Un haut fonctionnaire israélien est nommé bien que sa maison fasse l’objet d’un ordre de démolition

Le procureur général Mendelblit argumente que l’ordre de démolition ne porte pas atteinte à l’intégrité du nouveau directeur général du ministère de l’Intérieur.

La nomination d’un nouveau chef du ministère de l’Intérieur peut être confirmée en dépit d’un ordre de démolition pris contre la maison du directeur général désigné, dans un avant-poste des colonies de Cisjordanie : c’est ce qu’a déclaré lundi le procureur général Avichaï Mendelblit.

Mendelblit a noté dans son avis juridique que Yaïr Hirsch n’était pas informé de l’ordre de démolition et, bien que l’existence de cet ordre présente « quelques difficultés d’ordre juridique », cela ne va pas jusqu’à remettre en cause l’intégrité de Hirsch.

Le mois dernier, Haaretz a rapporté que le procureur général réexaminerait la désignation de Hirsch après réception par la Commission du service civil d’une information sur l’ordre de démolition de 2008 de la maison du fonctionnaire.

À la suite de ce rapport, des membres de droite de la Knesset, Yoav Kish (Likoud) et Orit Strock (Sionisme religieux) ont fait appel à la Knesset pour que la colonie d’avant-poste de Kida soit légalisée et que la Knesset soutienne la nomination de Hirsch par la ministre de l’Intérieur, Ayelet Shaked.

D’après la déclaration de lundi du procureur général, la nomination de Hirsch ne devrait pas être remise en cause par cet ordre de démolition, en partie parce qu’il est prévu de reclasser le terrain sur lequel est bâtie sa maison, en propriété d’État.

L’information sur l’ordre de démolition a été obtenue par une requête d’accès à l’information soumise par Dror Etkes, un chercheur de l’organisation Kerem Navot, par l’intermédiaire de l’avocat Shachar Ben-Meir. Selon l’information reçue, l’Administration civile a émis en 2008 un ordre visant à arrêter les travaux entrepris par Hirsch sur sa maison.

Des ordres d’arrêt de travaux sont émis sur des bâtiments illégaux ou sur des constructions en cours. Après leur émission, un comité se réunit et le destinataire de l’ordre doit prouver que les travaux sont bien exécutés avec un permis. Selon l’information reçue par Etkes, le comité qui s’était réuni sur le cas de la maison de Hirsch avait décidé d’émettre un ordre de démolition. Une fois qu’un ordre de démolition est émis sur une structure en construction, l’Administration civile n’émet généralement pas un autre ordre pour une maison construite en contrevenant à cet ordre et l’ordre précédemment émis reste en vigueur.

Après avoir eu connaissance de l’ordre de démolition, Mendelblit a ordonné une audition du comité des nominations sur la nomination de Hirsch, avant laquelle le Commissaire du service civil a demandé au procureur général de présenter son point de vue juridique en la matière. Mendelblit a expliqué qu’à son avis l’ordre de démolition ne portait pas atteinte à l’intégrité de Hirsch du fait du laps de temps écoulé depuis son émission et parce que cette construction ne relevait pas d’une incursion sur un terrain privé mais se situait sur un terrain appelé à être reclassé en propriété d’État. Il a aussi écrit que Hirsch n’avait pas connaissance de l’ordre de démolition, attestant que le fonctionnaire était « de bonne foi » en présentant ce qu’il savait, sans intention « d’induire en erreur le gouvernement ni le comité des nominations ».

Kida est un avant-poste illégal comptant environ 80 familles. Il a été établi sans plan directeur ni permis de construire et, à la date de novembre 2020, 110 ordres de démolition étaient en instance. De nombreux ordres de démolition sont en instance sur des avant-postes dans toute la Cisjordanie, sans avoir jamais été appliqués, et l’Administration civile justifie cela en alléguant de ses « priorités ».

La Commission du service civil a dit le mois dernier, en réponse à Haaretz, que le fait que l’application de l’ordre ne soit pas une priorité de premier plan pour l’Administration civile militait en faveur de l’approbation de la nomination de Hirsch en dépit de l’illégalité. « Le comité a considéré le cas et a même entendu le témoignage du candidat auprès du comité ; il en est venu à la conclusion que les allégations en la matière ne doivent pas empêcher la nomination à la position prévue, étant donné le contexte dans son ensemble » : voilà ce qu’a dit la commission à ce moment-là.

En pratique, la démolition de maisons juives en Cisjordanie est une question politique sensible et l’absence de mise en œuvre des décisions vient de considérations politiques internes.

Kida fait partie du bloc de Shiloh, près de la colonie du même nom, bloc qui représente la plus grande concentration d’avant-postes en Cisjordanie. En 2005, en réponse à une pétition présenté à la Cour Suprême, qui demandait l’évacuation de l’avant-poste de Adei Ad, l’État a déclaré qu’il prévoyait de légaliser ce bloc d’avant-postes. Le bloc n’a cependant jamais été légalisé et Kida est resté illégal.

En réponse à la décision de Mendelblit, Ayelet Shaked a déclaré : « Je suis satisfaite que le procureur général et le Commissaire du service civil aient accepté l’opinion qui leur a été présentée au sujet de Yaïr Hirsch. Ayant œuvré pendant de nombreuses années à la légalisation des colonies de Judée et Samarie, je suis fière que le directeur général de ce ministère vive dans la colonie de Kida. Il mérite d’être nommé et le ministère de l’Intérieur est indubitablement chanceux de l’avoir.