Israël commet-il un génocide à Gaza ? Le compte rendu d’une audience historique

Alors que les massacres israéliens à Gaza se poursuivent, l’Afrique du Sud a tenté de démontrer, jeudi 11 et vendredi 12 janvier devant la justice onusienne, qu’un génocide est en train d’être commis par Israël à Gaza. « Une calomnie », selon l’État hébreu.

Devant le palais de la Paix de La Haye (Pays-Bas), la bataille des mots a commencé avant même l’audience. Jeudi 11 janvier au matin, devant la Cour de justice internationale des Nations unies, des manifestants propalestiniens ont exigé un « cessez-le-feu immédiat » et dénoncé « l’apartheid » en cours au Proche-Orient. Face à eux, des familles d’otages israélien·nes ont montré les photos de leurs proches kidnappés le 7 octobre par le Hamas.

Pendant deux jours, devant 17 juges internationaux, alors que les massacres israéliens à Gaza continuent de tuer, de déplacer et de mutiler des civils palestiniens (à 70 % des femmes et des enfants, selon les agences onusiennes), le principal organe judiciaire des Nations unies a examiné la requête, précise et argumentée, de l’Afrique du Sud, destinée à imposer au gouvernement israélien des « mesures conservatoires » pour prévenir un génocide de la population palestinienne de Gaza. 

La première et plus urgente de ces demandes est l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes à Gaza. Les autres exigent des mesures urgentes pour cesser les tueries, les déplacements de population, faciliter l’accès à l’eau et à la nourriture, et prévenir tout génocide.

La cour a aussi entendu les arguments d’Israël, qui nie toute intention génocidaire et a martelé son « droit à se défendre, reconnu par le droit international »

L’affaire ne sera pas jugée sur le fond avant longtemps. La décision sur les « mesures conservatoires », elle, sera rendue « dès que possible », a indiqué la présidente de la cour, l’États-Unienne Joan Donoghue. 

Rien ne dit que les 17 juges (dont un Sud-Africain et un Israélien, Aharon Barak, ancien juge de la Cour suprême israélienne, de réputation progressiste mais qui n’a jamais critiqué la colonisation israélienne) donneront raison aux arguments de l’Afrique du Sud, soutenue dans sa requête par de nombreux États du Sud global. Et tout indique qu’une décision sanctionnant Israël serait rejetée par un ou plusieurs vétos au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. 

Cette audience solennelle, retransmise sur le site de l’ONU (revoir les débats du jeudi 11 et ceux du vendredi 12), et relayée par de nombreux médias internationaux, a pourtant revêtu un caractère extrêmement symbolique, où se sont affrontées deux lectures radicalement opposées de la tragédie en cours à Gaza.

« Israël a franchi une limite »

Premier à prendre la parole, l’ambassadeur sud-africain aux Pays-Bas, Vusi Madonsela, a d’emblée replacé « les actes et omissions génocidaires commis par l’État d’Israël » dans une « suite continue d’actes illicites perpétrés contre le peuple palestinien depuis 1948 ». 

Face aux juges internationaux, il a rappelé « la Nakba du peuple palestinien, conséquence de la colonisation israélienne qui a […] entraîné la dépossession, le déplacement et la fragmentation systématique et forcée du peuple palestinien ». Mais aussi une « occupation qui perdure depuis cinquante-six ans, et le siège de seize ans imposé [par Israël] à la bande de Gaza »

Il a décrit un « régime institutionnalisé de lois, de politiques et de pratiques discriminatoires, mises en place [par Israël – ndlr] pour établir sa domination et soumettre le peuple palestinien à un apartheid », dénonçant des « décennies de violations généralisées et systématiques des droits humains »

« En tendant la main aux Palestiniens, nous faisons partie d’une seule humanité », a renchéri le ministre de la justice sud-africain, Ronald Ozzy Lamola, citant l’ancien président Nelson Mandela, figure de la lutte contre l’apartheid dans son pays. 

