Notre organisation, « Une Voix juive pour une juste paix au Moyen-Orient » (JS) a été créée il y a treize ans en tant que section allemande de « Juifs….
Notre organisation, « Une Voix juive pour une juste paix au Moyen-Orient » (JS) a été créée il y a treize ans en tant que section allemande de « Juifs européens pour une paix juste ». Depuis lors, nous œuvrons en tant que groupe, tant en Allemagne que dans l’Union européenne, pour la mise en œuvre des droits humains universels en Israël et en Palestine, et pour une résolution juste aux conflits entre leurs peuples. Depuis 2007, nous sommes enregistrés comme une organisation sans but lucratif. Grâce à notre présence, l’opinion allemande a pu savoir que la communauté juive dans ce pays est plus diversifiée et plus critique que les représentants officiels de la communauté juive d’ici ne le laissent penser. Nous sommes pleinement conscients que nos activités déplaisent à ceux qui soutiennent le gouvernement israélien. Cependant, nous ne nous attendions pas à une attaque venant d’une banque allemande contre notre droit à la liberté d’expression.
Il y a six semaines, nous avons reçu une lettre de la Banque pour une économie sociale (Bank für Sozialwirtschaft AG (BSW)) dans laquelle, et sans nous en donner les raisons, elle nous informait que notre compte à la banque serait fermé à la fin de l’année. Après une tentative ardue pour clarifier la situation et avec le soutien et une pression considérable de beaucoup de nos sympathisants en Allemagne et à l’étranger, la Banque a reconnu que sa décision avait un motif politique, à savoir notre soutien à la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions). La Banque avait été mise au courant de notre position par quelqu’un travaillant pour le Jerusalem Post, un quotidien israélien positionné à droite dans le spectre politique. Le Conseil d’administration de la Banque pour une économie sociale (BSW) s’est donc octroyé la prérogative de pouvoir interpréter quelles sont les opinions politiques qui sont acceptables et celles qui ne le sont pas, sans égard pour les exigences de la constitution allemande. En d’autres termes, les représentants de la Banque pratiquent la censure. Dans le même temps, les officiels de la Banque ont informé le Jerusalem Post que notre compte avait été fermé, violant ainsi leur obligation légale du secret bancaire, secret que la Banque nous avait initialement opposé, à nous et à nos sympathisants.
Que nous, en tant que juifs et Israéliens, soyons accusés par une banque allemande de nous opposer au droit d’Israël à exister est quelque chose que nous trouvons scandaleux. Nous nous saisissons cependant de cette opportunité pour expliquer pourquoi – surtout à la lumière de notre patrimoine – nous nous exprimons en faveur de la campagne non violente de boycott contre certaines entreprises israéliennes et d’autres, internationales. Les allégations de la direction de la Banque selon lesquelles la campagne BDS est dirigée contre le droit d’Israël à exister sont quelque chose que nous rejetons catégoriquement et avec véhémence, comme propagandistes et inexactes. Les sources que cite la Banque peuvent être réfutées de plusieurs façons. De plus, en portant notre regard au-delà des frontières de l’Allemagne, on peut voir qu’un certain nombre de personnalités bien connues, parmi lesquelles de nombreux scientifiques et universitaires hautement respectés, ont rejoint, avec d’excellentes raisons et avec une conscience claire, le mouvement BDS, et parmi elles, par exemple, Judith Butler, Angela Davis, l’archevêque Desmond Tutu, Naomi Klein et Alice Walker.
La campagne BDS continue de croître dans le soutien populaire, tandis que dans le même temps, le gouvernement israélien continue d’étendre et d’intensifier sa politique de colonisation de peuplement. Ce sont les fréquentes attaques israéliennes contre la bande de Gaza, par exemple, ou les violentes confrontations entre l’armée israélienne et les civils palestiniens qui se poursuivent depuis des décennies, qui endommagent l’image d’Israël, et non la résistance contre cette violence ou la dénonciation de ce comportement en ce qu’il viole les lois internationales relatives aux droits de l’homme, comme le prétend la Banque pour l’économie sociale (BSW).
