« Je veux que notre maison ait des murs ». Un enfant palestinien et sa famille déplacés à Khan Younis

Mohammad se tient devant la tente qu’il partage avec neuf membres de sa famille dans un camp pour Palestiniens déplacés à Khan Younis. (Photo : Mohammad Abu Rukbeh / DCIP)

Ramallah, le 17 novembre 2023 – « Tout ce que je demande, c’est que la guerre s’arrête et que nous puissions retourner dans nos maisons, si elles sont encore debout. »

Mohammad Walid Mohammad Obaid a 10 ans et, jusqu’au 7 octobre, il vivait dans le camp de réfugiés d’Al-Shati, à l’ouest de la ville de Gaza, avec sa mère et ses sœurs : Lin, 13 ans, et Rim, quatre ans. Le père de Mohammad vit et travaille aux Émirats Arabes Unis.

« Je ne sais pas si notre maison est encore debout, parce qu’elle est près de l’Hôpital Al-Shifa »a dit Mohammad à DCIP. Les forces israéliennes ont assiégé l’Hôpital Al-Shifa dans la ville de Gaza, encerclant l’enceinte de l’hôpital et attaquant les patients à coup d’obus d’artillerie et de balles réelles. « J’ai appris par les nouvelles que des tanks israéliens avaient fait irruption dans la zone et nous ne savons pas ce qu’est devenue notre maison. »

« Je veux que notre maison ait des murs. Peu m’importe vraiment qu’il n’y ait plus de portes ni de fenêtres. Nous pourrons vivre sans elles », a dit Mohammad. « L’important, c’est que la maison soit debout à sa place. »

Maintenant, Mohammad et sa famille vivent sous une tente dans un centre de formation professionnelle géré par l’UNRWA à Khan Younis au sud de la Bande de Gaza, où il partage une tente avec neuf membres de sa famille. Ils partagent quatre couvertures et matelas et cuisinent sur feu de bois.

« Cet endroit est surpeuplé, et les tentes sont côte à côte », a dit Mohammad à DCIP. « Nous n’avons pas de cuisinière, ni d’ustensiles de cuisine, ni de farine. Il y a des toilettes, mais elles sont dégoûtantes et pas propres. Se laver est presque impossible. Si vous pouvez trouver de l’eau, il n’y a pas d’endroit où se doucher, sans parler de l’eau qui est très froide. Il n’y a pas de chauffage dans les tentes, et l’hiver arrive et il fait si froid la nuit. Cela s’ajoute aux mouches et aux insectes, et aux bruits des déplacés et des bombardements israéliens sur Khan Younis et des drones israéliens qui bourdonnent dans le ciel. »

L’intérieur de la tente que Mohammad partage avec sa famille. Dix personnes se partagent quatre matelas et couvertures. (Photo : Mohammad Abu Rukbeh / DCIP)

On estime à 1.5 million les personnes déplacées en interne à Gaza et environ 813.000 d’entre elles se retrouvent dans 154 abris gérés par l’UNRWA, d’après l’0CHA de l’ONU.

Chaque abri est occupé bien au-delà de sa capacité prévue et le surpeuplement contribue à la diffusion des infections respiratoires, des diarrhées, de la varicelle et de la gale.

Avant de partir à Khan Younis, Mohammad et sa famille ont d’abord trouvé refuge dans la maison des ses grands parents dans la ville de Gaza. Mais alors que les forces israéliennes intensifiaient leurs frappes aériennes et les bombardements dans tout le nord de Gaza, ils ont décidé de partir vers le sud.

« Nous avons appris par les gens et par les tracts lancés depuis les avions israéliens que nous devions nous diriger vers les zones de Wadi Gaza vers le sud », a dit Mohammad. « Mon oncle nous a dit qu’un de ses amis avait un grand entrepôt près du camp de réfugiés de Al-Nuseirat et que nous pouvions nous y rendre parce que cette zone était déclarée sure par l’armée israélienne. Alors je suis monté dans une voiture avec mes sœurs, ma mère, mon oncle, sa femme et deux enfants, mes grands-parents et mon autre oncle. Nous étions 12 dans une voiture prévue pour cinq passagers. Nous avions pris aussi quelques vêtements et affaires personnelles. »

« Nous sommes restés dans l’entrepôt qui avait un WC. Nous pouvions préparer nos repas dans l’entrepôt, alors qu’aller à la boulangerie et acheter une miche de pain était presque impossible tant la file était longue, aussi nous préparions la pâte dans l’entrepôt, puis la mettions dans un four en argile » ; a dit Mohammad à DCIP. « Les conditions de vie étaient difficiles, surtout la nuit parce que l’entrepôt est près de la zone d’al-Mughraqa, dans laquelle les forces israéliennes sont entrées, et que des ceintures de feu étaient créées par les avions de guerre, en plus des tirs intenses d’artillerie dans cette zone. »

« L’entrepôt est près de la Mosquée Moath bin Jabal, dont j’ai appris qu’elle avait été frappée par un missile tiré d’un drone israélien pour l’avertir qu’elle serait bombardée plus tard par les avions de guerre israéliens », a ajouté Mohammad.

Nous n’avions pas d’autre choix que de quitter l’entrepôt et aller dans un endroit plus sûr afin de pouvoir au moins dormir la nuit. Nous avons essayé d’aller dans les écoles de l’UNRWA, mais elles étaient déjà surpeuplées et les conditions de vie y étaient extrêmement rudes et insupportables », a dit Mohammad. « Environ quinze jours plus tard, nous avons appris qu’ l’UNRWA ouvrait une zone industrielle à l’ouest de Khan Younis et y installait des tentes pour recevoir les déplacés ; nous avons alors quitté l’entrepôt et nous sommes dirigés vers la zone industrielle à Khan Younis. »

Il n’y a pas d’endroit sûr dans la Bande de Gaza pour les enfants palestiniens alors que les forces israéliennes continuent de bombarder les zones résidentielles à la fois dans le nord et dans le sud de Gaza et que les troupes au sol israéliennes mènent des opérations militaires.

« Tous les ans, il y a la guerre et la mort », a dit Mohammad. « Nous sommes des enfants et nous voulons vivre en paix et dans le calme. Le monde entier est assis là et nous regarde mourir et personne ne fait rien. »