L’université Northeastern lève la suspension d’Étudiants pour la justice en Palestine

Nora Barrows | The Electronic Intifada | 25 avril 2014 | Après sept semaines d’une attention médiatique et d’une animation soutenues par les militants étudiants, l’université Northeastern (Boston) a annoncé….

Nora Barrows | The Electronic Intifada | 25 avril 2014 |

Après sept semaines d’une attention médiatique et d’une animation soutenues par les militants étudiants, l’université Northeastern (Boston) a annoncé aujourd’hui qu’elle levait la suspension d’Étudiants pour la Justice en Palestine (Students for Justice in Palestine – SJP) de Northeastern.

Non seulement le groupe sera entièrement réintégré le 1er septembre, mais il aura accès à de nouveaux financements pour les initiatives éducatives planifiées avant sa suspension du 7 mars. SJP Northeastern sera en mesure de programmer aussitôt ces initiatives.

Le groupe avait été suspendu, dans une sanction sans précédent, par l’administration après que les étudiants eurent distribué sur le campus des tracts simulant des avis d’expulsion (tels qu’en reçoivent les familles palestiniennes avant la démolition de leurs maisons par l’occupant israélien – ndt), dans le cadre d’une action directe vers la population engagée par de nombreux groupes de solidarité avec la Palestine pendant la Semaine contre l’apartheid israélien, afin de faire prendre conscience de la destruction des maisons palestiniennes par Israël.

L’administration avait également lancé une enquête de police et menacé d’accusations deux des étudiants impliqués dans l’action des expulsions simulées, pouvant conduire à leur suspension ou expulsion. La menace d’expulsion a été écartée suite à un débordement de réprobations de la part des militants du SJP de Northeastern et de sympathisants à travers tous les États-Unis.

Des groupes anti-palestiniens, comme les Américains pour la paix et la tolérance, de Boston, et l’Organisation sioniste d’Amérique, orchestrent des campagnes contre le SJP Northeastern et ses membres depuis des années, exigeant de l’université qu’elle punisse et suspende le groupe.

Des membres de ces organisations sionistes d’extrême droite ont publié des menaces de mort contre des étudiants membres du SJP Northeastern. L’université ne s’en est pas préoccupée et n’a toujours pas condamné les attaques de ces groupes contre ses étudiants.

« Rendre la parole au SJP »

Tori Porell, du SJP Northeastern, a déclaré à The Electronic Intifada, que Robert Jose, Doyen de la vie résidentielle, culturelle et spirituelle de Northeastern, s’était rapproché de la direction du SJP en début de ce mois pour aider à élaborer un plan visant à la réintégration du groupe, plan qui serait acceptable à la fois par le SJP et l’administration de l’université, mais qui, « au bout du compte, rendrait la parole au SJP sur le campus ».

Le SJP Northeastern a accepté plusieurs conditions, notamment les réunions mensuelles entre la direction du SHP et le Doyen, et de travailler avec lui directement pour organiser une série d’évènements éducatifs. Lesquels seraient axés autour de deux thèmes : discussion sur les mouvements politiques qui ont inspiré les actions et l’animation du SJP, notamment la lutte contre l’apartheid sud-africain, et discussion sur les relations intersectionnelles entre le SJP Northeastern et les autres groupes d’étudiants sur le campus agissant au sein des luttes de libération.

D’après les conditions de sa réintégration, le SJP Northeastern aura accès à des financements et sera en mesure de réserver des espaces sur le campus d’ici septembre, de sorte que le groupe pourra être opérationnel et organiser des initiatives pour la session d’automne.

Le SJP Northeastern a expliqué à l’administration que la suspension avait causé un tort irréparable à la réputation du groupe sur le campus, affirme Porell. Le groupe insiste pour que l’administration publie un communiqué déclarant que le SJP sera traité comme n’importe quel autre groupe légitime d’étudiants sur le campus, et qu’il répond aux principes de l’université.

