailleurs, sans être coupable de sectarisme et de discrimination.
L’idée qu’Israël ne devrait pas être isolé alors que des pays comme la Russie sont coupables du même genre de choses est un argument que les Néo-zélandais ont souvent entendu de la part des Sud-Africains à la période de l’apartheid. C’est l’argument le plus faible que les partisans d’un pays peuvent donner. Cela revient à dire que ce pays est coupable, et que les autres aussi. Cela revient à admettre que les colonies israéliennes sont une faute. Même le gouvernement israélien ne les cautionne pas, bien qu’il fasse très peu pour les arrêter. Plus les colonies avancent et plus elles sont ancrées dans le territoire, plus une solution à deux États sera difficile.
Le boycott sportif et culturel, les campagnes de désinvestissement d’entreprises et les sanctions internationales contre Israël sont un moyen de rappeler à l’opinion publique que le monde a besoin qu’Israël s’efforce de parvenir à la paix dans la région.
Il est certain que pour obtenir la paix, un État palestinien sur la rive Ouest du Jourdain est nécessaire — un État qui reconnaisse le droit d’Israël à exister. L’alternative pour Israël serait de survivre dans un état de siège permanent, une perspective que peut-être trop d’Israéliens trouvent maintenant préférable à un État palestinien en qui ils n’auraient pas confiance. D’où les colonies.
Mais les tensions permanentes aux Moyen-Orient ne sont pas uniquement le problème d’Israël. De telles tensions s’imposent au monde par des guerres, par des menaces sur l’approvisionnement de pétrole, par des ambitions nucléaires et par le terrorisme.
Il n’est pas possible d’imaginer une paix sans que les Palestiniens ne soient traités équitablement et alors qu’ils sont chassés de chez eux par des bulldozers. Des personnalités culturelles comme Lorde ont le privilège de pouvoir transmettre ce message et la Nouvelle-Zélande peut être fière qu’elle l’ait fait.