D’emblée, il a tenté de déminer le principal argument du gouvernement israélien, selon lequel la procédure devant la Cour internationale de justice est nulle et non avenue, car Israël mènerait une guerre défensive contre le Hamas, au nom du droit à la légitime défense garanti par l’article 51 de la charte des Nations unies – un droit qui, selon la Cour internationale de justice, ne s’applique pas aux Territoires occupés. « Gaza est occupée. Israël a gardé le contrôle de Gaza. […] Ses actions renforcent son occupation : la légitime défense ne s’applique pas », insistera un peu plus tard l’avocat Vaughan Lowe. 

« L’Afrique du Sud, affirme le ministre sud-africain, condamne de manière catégorique la prise pour cibles de civils par le Hamas et d’autres groupes armés palestiniens le 7 octobre 2023. Cela étant dit, aucune attaque armée contre le territoire d’un État, aussi grave soit-elle, même marquée par la commission des crimes atroces, ne saurait constituer la moindre justification ni le moindre prétexte, pour se rendre coupable d’une violation, ni sur le plan juridique ni sur le plan moral »,de la convention des Nations unies pour la prévention et la répression du crime de génocide, dont est accusé l’État hébreu. 

« La réponse d’Israël à l’attaque du 7 octobre, a-t-il insisté, a franchi cette limite. »

Un « génocide » au caractère « systématique »

Adila Hassim, principale avocate de l’Afrique du Sud, s’est évertuée à démontrer méthodiquement comment Israël a « commis des actes relevant de la définition d’actes de génocide », dont elle a martelé le caractère « systématique »

« Les Palestiniens sont tués, risquent la famine, la déshydratation, la maladie, et ainsi la mort, du fait du siège qu’Israël a organisé, de la destruction des villes, d’une aide insuffisante autorisée à atteindre la population, et de l’impossibilité à distribuer cette maigre aide sous les bombardements incessants, a-t-elle énuméré. Tout ceci rend impossible d’avoir accès aux éléments essentiels de la vie. »

Adila Hassim s’est attelée à démontrer en quoi la guerre israélienne cochait les cases du génocide, tel qu’il est défini à l’article 2 de la convention onusienne : « Des actes commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. »

Le « meurtre des membres du groupe », premier élément du génocide ? Adila Hassim évoque le « meurtre de masse des Palestiniens », les « 23 000 victimes dont 70 % sont des femmes ou des enfants », et « les 7 000 disparus, présumés ensevelis sous les décombres ». « Il n’y a pas de lieu sûr à Gaza », dit-elle, une phrase empruntée aux responsables de l’ONU, répétée de nombreuses fois par la partie sud-africaine.

Hasssim dénonce « une des campagnes de bombardement les plus lourdes dans l’histoire de la guerre moderne » : « 6 000 bombes par semaine dans les trois premières semaines », avec des « bombes de 900 kilos, les plus lourdes et les plus destructrices », campagne qui vise habitations, abris, écoles, mosquées et églises, dans le nord et le sud de la bande de Gaza, camps de réfugié·es inclus. 

« Les Palestiniens sont tués quand ils cherchent à évacuer, quand ils n’ont pas évacué, quand ils ont pris la fuite, même quand ils prennent les itinéraires présentés par Israël comme sécurisés. (…) Des centaines de familles plurigénérationelles ont été décimées, personne n’ayant survécu (…) Personne n’est épargné, pas même les nouveau-nés (…) Ces massacres ne sont rien de moins que la destruction de la vie palestinienne, infligée de manière délibérée. » Selon l’avocate, il existe bien une intention de tuer. « Israël, dit-elle, sait fort bien combien de civils perdent leur vie avec chacune de ces bombes. »

L’« atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe », et la « soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle », autres éléments constitutifs du génocide ? Adila Hassim évoque « la mort et la mutilation de 60 000 Palestiniens », les « civils palestiniens arrêtés et emmenés dans une destination inconnue », et détaille le « déplacement forcé de 85 % des Palestiniens de Gaza » depuis le 13 octobre, sans retour possible pour la plupart, et qui « répète une longue histoire de déplacements forcés de masse »

Elle accuse Israël de « vise[r] délibérément à provoquer la faim, la déshydratation et l’inanition à grande échelle » (93 % de la population souffrent d’un niveau critique de faim, selon l’Organisation mondiale de la santé), l’aide empêchée par les bombardements et qui « ne suffit tout simplement pas », l’absence « d’eau propre », le « taux d’épidémies et de maladies infectieuses qui s’envole », mais aussi « les attaques de l’armée israélienne prenant pour cible le système de santé », « déjà paralysé par des années de blocus, impuissant face au nombre de blessures »

Elle évoque de nombreuses « naissances entravées », un autre élément constitutif du génocide. 

