Visite du PDG de l’INRA en Israël : déclaration des élus parrainés par la CGT au Conseil Scientifique de l’INRA

Déclaration des 8 élus des secteurs scientifiques de l’INRA lors de la réunion du Conseil Scientifique National INRA du 22 mai 2014 à Paris.

Parmi les actualités INRA du mois de mars dernier dont François Houllier n’a pas parlé, les élus des secteurs scientifiques s’interrogent sur la visite en Israël d’une délégation Inra conduite par François Houlier. Cette délégation a rencontré plusieurs hauts dirigeants israéliens, dont le Ministre de l’Agriculture et du Développement Rural, et le Ministre des Sciences, de la Technologie et de l’Espace. Selon l’interview donnée par F. Houllier à la Chambre de Commerce France-Israël, cette visite avait pour objectif de « Renouer la collaboration avec Israël, aider le pays à affronter les problèmes liés au changement climatique, apprendre de sa technologie, utiliser la complémentarité des deux pays ».

Quelles conséquences pourrait avoir cette collaboration institutionnelle renforcée, alors que le gouvernement israélien poursuit et intensifie sa politique de colonisation, d’expulsion et de discrimination des agriculteurs palestiniens. Le développement de l’agriculture israélienne s’effectue en effet depuis des dizaines d’années au prix de la destruction de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire palestinienne, créant ainsi un marché captif pour l’économie israélienne.

Sans remettre en cause toutes les collaborations directes qui peuvent exister entre scientifiques, nous désapprouvons le soutien que cette initiative institutionnelle de la direction générale de l’INRA apporte à la politique de l’Etat israélien.

Deux syndicats Inra (CGT et SUD) ont dénoncé cette initiative, ainsi que l’AURDIP (Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine). Dans les lettres que le président de l’AURDIP a envoyées aux PDG de l’INRA et du CIRAD, il est rappelé :

– l’Avis du 9 juillet 2004 de la Cour internationale de Justice de La Haye, et le devoir des Etats et organisations internationales (dont l’Inra) de lutter contre les colonies illégales de peuplement en Palestine, notamment dans le domaine des politiques agricoles et de gestion de l’eau conduites par l’Etat d’Israël ;

– que cette politique de colonisation constitue un crime de guerre tant en droit international (IVème Convention de Genève de 1949 ; Cour pénale internationale de 1998) qu’en droit français. Par conséquent, la simple fourniture de moyens – y compris dans le domaine de la coopération scientifique -, à cette politique constitue un acte de complicité de crime de guerre, punissable par les tribunaux ;

– l’adoption le 19 juillet 2013 par l’UE des « lignes directrices relatives à l’éligibilité des entités israéliennes établies dans les territoires occupés par Israël depuis juin 1967 et des activités qu’elles y déploient aux subventions, prix et instruments financiers financés par l’UE à partir de 2014 ».

Dans ce contexte, il n’est pas envisageable pour l’INRA d’engager ou d’approfondir une coopération avec un laboratoire ou un institut de recherche israélien sans un examen ou un réexamen profond de ses modalités. Ceci implique que le partenaire israélien concerné n’ait aucun établissement ni aucune activité (directe ou indirecte) dans une colonie israélienne située en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est.

Le respect des lignes directrices nécessite dans tous les cas la renégociation des accords de coopération existants, avec l’inclusion d’une clause territoriale, précisant que le partenaire israélien s’engage à ne conduire aucune activité (directe ou indirecte) dans une colonie israélienne. L’accord doit également prévoir un suivi du respect de la clause territoriale et qu’il appartient au partenaire israélien chaque année de le prouver. Le refus de l’insertion d’une telle clause territoriale impose la rupture de l’accord de coopération existant et la non-conclusion d’un nouvel accord.

En conclusion, les éléments cités devraient donc conduire l’INRA à cesser sa collaboration avec les instituts ou laboratoires israéliens, lorsqu’ils ne satisfont pas aux conditions d’éligibilité de l’UE, et dont on peut alors raisonnablement penser qu’ils contribuent à violer le droit international humanitaire en leur qualité de complices du crime de guerre de colonisation commis par les pouvoirs publics israéliens ; ceci impliquerait en effet un risque juridique pénal encouru par le PDG de l’INRA et par ses collaborateurs, chercheurs et étudiants de l’INRA chargés de mettre en oeuvre cette coopération scientifique.

Syndicat National CGT-INRA (www.inra.cgt.fr/)