GAZA: la famine ou les balles — ce n’est pas une réponse humanitaire

Oxfam et plus de 170 autres ONG opérant à Gaza appellent à une action immédiate pour mettre fin au plan israélien meurtrier de distribution humanitaire à Gaza (dont la prétendue « Fondation humanitaire pour Gaza »), revenir aux mécanismes de la coordination existante gérée par les Nations Unies et lever le blocus du gouvernement israélien sur l’aide humanitaire et les provisions commerciales. Les 400 points de distribution d’aide humanitaire opérant pendant le cessez-le-feu temporaire dans tout Gaza ont été maintenant remplacés par seulement quatre sites de distribution contrôlés par l’armée, forçant deux millions de personnes à aller vers des zones surpeuplées, militarisées, où elles sont confrontées chaque jour, en essayant d’atteindre la nourriture, à des tirs qui font des victimes en masse et où elles se voient refuser d’autres fournitures vitales.

Publié : 30 juin 2025

DECLARATION COMMUNE

Aujourd’hui, les Palestiniens de Gaza sont confrontés à un choix impossible : mourir de faim ou risquer d’être touchés par une balle en essayant désespérément d’atteindre des aliments pour nourrir leurs familles. Les semaines qui ont suivi le lancement du plan de distribution israélien ont été parmi les plus meurtrières et les plus violentes depuis octobre 2023.

En moins de quatre semaines, plus de 500 Palestiniens ont été tués et presque 4000 blessés simplement en essayant d’accéder à des aliments ou de les distribuer. Les forces israéliennes et des groupes armés — certains opéreraient avec le soutien des autorités israéliennes — ouvrent maintenant régulièrement le feu contre des civils désespérés qui risquent tout, rien que pour survivre.

Le système humanitaire est délibérément et systématiquement démantelé par le blocus du gouvernement d’Israël et ses restrictions, un blocus maintenant utilisé pour justifier la fermeture de presque toutes les autres opérations d’aide en faveur d’une alternative meurtrière, contrôlée par l’armée, qui ne protège pas les civils et ne satisfait pas leurs besoins fondamentaux. Ces mesures sont conçues pour maintenir un cycle de désespoir, de danger et de mort. Des acteurs expérimentés de l’humanitaire restent prêts à livrer de l’assistance vitale à la bonne échelle. Pourtant, plus de 100 jours après que les autorités israéliennes ont réimposé un blocus presque total sur l’aide humanitaire et les produits commerciaux, les conditions humanitaires à Gaza s’effondrent plus rapidement qu’à aucun moment dans les derniers 20 mois.

Selon le nouveau plan du gouvernement israélien, des civils affamés et affaiblis sont forcés de marcher pendant des heures sur un terrain dangereux et à travers des zones de conflit actif, pour être seulement confrontés à une course violente et chaotique afin d’atteindre des sites de distribution barricadés et militarisés avec un unique point d’entrée. Là, des milliers de personnes sont lâchées dans des enceintes chaotiques et doivent lutter pour des provisions alimentaires limitées. Ces zones sont devenus des sites de massacres répétés, dans un manque de respect flagrant pour le droit humanitaire international. Des enfants orphelins et des soignants figurent parmi les morts, des enfants étant blessés dans plus de la moitié des attaques contre des civils dans ces sites. Avec le système de santé de Gaza en ruines, beaucoup de ceux qui sont blessés sont laissés seuls, saignant à mort, hors de portée des ambulances et se voient dénier des soins médicaux vitaux.

Dans les conditions de faim sévères, proches de la famine, beaucoup de familles nous disent qu’elles sont maintenant trop faibles pour rivaliser avec d’autres pour des rations alimentaires. Ceux qui réussissent à obtenir de la nourriture reviennent souvent avec seulement quelques articles de base — presque impossibles à préparer sans eau potable ou combustible pour cuisiner. Le combustible est presque épuisé, mettant à l’arrêt des services vitaux critiques — comme des boulangeries, des systèmes d’eau potable, des ambulances et des hôpitaux. Des familles s’abritent sous des feuilles de plastique, faisant fonctionner des cuisines de fortune au milieu des décombres, sans combustible, ni eau potable, ni sanitaires, ni électricité.