« Les génocides ne sont jamais annoncés à l’avance, conclut-elle. Mais cette cour a devant elle 13 semaines de preuves accumulées qui démontrent de manière irréfutable l’existence d’une ligne de conduite, et d’intentions qui s’y rapportent, justifiant une allégation plausible d’actes génocidaires. » 

Une « déshumanisation systématique » par les dirigeants israéliens

Un autre avocat s’avance à la barre. Après avoir rappelé que « 1 % de la population palestinienne de Gaza a été systématiquement décimée, et qu’un Gazaoui sur 40 a été blessé depuis le 7 octobre », Tembeka Ngcukaitobidécortique les propos des autorités israéliennes. 

« Les dirigeants politiques, les commandants militaires et les représentants de l’État d’Israël ont systématiquement et explicitement exprimé cette intention génocidaire, accuse-t-il. Ces déclarations sont ensuite reprises par des soldats, sur place à Gaza, au moment où ils anéantissent la population palestinienne et l’infrastructure de Gaza. » 

« L’intention génocidaire spécifique d’Israël, résume-t-il, repose sur la conviction que l’ennemi n’est pas simplement le Hamas, mais qu’il est à rechercher au cœur même de la société palestinienne de Gaza. »

L’avocat multiplie les exemples, encore plus détaillés dans les 84 pages de la requête sud-africaine, d’une « intention de détruire Gaza aux plus hauts rangs de l’État » : celle du premier ministre, Benyamin Nétanyahou, qui, à deux reprises, a fait une référence à Amalek, ce peuple que, dans la Bible (I Samuel XV, 3), Dieu ordonne d’exterminer ; celle du ministre de la défense, qui a comparé les Palestiniens à des « animaux humains » ; le président israélien Isaac Herzog, qui a jugé « l’entièreté de la nation » palestinienne responsable ; celle du vice-président de la Knesset, qui a appelé à « l’anéantissement de la bande de Gaza » (des propos condamnés par Nétanyahou) ; ou encore les propos de nombreux élus et députés de la Knesset appelant à la destruction de Gaza.

Une « déshumanisation systématique », dans laquelle les « civils sont condamnés au même titre que le Hamas », selon Tembeka Ngcukaitobi.

« L’intention génocidaire qui anime ces déclarations n’est nullement ambiguë pour les soldats israéliens sur le terrain : elle guide leurs actes et leurs objectifs », poursuit l’avocat, qui diffuse devant les juges des vidéos où des soldats font eux aussi référence à Amalek, « se filment en train de commettre des atrocités contre les civils à Gaza à la manière des snuff movies », ou écoutent un réserviste de 95 ans les exhorter à « tirer une balle » sur leur « voisin arabe » et les encourager à une « destruction totale »

L’avocat dénonce le « manquement délibéré de la part du gouvernement à son obligation de condamner, de prévenir et de réprimer une telle incitation au génocide »

Après une plaidoirie technique sur la capacité à agir de l’Afrique du Sud, John Dugardinsiste : « Gaza est devenu un camp de concentration où un génocide est en cours. » 

Il s’agit du premier génocide de l’Histoire dont les victimes diffusent leur propre destruction en temps réel, dans l’espoir vain que le monde fasse quelque chose.

Blinne Ni Ghralaigh, avocate irlandaise

L’avocat sud-africain Max du Plessisexhorte la cour à agir face à Israël, qui « depuis des années (…) s’estime au-delà et au-dessus de la loi », une négligence du droit rendue possible par l’indifférence de la communauté internationale, qui a su, dans d’autres conflits (Gambie, Bosnie, Ukraine) décider qu’il était urgent d’agir.  

« Gaza est devenu inhabitable », poursuit l’avocate irlandaise Blinne Ni Ghralaigh. Elle énumère d’autres chiffres : « Au rythme actuel », égrène-t-elle, « 247 Palestiniens tués en moyenne chaque jour », dont « 48 mères » et « plus de 117 enfants », et « 629 blessés ». Elle évoque ces enfants dont toute la famille a été décimée, les secouristes, les enseignants, les universitaires et les journalistes tués dans des proportions historiques. 

