La position du directoire du fabricant de crèmes glacées risque de raviver les tensions avec sa maison-mère, Unilever
Le directoire de Ben & Jerry’s a appelé à un cessez-le feu permanent à Gaza, prenant une position qui risque de raviver les tensions avec sa maison-mère, Unilever, à propos de la position du fabricant de crèmes glacées sur la politique israélienne.
« La paix est une valeur centrale de Ben & Jerry’s » a dit au Financial Times, Aburadha Mittal, le président du directoire de la compagnie. « De l’Irak à l’Ukraine, (la compagnie) a constamment défendu ces principes. Aujourd’hui il n’en va pas autrement quand nous appelons à la paix et à un cessez-le feu immédiat et permanent ».
Cette décision intervient à la suite d’un conflit de longue date entre le directoire de Ben & Jerry’s et Unilever au sujet de la tentative de la marque de crèmes glacées, en 2021, d’arrêter de vendre ses produits dans les territoires palestiniens occupés.
Pour empêcher cette mesure, Unilever a vendu la branche israélienne à une licence locale. Ben & Jerry’s a répondu en poursuivant Unilever en justice, créant une situation rare de poursuite judiciaire d’une compagnie par sa propre filiale.
Unilever, qui possède aussi des marques allant des savons Dove et des produits de nettoyage Cif aux glaces Magnum et à Marmite, a dit en décembre 2022 que l’action en justice était réglée. L’entreprise israélienne appartient maintenant au titulaire local de la licence, Avi Zinger.
Après avoir consulté les dirigeants et actionnaires de Ben & Jerry’s, Mittal a dit que le directoire était convaincu que sa position sur le cessez-le feu était « cohérente avec l’histoire et les valeurs de la compagnie ».
L’indépendance du directoire de Ben & Jerry’s a été inscrite dans l’acquisition de la compagnie par Unilever en 2000.
Israël a déclaré la guerre au Hamas après l’invasion du pays le 7 octobre par ses combattants qui ont tué 1 200 personnes et pris en outre 240 otages selon les officiels israéliens. Le bombardement israélien de représailles a tué plus de 24 000 personnes, selon les officiels palestiniens, et a déplacé 1,9 millions des 2,3 millions d’habitants de l’enclave, faisant de la majorité du territoire un espace inhabitable.
Ben & Jerry’s est une des rares entreprises à avoir pris position publiquement sur la guerre Israël/Hamas ou à avoir soutenu la demande de cessez-le feu permanent. Plusieurs entreprises qui ont fait des commentaires publics ont eu à faire face à des réactions des consommateurs.
« Il est stupéfiant que des millions de gens manifestent dans le monde mais que les grosses entreprises aient gardé le silence » a dit Mittal à propos de la réaction au conflit.
Starbucks a été visé par un boycott de ses cafés après qu’un syndicat représentant certains de ses employés, Starbucks Workers United, a posté « Solidarité avec la Palestine » sur X (ex twitter) en octobre dernier.
Le directeur exécutif de la chaîne, Laxman Narasimhan, a écrit une lettre au personnel en décembre dans laquelle il dit que les protestataires ont été « influencés par une déformation sur les réseaux sociaux de ce que nous défendons ».
Nelson Peltz, membre du directoire et investisseur militant d’Unilever a démissionné le mois dernier de la présidence de l’organisation juive de défense des droits humains, le Centre Simon Wiesenthal, après qu’elle a appelé au boycott de Ben & Jerry’s et l’avoir préalablement traité d’« antisémite » à cause de sa tentative d’arrêter ses ventes en Cisjordanie occupée.
Le directoire de Ben & Jerry’s a déclaré avoir pris la décision d’appeler à un cessez-le feu, indépendamment d’Unilever, soulignant son statut de filiale autonome du conglomérat de biens de consommation et disant que le directoire de la marque de crèmes glacées détenait « la responsabilité première de sa mission sociale et de l’intégrité essentielle de la marque ».
Unilever n’a pas répondu dans l’immédiat à une demande de commentaire.
Rapport complémentaire de James Shotter à Jérusalem