« Nous n’exigeons pas d’excuses, mais nous avons demandé une déclaration selon laquelle nous étions un groupe légitime, et serions traités de la même façon que n’importe quel autre groupe » ajoute Porell. Le SJP a communiqué ses conditions au doyen il y a deux semaines.

D’égal à égal

Pour le SJP Northeastern, l’annulation des actions punitives de l’administration contre le groupe doit être attribuée à l’attention portée par les médias et à la pression ininterrompue exercée sur l’université depuis la suspension.

« Bien que, historiquement, notre camp soit celui qui est marginalisé et impuissant contre ce genre de punition arbitraire, le vent est en train de tourner et l’université, aujourd’hui, craint les deux, à la fois (les groupes politiques sionistes) et le SJP » fait remarquer Porell. « Ça commence à être plus d’égal à égal ».

Le SJP Northeastern et ses défenseurs juridiques ont fait savoir que si la suspension du groupe n’avait pas été levée, une action en justice aurait été lancée contre l’université pour violation du droit à la libre parole des étudiants.

Construire

La semaine dernière, l’université a confirmé qu’elle était prête à réintégrer le SJP Northeastern, mais au dernier moment, l’administration a semblé se rétracter sur certains accords qu’elle avait conclus avec les étudiants. Cependant, et en réaction à une lettre récente envoyée par l’avocate Sarah Wunsch, de l’Union américaine des libertés civiles (ACLU), du Massachusetts, et agissant au nom du SJP Northeastern pour répondre aux préoccupations du groupe, il semble bien que, ces derniers jours, Northeastern ait reculé.

Dans sa lettre, le premier vice-président et conseiller juridique de Northeastern, Ralph Martin, confirme que le SJP pourra refonctionner à l’automne, mais avec un « statut probatoire ».

Dans un communiqué de presse envoyé par courriel à The Electronic Intifada, Porell réagit, « Nous sommes prêts à être mis à l’épreuve pendant un semestre, bien que ce soit contestable et, plus probablement aussi, bien que ce soit un moyen d’apaiser ces groupes qui appellent l’université à censurer le SJP ».

Dans le même communiqué de presse, l’avocate Wunch déclare que « la réintégration du SJP est une victoire pour la liberté d’expression qui est un aspect fondamental de toute université de qualité… L’université n’a jamais eu de fondement légitime pour sanctionner le SJP pour une prétendue violation de règles qui ne s’imposent pas aux autres. Northeastern n’aurait pas dû mettre le SJP sous probation et nous allons être extrêmement attentifs pour être certains que le SJP sera traité de façon juste et équitable dans les années à venir. »

Radhika Sainath, avocate du collectif Soutien juridique à la solidarité Palestine, et coopérant avec les conseillers du Centre pour les droits constitutionnels, ajoute : « Ce qui est arrivé au SJP à Northeastern n’est qu’un aspect d’une agression plus vaste contre le discours en faveur des droits palestiniens dans ce pays. Il n’y a pas d’ « exception Palestine » au droit à la parole libre et au Premier Amendement ».

Mise à l’épreuve ou non, les étudiants disent qu’ils se consacreront immédiatement à construire le groupe. « Nous avons reçu tellement plus de marques d’intérêt dans le SJP, avec plus de monde à vouloir s’y impliquer, depuis que tout cela s’est passé » a dit Porell à The Electronic Intifada. « C’est un moment idéal pour faire connaître la Palestine aux autres campus et renforcer le SJP. »

Nora Barrows-Friedman est auteure et rédactrice en chef à The Electronic Intifada, et elle a collaboré à Al-Jazeera (anglais), Inter Press Service, Truthout.org, au magazine Left Turn, et à d’autres organes de presse internationaux. De 2003 à 2010, elle a été productrice principale et co-animatrice de Flashpoints, un magazine d’enquêtes primées opérant depuis KPFA/Pacifica Radio à Berkeley, Californie. Nora a témoigné régulièrement depuis la Palestine depuis 2004.

Traduction : JPP pour l’AURDIP