Pour l’arrestation d’un militant de la gauche israélienne, le tribunal s’aligne sur la musique incitative des colons

Le militant de gauche Jonathan Pollak a été arrêté lundi. Des agents infiltrés sont venus sur son lieu de travail, l’ont informé qu’il était en état d’arrestation, l’ont menotté et….

Le militant de gauche Jonathan Pollak a été arrêté lundi. Des agents infiltrés sont venus sur son lieu de travail, l’ont informé qu’il était en état d’arrestation, l’ont menotté et mis dans une voiture de police. Ils agissaient sur ordre du juge Dov Pllock du Tribunal de District de Jérusalem. Pollock a fait arrêter Pollak parce qu’il ne s’était pas présenté au tribunal pour y répondre à une plainte privée au pénal contre Pollak et deux camarades militants par l’organisation d’espionnage et d’infiltration Ad Kan. En signant ce mandat préjudiciable et inutile, le juge a offert à Ad Kan une victoire exceptionnelle et a à nouveau transformé le système judiciaire en collaborateur important de la droite antidémocratique dans sa persécution de la gauche idéologique, qui reste ferme dans son refus d’accepter le crime de l’occupation.

Avant de poursuivre, je dois révéler : Jonathan Pollak est un refuge, un ami, au sens de camarade, un frère de combat, un homme que j’admire grandement et auprès duquel j’ai tant appris au long des années de notre militantisme, lui sur le terrain et moi dans les tribunaux.

2ème révélation : Je méprise Ad Kan et m’active à repousser ses attaques contre mes clients, avec un succès notoire. Toute l’existence de cette organisation – connue pour implanter des espions dans des associations comme Ta’ayush et Breaking the Silence (Briser le Silence) et pour entraîner les journalistes dans des gros titres à sensation, qui se révèlent sans fondement, sur de supposées graves infractions à la sécurité par les militants anti-occupation – est dépendante de ses parrains politiques de droite qui sont en position de pouvoir.

En d’autres termes, dès que le régime colonial de droite prendra fin, cette organisation tombera dans l’oubli : elle ne peut survivre sans accès aux centres du pouvoir gouvernemental qui lui fournissent une tribune et de l’influence. Ad Kan est l’une des organisations mutantes de la société civile qui ont récemment pris racine ici, qui agissent au nom du gouvernement et largement en coordination avec lui, pour rendre le fort plus fort et pour affaiblir et réduire au silence le faible et la minorité. C’est à cette organisation que l’honorable juge a confié l’arrestation de Pollak.

Comme le modus operandi d’Ad Kan pour atteindre ses buts, c’est l’incitation agressive et le harcèlement de ses rivaux, les procédures judiciaires sans fondement font partie de son répertoire. En réalité, il est difficile d’imaginer procédure judiciaire plus pernicieuse et grotesque que la plainte de cette organisation accusant les trois militants -voyez cela- agressant des soldats et des officiers de la Police des Frontières pendant les manifestations dans les villages palestiniens de Cisjordanie de Bil’in et Na’alin. Ad Kan qui, jusqu’ici, a échoué dans ses nombreuses tentatives pour provoquer une enquête criminelle sur Breaking the Silence et qui semble n’avoir pas réussi à provoquer une enquête sur Pollak et ses camarades militants, a endossé le rôle du ministère public en passant par une plainte pénale privée. Cette façon de faire permet à des parties privées d’engager une procédure pénale au sujet d’un nombre limité d’offenses mineures et dans des situations où l’intérêt principal est privé, telles que des disputes entre voisins ou entres affaires concurrentes.

L’enregistrement d’une plainte criminelle par quelqu’un qui n’est pas la victime de l’action prétendue, et lorsque l’accusation concerne des dommages sur des soldats, en dit beaucoup plus sur le plaignant que sur l’accusé. Il indique que le plaignant se considère comme le synonyme de l’État et qu’il est chargé de la mission de défendre les forces de sécurité et l’honneur national. Mais, outre le fait de soulever des questions intéressantes sur la psychologie d’Ad Kan, cette plainte est un exemple flagrant du mésusage des procédures judiciaires dans le but de harceler un adversaire politique et, en tant que telle, elle menace de transformer le tribunal en pion d’un camp politique.

En réalité, dans cette affaire, la menace est déjà passée. Au moment où Pollock a accepté d’entendre la plainte plutôt que de la renvoyer immédiatement et d’ordonner à Ad Kan de payer les frais de justice pour cette manœuvre indigne ; au moment où il a convoqué une session après l’autre et a accepté de traiter la plainte comme un document juridique plutôt que de dénouer ses grosses ficelles et de la révéler pour ce qu’elle est réellement – un manifeste politique qui ressemble plutôt à un flyer distribué dans la rue – il a permis à Ad Kan de transformer le tribunal en marteau retenu en suspens et qui se meut selon les caprices des militants.

Alors oui, Pollak a défié le tribunal lorsqu’il a annoncé au monde qu’il n’assisterait pas aux audiences (« Pourquoi je n’assisterai pas à mon procès pour prétendue agression en Cisjordanie contre la police israélienne », Haaretz, le 12 juin 2019) et les juges sont très à cheval sur l’expression du respect envers leur honneur et le système judiciaire. Mais la sensation d’affront d’un juge n’est pas un prétexte valable à une arrestation. En réalité, l’histoire des décisions courageuses qui ont fait avancer les droits de l’Homme et les valeurs démocratiques est remplie de pétitionnaires et d’accusés « pas gentils » dont les droits ont néanmoins été protégés. Bien avant que Pollak ne se présente pas devant le tribunal, la plainte était un acte juridique intrinsèquement défectueux, et une arrestation fondée sur une procédure inappropriée équivaut à une arrestation illégale.

Gaby Lasky, l’avocat qui représente les camarades accusés de Pollak, a déposé une requête auprès du procureur général pour suspendre la procédure. Si le renvoi est accordé, cela permettrait de progresser vers la réparation des dommages causés au système judiciaire par son consentement à s’aligner sur la musique de ceux qui persécutent les militants de gauche.