« Il s’agit, dit-elle, du premier génocide de l’Histoire dont les victimes diffusent leur propre destruction en temps réel, dans l’espoir vain que le monde fasse quelque chose. » L’avocate dévoile à l’écran les derniers mots du docteur Mahmoud Abu Najela (Médecins sans frontières), tué le 23 novembre à l’hôpital Al-Awda, écrits au feutre sur un tableau blanc : « À ceux qui survivront. Nous avons fait ce que nous pouvons. Souvenez-vous de nous. »

« Le monde, conclut Blinne Ni Ghralaigh, devrait avoir honte. »

La réponse d’Israël : une « calomnie »

Vendredi 12 janvier, les représentants d’Israël se sont avancés à la barre. Leur argumentation a reposé sur deux éléments principaux : un, la Cour internationale de justice n’a pas à exiger de « mesures conservatoires » car son armée ne commet aucun génocide ; deux, si génocide il y a, il a été commis par le Hamas le 7 octobre 2023. 

Premier à prendre la parole, Tal Becker, conseiller juridique du ministère des affaires étrangères israélien, invoque l’Histoire, et le génocide infligé aux juifs pendant la Seconde Guerre mondiale, « le meurtre systématique de 6 millions de juifs dans le cadre d’une destruction totale ». 

« Israël, dit-il, a été un des premiers États à ratifier la convention contre le génocide. » « Pour Israël, insiste-t-il, “jamais plus” n’est pas un slogan, c’est une obligation morale suprême. »
Dans « une époque où on fait bon marché des mots, à l’heure des politiques identitaires et des réseaux sociaux », il dénonce une « instrumentalisation » de la notion de génocide contre Israël.

Il attaque une présentation sud-africaine « totalement dénaturée des faits et du droit », « délibérément manipulée et décontextualisée du conflit actuel », qualifiée de « calomnie »

Alors que les avocats sud-africains avaient expliqué ne pas intégrer les massacres du Hamas dans leur requête devant la justice onusienne, car « le Hamas n’est pas un État », Tal Becker estime que l’Afrique du Sud « a pris le parti d’effacer l’histoire juive et tout acte ou responsabilité palestiniens », et que les arguments avancés « ne se distinguent guère de ceux opposés par le Hamas dans son rejet d’Israël ». « L’Afrique du Sud entretient des rapports étroits avec le Hamas » et le « soutient », accuse-t-il. 

« C’est une guerre qu’Israël n’a pas commencée », dit-il en revenant longuement, images et enregistrements à l’appui, sur les atrocités commises par le Hamas et d’autres groupes palestiniens le 7 octobre, « le plus important massacre de juifs en un jour depuis la Shoah »

« S’il y a eu des actes que l’on pourrait qualifier de génocidaires, [ils ont été commis] contre Israël », dit-il, évoquant le « programme d’annihilation » des juifs par le Hamas. « Israël ne veut pas détruire un peuple, poursuit-il. Mais protéger un peuple : le sien. »

Becker salue les familles d’otages israéliens présentes dans la salle d’audience, et montre certains visages des 130 personnes kidnappées dont le pays est toujours sans nouvelle. « Y a-t-il une raison de penser que les personnes que vous voyez à l’écran ne méritent pas d’être protégées ? », interroge-t-il. 

Pour ce représentant de l’État israélien, la demande sud-africaine de mesures conservatoires revient à priver le pays de son droit à se défendre.

« Israël, poursuit-il, se défend contre le Hamas, le Djihad palestinien et d’autres organisations terroristes dont la brutalité est sans limite. Les souffrances sont tragiques, sont déchirantes. Les conséquences sont parfaitement atroces pour les civils du fait du comportement du Hamas, qui cherche à maximiser les pertes de civils alors qu’Israël cherche à les minorer. »

Becker s’attarde sur la « stratégie méprisable » du Hamas, une « méthode de guerre intégrée, planifiée, de grande ampleur et odieuse ». Le Hamas, accuse-t-il, « a, de manière systématique, fondu ses opérations militaires au sein de zones civiles densément peuplées », citant écoles, mosquées et hôpitaux, des « milliers de bâtiments piégés » et « utilisés à des fins militaires ».

