Ariel Kaminer | The New York Times | 7 février 2014 | Une législation visant à limiter les protestations d’organisations universitaires à l’encontre Israël a été brusquement retirée de l’examen….
Ariel Kaminer | The New York Times | 7 février 2014 |
Une législation visant à limiter les protestations d’organisations universitaires à l’encontre Israël a été brusquement retirée de l’examen de l’Assemblée de l’État de New York après un tollé montant d’organisations d’éducateurs et d’organisations juridiques dénonçant cette proposition de loi comme étant une agression frontale contre la liberté universitaire.
Alors que la proposition de loi était passée au Sénat de l’État la semaine dernière, cette législation, initiée par le président de l’Assemblée de l’État de New York, Sheldon Silver, devait être soumise au vote de l’Assemblée lundi. Mais une élue de l’Assemblée, Mme Deborah J. Glick, co-dépositaire de la proposition de loi et présidente de la Commission de l’Enseignement supérieur, a dit qu’elle la retirait de l’examen de la Commission parce qu’elle sentait qu’il « nous fallait y réfléchir plus longuement ».
Faisant l’éloge des vertus d’une éducation mondiale « non limitée par des frontières », la proposition veut interdire aux facultés d’accorder des aides d’État à des organisations qui lancent des boycotts contre d’autres pays. Mais pas contre n’importe quels pays : les dispositions de la proposition évoquent seulement ceux « qui accueillent des institutions d’enseignement supérieur agréées par le conseil d’administration de l’université de l’État de New York ».
De ces pays, il y en a quatre : le Liban, la République tchèque et la Hongrie, aucun de ceux-ci sont actuellement la cible de boycotts universitaires importants. Et Israël, contre lequel deux organisations de professeurs ont voté des boycotts qui ont aussitôt suscité des débats internationaux.
Selon la législation proposée, si une faculté dirige des fonds d’État pour des activités de telles organisations – en payant des cotisations annuelles par exemple, ou en couvrant des frais de transports vers une convention –, cette faculté perd tout aide de l’État pendant une année entière.
Maria LaHood, avocate chevronnée du Centre pour les droits constitutionnels, a qualifié la législation proposée « d’indigne et d’inconstitutionnelle ».
Et d’ajouter, « les boycotts politiques, comme les résolutions qui les soutiennent, sont sans contestation possible protégés par le Cinquième Amendement, et l’État ne peut refuser un financement afin de leur interdire de s’exprimer. »
Les boycotts contre Israël par l’Association des études américaines (ASA) et l’Association des études asiatiques et américaines (AAAS) sont des protestations contre la politique du pays envers les Palestiniens. De nombreux responsables de l’enseignement ont condamné ces protestations comme des agressions contre la liberté universitaire. Mais certains de ces mêmes responsables, et un certain nombre d’organisations de professeurs, ont condamné la législation anti-boycott comme une agression bien plus grande encore.
Porte-parole de l’université de New York, John Beckman a publié une déclaration disant, « L’université de New York ne doit pas croire que le remède à un vote mal conçu contre les universités et les institutions universitaires israéliennes doit être, pour le gouvernement, de refuser des fonds de façon à ce que ce soit elles qui apparaissent comme contrevenant au principe de la liberté universitaire ».
L’avocat général de la Cité universitaire de New York, Frederick P. Shaffer, a prévenu dans une déclaration que cette législation « créerait un dangereux précédent d’ingérence du législatif dans les décisions des institutions de l’enseignement supérieur sur les questions universitaires. »
L’université de l’État de New York a condamné la proposition de loi, comme l’ont fait un groupe de plusieurs dizaines de professeurs de l’université Columbia, la National Lawyers Guild (NLG – Association nationale des avocats), l’Association américaine des professeurs d’université, le Syndicat pour les libertés individuelles de New York, différentes organisations juives et palestiniennes, et des Syndicats représentant le corps enseignant de la SUNY (Université de l’État de New York) et la CUNY (Cité universitaire de New York).
Les montants concernés ne devraient pas être importants. L’adhésion institutionnelle pour un an à l’ASA revient à 170 dollars (environ 125 €), une somme qui pourrait probablement être augmentée sans avoir recours à l’usage des finances de l’État. En condamnant la législation, la CUNY l’a écartée comme « grandement inefficace ».
Michael Whyland, attaché de presse du président Silver de l’Assemblée de New York, a déclaré qu’après clarification des pénalités qu’envisage la proposition, Mr Silver la réintroduirait. « Le cœur de la question est que ces dépenses vont être considérées comme non remboursables » a-t-il dit. « Nous n’avons pas l’intention de retirer leurs financements aux universités. C’est ce que certaines critiques ont affirmé. Ce n’est pas l’intention. Fondamentalement, c’est plus une position contre les associations qui participent à ce genre de boycotts. »
L’élue, Mme Glick, en disant que « l’argument autour de la liberté universitaire était grave », a exprimé l’espoir que certaines modifications pourraient déboucher sur une proposition qui « répondrait aux préoccupations des deux côtés ».
Mme LaHood, du Centre pour les droits constitutionnels a rejeté cette perspective. « Cette proposition n’est pas améliorable », a-t-elle déclaré. « Les New-Yorkais n’accepteront aucune atteinte à notre liberté d’expression ». Si la loi suivait son chemin, dit-elle, son groupe comptait remettre en cause sa légalité.