Cela n’est pas une réponse humanitaire.

Concentrer plus de deux millions de personnes dans des zones de plus en plus confinées pour une chance de nourrir leurs familles n’est pas un plan destiné à sauver des vies. Pendant 20 mois, plus de deux millions de personnes ont été soumises à un bombardement sans relâche, à l’utilisation de la nourriture, de l’eau et d’autres aides comme des armes, à des déplacements forcés répétés et à une déshumanisation systématique — tout cela sous le regard de la communauté internationale. L’Association Sphere qui met en place les standards minimum pour une aide humanitaire de qualité, a alerté sur le fait que l’approche de la « Fondation humanitaire pour Gaza » ne respecte pas les standards et les principes humanitaires clés.

Cette normalisation de la souffrance ne doit pas être autorisée à continuer. Les États doivent rejeter le choix factice entre les distributions meurtrières de nourriture, controlées par l’armée, et le déni total de l’aide. Les États doivent respecter leurs obligations selon le droit humanitaire international et les lois sur les droits humains, qui interdisent les déplacements forcés, les attaques sans discrimination et l’obstruction à l’aide humanitaire. Les États doivent garantir que des comptes soient rendus pour les violations graves du droit international.

Nous, les organisations sous-signées, appelons une fois de plus les États tiers à :

  • prendre des mesures concrètes pour mettre fin au siège étouffant et respecter le droit des civils de Gaza à accéder à l’aide humanitaire en toute sécurité et à recevoir une protection.
  • exhorter les donateurs à ne pas subventionner les plans d’aide militarisés, ni ceux qui violent le droit international, ne satisfont pas aux principes humanitaires, aggravent les dommages et risquent d’être complices d’atrocités.
  • soutenir la restauration d’un mécanisme unifié, organisé par les Nations Unies — fondé sur le droit humanitaire international et incluant l’UNRWA, la société civile palestinienne et la communauté humanitaire plus largement — pour satisfaire aux besoins des personnes.

Nous réitérons nos appels urgents à un cessez-le-feu immédiat et durable, à la libération de tous les otages et de tous les prisonniers détenus arbitrairement, à un plein accès à une aide humanitaire à la bonne échelle et à la fin de l’impunité généralisée qui favorise ces atrocités et dénie aux Palestiniens leur dignité de base.

Les signataires incluent :

1.     American Friends Service Committee

2.     Amnesty International

3.     Anera 

4.     Bisan Center for Research and Development 

5.     Fund for Global Human Rights

6.     Islamic Relief Worldwide

7.     Kvinna till Kvinna Foundation

8.     Médecins du Monde

9.     Médecins Sans Frontières

10. MedGlobal 

11. Medical Aid for Palestinians 

12. Mennonite Central Committee 

13. Middle East Children’s Alliance

14. Norwegian People’s Aid

15. Norwegian Refugee Council 

16. Oxfam International 

17. Pax Christi International 

18. Saferworld  

19. Save the Children

20. Terres des Hommes Italia

21. War Child 

Notes

  • La liste complète des signataires peut être vérifiée ici 
  • Le 15 juin, l’hôpital de campagne de la Croix-Rouge à Al Mawasi a reçu au moins 170 patients blessés en essayant d’atteindre un site de distribution alimentaire. Le jour suivant, le 16 juin, plus de 200 patients sont arrivés au même établissement — le nombre le plus élevé enregistré dans un seul incident avec des victimes en masse à Gaza. Dans ce nombre, 28 Palestiniens ont été déclarés morts. Un responsable de l’OMS a souligné ce schéma meurtrier : « Les récentes initiatives de distribution alimentaire par des acteurs non rattachés aux Nations-Unies ont chaque fois pour conséquence des incidents faisant des victimes en masse ».
  • Ces morts s’ajoutent au nombre total de victimes : depuis octobre 2023, plus de 56000 Palestiniens ont été tués à Gaza, dont au moins 17000 enfants.