L’appel à soutenir le BDS, qui a été signé par JS, est lié à des conditions clairement articulées. En particulier, il ne vise pas l’État d’Israël internationalement reconnu, mais est dirigé indubitablement contre l’occupation, la colonisation et la politique d’exclusion du gouvernement israélien. Il s’oppose invariablement au mépris continu du droit international par le gouvernement israélien et, par principe, il utilise des formes non violentes de protestation. Des responsables politiques, tels qu’Helmut Schmidt, Richard von Weitzäckere, et d’autres personnalités européennes, ont appelé à des sanctions contre Israël. Des entreprises comme la Deutsche Bahn (le Rail allemand), Heidelberg Cement et récemment, G4S, ont retiré leurs investissements des territoires occupés. De nombreux artistes se réfèrent au boycott contre l’Afrique du Sud de l’apartheid comme modèle, et annulent leurs spectacles en Israël. Bien sûr que cela nuit aux Israéliens. C’est exactement l’effet souhaité et, malheureusement c’est inévitable parce que, finalement, ces campagnes civiles de boycott et leurs autres formes visent à provoquer des changements qui se sont révélés impossibles à obtenir par d’autres moyens.
Tous les membres de JS ne soutiennent pas le mouvement international BDS. Tous les membres de JS, cependant, soutiennent le droit inaliénable à l’expression et le droit de réunion. Ces droits protègent aussi le soutien du mouvement civil BDS aussi bien que sa participation active. Le mouvement BDS est un moyen approprié pour obliger le gouvernement israélien à revoir sa politique d’occupation et de colonisation. Ce n’est pas seulement dans l’intérêt des populations juive et palestinienne. À la lumière de tout cela, nous rejetons catégoriquement l’accusation de toute forme de menaces, ou même de remettre en cause le droit d’Israël à exister, et nous manifestons clairement – par rapport aux nombreux juifs parmi nos membres – notre stupéfaction devant une remontrance sur cette question venant d’une banque allemande. À moins que la Banque pour une économie sociale (BSW) ne souhaite prétendre qu’Israël ne peut pas exister sans être une puissance occupante.
Nous demandons à tous les organismes, associations et personnes privées qui sont des clients de la BSW de reconsidérer le maintien de leurs affaires avec cette banque. Nous parlons d’une banque qui réprimande politiquement, et même punit, ses clients. La censure qui nous frappe aujourd’hui peut frapper d’autres clients demain. Ce n’est pas qu’une question de solidarité avec notre organisation : car la façon dont cette institution financière nous a traités est profondément préoccupante, les droits fondamentaux et inaliénables à la liberté d’expression des citoyens en République fédérale d’Allemagne sont en péril. Les entreprises qui utilisent leur pouvoir comme une arme afin de réduire au silence les voix critiques qu’elles jugent désagréables représentent une menace pour une société ouverte et pour toute forme d’engagement politique dans la cause des droits humains fondamentaux en Allemagne.
Nous sommes reconnaissants de la solidarité sous forme de protestation contre cet acte par de nombreuses organisations, par exemple, Pax Christi, IPPNW e.V., la Ligue internationale des droits de l’homme et de nombreux membres du Bundestag allemand, du Parti de gauche (Links Partei), du SPD et du Parti des Verts qui se sont plaints auprès de la Banque à propos de ce cas sans précédent de censure politique contre une organisation juive en République fédérale d’Allemagne. Certaines organisations nous ont déjà informés qu’elles projetaient de fermer leur compte à la Banque pour une économie sociale (BSW) en signe de protestation.
En dépit de ce développement scandaleux, nous continuerons notre travail dans le domaine des droits de l’homme, et nous continuerons d’élever notre voix contre l’injustice et pour la paix en Israël et en Palestine. La politique méprisante d’occupation et le déni des droits humains élémentaires doivent être arrêtés.