La Cour d’appel de Cadiz reconnait la légalité des actions BDS menées par la municipalité

En Espagne, la Cour régionale d’appel de Cadix a rendu le 28 mai 2020 un arrêt (PN-2019/42, n°247/20) qui reconnaît la légalité des actions menées par les partisans du mouvement….

En Espagne, la Cour régionale d’appel de Cadix a rendu le 28 mai 2020 un arrêt (PN-2019/42, n°247/20) qui reconnaît la légalité des actions menées par les partisans du mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions).

L’arrêt du 28 mai 2020 confirme la décision de première instance du 16 décembre 2019 du tribunal correctionnel de Cadix prononçant la relaxe des membres du conseil municipal de Cadix.

Rappelons que le 12 août 2016, le conseil municipal de cette ville d’environ 120.000 habitants, située en Andalousie, a voté une motion de soutien au mouvement BDS et d’adoption de mesures de consommation responsable et équitable visant à promouvoir le refus d’achat de produits issus de l’apartheid israélien.

Le 28 septembre 2017, le conseil municipal a décidé, dans le cadre de cette campagne, d’annuler la diffusion de films israéliens à l’Espace de la culture contemporaine (ECCO), un site municipal de Cadix, diffusion organisée avec le soutien de l’ambassade d’Israël. Un choix salué au niveau international par les sympathisants de la campagne BDS.

Une plainte pénale a été déposée par l’association pro-israélienne ACOM (Acción y Comunicación sobre Oriente Medio) contre cette décision. C’est cette association qui a interjeté appel contre la relaxe prononcée le 16 décembre 2019 et qui se retrouve à nouveau déboutée.

La motivation de l’arrêt du 28 mai 2020 conforte largement l’analyse du juge de première instance qui avait constaté qu’aucune infraction pénale n’a été commise dans cette affaire.

La Cour d’appel confirme que l’infraction d’obstruction à une décision de justice (art. 404 du Code pénal espagnol) n’était pas constituée. L’association plaignante considérait qu’en décidant l’annulation de la diffusion des films le 28 septembre 2017, le conseil municipal avait agi de mauvaise foi en violation d’une décision de justice. Selon le juge d’appel, si ladite décision du conseil municipal a été annulée postérieurement par le juge administratif, au motif que son contenu relatif à la politique étrangère ne relevait pas des attributions du conseil municipal, il ne peut être reproché à quiconque d’avoir appliqué cette décision, dès lors que celle-ci a été adoptée en application d’une résolution du conseil municipal du 12 août 2016 et que personne ne pouvait être certain de son illégalité.

La Cour d’appel confirme également que l’infraction d’appel à la haine n’était pas constituée (art. 510 du Code pénal). La Cour relève qu’elle ne trouve pas de trace d’antisémitisme ni de discours de haine ou d’atteinte à la dignité humaine dans la démarche de ceux ayant décidé l’annulation du festival de films israéliens, dès lors que cette démarche était guidée par un motif politique, à savoir le fait que le festival était sponsorisé par l’ambassade d’Israël. Elle note en outre que la résolution municipale du 12 août 2016 était une réaction aux violations par Israël du droit international.

L’arrêt de la Cour d’appel de Cadix a été rendu quelques jours avant celui de la Cour européenne des droits de l’homme le 11 juin 2020.

Il atteste de ce qu’il existait déjà, avant même cette décision faisant autorité rendue par la Cour européenne, une large tendance de fond des juridictions en Europe à considérer que la campagne BDS et ses modes d’action pacifique relèvent de l’exercice des libertés d’opinion et d’expression. La Cour d’appel d’Angleterre et du pays de Galles->https://www.france-palestine.org/Le-droit-a-l-appel-au-boycott-reconnu-par-la-Cour-d-appel-de-l-Angleterre-et-du], la [Cour supérieure de Basse-Saxe et le tribunal administratif de Cologne avaient déjà statué en ce sens en 2018 et 2019.

Ces différentes décisions démontrent bien que la pénalisation des actions BDS souhaitée par les autorités politiques françaises (avec les circulaires Alliot-Marie et Mercier) et validée par la Cour de cassation en 2015 constituait une exception injustifiée et contraire au droit européen et international.

Ghislain Poissonnier, magistrat.