Le Hamas « a fait entrer une quantité innombrable d’armes, a détourné l’aide humanitaire ». Remettant en cause le chiffre « non vérifié » de 23 000 victimes (pourtant confirmé par les Nations unies), Tal Becker estime que de nombreuses victimes palestiniennes sont des « militants » qui ont pu prendre « une part directe aux hostilités ». « Israël respecte le droit », martèle-t-il. « Si le Hamas abandonne cette stratégie, libère les otages, hostilités et violences prendront fin. »

La requête de l’Afrique du Sud brosse un tableau affreux, mais incomplet et profondément biaisé.

Galit Rajuan, conseillère au ministère de la justice israélien

Ponte britannique du droit, spécialiste des questions juridiques liées aux génocides, Malcom Shawembraie, toujours en défense d’Israël. Son discours, technique, est parfois interrompu. Il se perd une première fois dans ses notes, puis soupçonne un membre de son équipe d’avoir « pris [sa] plaidoirie pour un jeu de cartes ». 

Shaw insiste : « Un conflit armé coûte des vies. » Mais Israël, dit-il, « a le droit de se défendre dans le respect du droit humanitaire », citant à l’audience les propos de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le 19 octobre 2023. Il poursuit : « L’usage de la force ne peut constituer en soi un acte génocidaire. » « Israël, jure-t-il, ne cible que les cibles militaires, et ceci de manière proportionnée dans chacun des cas. » 

« Peu d’éléments démontrent qu’Israël a eu, ou a, l’intention de détruire tout ou partie du peuple palestinien », plaide-t-il. Shaw estime que nombre de propos tenus par des politiciens israéliens ne doivent pas être pris en compte, car ils sont « pris au hasard et sont sortis de leur contexte », parce qu’ils témoignent d’une « détresse »  face aux massacres du 7 octobre, et que ceux qui les ont prononcés n’appartiennent pas aux « autorités pertinentes » qui prennent les décisions militaires, à savoir le « comité ministériel chargé de la sécurité nationale » et le « cabinet de guerre »

Pour étayer son argumentation, Shaw cite des directives (non publiques) de Benyamin Nétanyahou destinées, selon lui, à « éviter un désastre humanitaire », à proposer des « solutions pour l’approvisionnement en eau », « promouvoir la construction d’hôpitaux de campagne au sud de la bande de Gaza » ; les déclarations publiques de Benyamin Nétanyahou à la veille de l’audience (« Israël n’a pas l’intention d’occuper de façon permanente la bande de Gaza ou de déplacer sa population civile ») ; d’autres citations du ministre de la défense qui assure ne pas s’attaquer au peuple palestinien dans son ensemble.

« La requête de l’Afrique du Sud brosse un tableau affreux, mais incomplet et profondément biaisé », renchérit Galit Rajuan, conseillère au ministère de la justice israélien, qui revient longuement sur les responsabilités du Hamas, sa stratégie militaire au cœur de la population palestinienne. « Dans chacun des hôpitaux que les forces armées israéliennes ont fouillés à Gaza, elles ont trouvé des preuves d’utilisation militaire par le Hamas », avance-t-elle, des allégations contestées. 

« Certes, des dommages et dégâts ont été causés par les hostilités dans les hôpitaux, parfois par les forces armées israéliennes, parfois par le Hamas, reconnaît-elle, mais il s’agit des conséquences de l’utilisation odieuse de ces hôpitaux par le Hamas. »

Rajuan martèle enfin qu’Israël cherche à « atténuer les dommages causés aux civils » et à « faciliter l’aide humanitaire ». Des arguments connus, que de très nombreuses ONG, agences des Nations unies et journalistes gazaouis présents sur place réfutent régulièrement, et que les journalistes étrangers ne peuvent pas vérifier, faute d’accès à la bande de Gaza.

Mathieu Magnaudeix

  • Photo de l’équipe de juristes ayant plaidé la cause de l’Afrique du Sud contre Israël devant la Cour Internationale de Justice. La photo inclut également Raji Sourani, directeur du Centre Palestinien pour les Droits de l’Homme à Gaza