Comment un travailleur humanitaire a perturbé la routine d’apartheid d’Israël

Mercredi après-midi, le tribunal du district de Be’er Sheva a condamné Mohammed Halabi, un travailleur humanitaire palestinien de premier plan, pour avoir versé des fonds au Hamas lorsqu’il dirigeait le….

Mercredi après-midi, le tribunal du district de Be’er Sheva a condamné Mohammed Halabi, un travailleur humanitaire palestinien de premier plan, pour avoir versé des fonds au Hamas lorsqu’il dirigeait le bureau de Gaza de l’association caritative internationale World Vision. L’affaire a impliqué six ans d’emprisonnement pour Halabi (bien qu’il n’ait pas été alors condamné), pimentés par plus de 160 audiences au tribunal. Un audit par le gouvernement australien, un des donateurs principaux de World Vision, n’a découvert aucune preuve pour soutenir les allégations d’Israël. Malgré cela, Israël a refusé de révéler des preuves substantielles de ses accusations, se cachant à la place derrière le prétexte d’une « preuve secrète ».

Le calvaire d’Halabi est un exemple notoire de la conception grotesque qu’Israël a de la « procédure régulière » pour les Palestiniens. Lorsqu’il s’agit de prisonniers et de détenus, les tribunaux israéliens (aussi bien militaires que civils) misent presque toujours sur les agences de sécurité pour faire pression sur les Palestiniens afin que ceux-ci acceptent un accord, même si l’accord implique une période d’emprisonnement continu. Ces marchés sont souvent obtenus par la coercition, directe ou indirecte, y compris par la menace d’une incarcération indéfinie, par des manipulations de la procédure ou du droit (comme le fait de signer des confessions en hébreu sans connaître la langue), et par la torture physique et psychologique.

Les autorités israéliennes s’attendaient clairement à ce que cette routine marche avec le directeur pour Gaza de World Vision. Mais au cours des six dernières années, Halabi a relevé leur bluff en insistant sur son innocence et en refusant d’accepter un accord — malgré un coût personnel important. Déconcertés par sa résolution, prudents à l’idée d’un affrontement avec l’establishment de sécurité et à court d’excuses pour retarder encore la procédure, le tribunal semble être finalement intervenu pour absoudre l’accusation de ses échecs. En ce qui concerne Israël, Halabi n’est maintenant qu’un autre des milliers de Palestiniens qu’il enferme derrière des barreaux chaque année, une perturbation mineure dans la machinerie banale de l’apartheid.

Cette banalité, cependant, a reçu une violente secousse la semaine passée quand, dans un revirement

ahurissant des normes politiques, la Knesset n’a pas renouvelé une règlementation d’urgence qui applique formellement des systèmes juridiques séparés aux colons israéliens et aux Palestiniens vivant en Cisjordanie occupée. L’existence de la règlementation, qui a été renouvelée tous les cinq ans depuis le début de l’occupation en 1967, est arrivée comme une information suprenante même pour les observateurs les plus expérimentés de la politique israélienne ; son renouvellement est si routinier qu’il était devenu essentiellement une procédure banale indigne d’attention — jusqu’à ce que l’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahou décide de politiser la loi pour saper la coalition Bennett-Lapid qui l’a évincé.

Ironiquement, tant le verdict contre Halabi que le sabotage par Netanyahou de la loi d’urgence ont exposé les tromperies qui étayent le régime juridique apparemment complexe d’Israël. Quand Halabi a mis au défi le système de justice israélien de justifier ses accusations par des preuves sérieuses, le système n’avait pas de bases pour se soutenir sauf un pouvoir discrétionnaire. Et comme Mike Schaeffer Omer-Man l’a écrit sur +972, Netanyahou, lui aussi, a démontré comment l’infrastructure juridique de l’occupation pourrait facilement être décortiquée, elle qui repose finalement sur la violence brutale pour se maintenir. Dans les deux cas, la tapisserie des lois qui décore l’image de « démocratie » d’Israël s’est révélée n’être rien de plus qu’une cape jetée sur un régime autoritaire.

Ce qui est requis, donc, est une rupture de la banalité qui permet ces simulacres. De fait, un pilier clé de la survivance de l’apartheid israélien a été sa capacité à normaliser sa machinerie absurde, en calmant la résistance en pensée et en pratique tout en abusant le monde pour qu’il croit que cette oppression est justifiée. Israël utilise maintenant la même stratégie contre les six ONG palestiniennes qu’il a déclarées « organisations teroristes » l’an dernier — ce qui, comme l’a révélé le reportage d’investigation de +972, était juste aussi infondé que la condamantion de Halabi. La communauté internationale le sait bien, mais doit être poussée à agir. S’il y a une leçon à tirer de cette semaine passée, c’est que le démantèlement de l’apartheid pourrait être plus facile que nous pensons — il requiert seulement la volonté de le faire.