Familles effacées : une famille de Gaza porte plainte contre un fabricant d’armes français pour complicité dans des crimes de guerre

La famille Shuheibar, dont l’histoire constitue l’un des dix chapitres du prochain web documentaire Familles Effacées, est le demandeur dans la plainte soumise aujourd’hui en son nom devant l’Unité Spéciale….

La famille Shuheibar, dont l’histoire constitue l’un des dix chapitres du prochain web documentaire Familles Effacées, est le demandeur dans la plainte soumise aujourd’hui en son nom devant l’Unité Spéciale pour Crimes de Guerre en France.

Le 17 juillet 2014, trois enfants de la famille Shuheibar ont été tués par un missile très vraisemblablement tiré par l’opérateur d’un drone israélien, tandis que deux autres enfants étaient gravement blessés. Un composant de ce missile, ramassé par la famille, portait l’inscription « France ». Des experts ont établi qu’il avait été produit par Eurofarad, société française ensuite acquise par Exxelia Technologies. L’association française de défense des droits de l’Homme ACAT, conjointement avec un partenaire local de Gaza, a réuni des preuves et des témoignages et, avec l’aide du bureau juridique d’Ancile-avocats, a porté plainte contre le fabricant d’armes français pour complicité dans des crimes de guerre et homicide involontaire.

Au cours d’une interview avec Anne Paq, photographe française et directrice du projet Familles Effacées, Wissam Shuheibar, le père affligé, a dit : « Je trouve cela étrange. (…) Comment le gouvernement français peut-il autoriser des sociétés qui produisent des roquettes et des armes qui seront utilisées dans la guerre sur nos enfants ? »

Juste avant iftar, repas qui met fin à une longue journée de jeûne pendant le Ramadan, cinq enfants de la famille Shuheibar sont montés sur le toit pour nourrir les pigeons. C’était le Ramadan, période de visites familiales. Deux frères, Jihad (10 ans) et Wassim (9 ans), ainsi que leur cousin Basel (10 ans), étaient venus chez leurs cousins : Afnan (8 ans) et Oday (15 ans). Le plus âgé, Oday, était entré dans le pigeonnier pour le nettoyer avant que les plus jeunes n’y entrent avec la nourriture des pigeons. Alors qu’ils attendaient pour entrer, un missile, probablement tiré depuis un drone israélien, a frappé le toit juste à côté de l’endroit où se tenaient les enfants. Wassim et Jihad sont morts sur le coup, Afnan sur le chemin de l’hôpital. Basel et Oday ont été gravement blessés. Ils ont dû subir de multiples opérations, il n’est pas sûr qu’ils s’en remettent complètement et les deux garçons souffrent d’un grave traumatisme. Wissam et Kifah, les parents d’Afnan, parlent de leur fille avec des larmes dans les yeux. Ils en ont assez des fréquentes visites de journalistes. Pourtant, ils ont accepté de nous parler, pensant que cela les rapprocherait d’une possible justice. Nous l’espérons aussi.

La famille Shuheibar est l’une des 142 familles de la Bande de Gaza qui ont perdu trois membres ou plus deleur famille dans les attaques israéliennes de 2014. L’écrasante majorité d’entre elles n’a aucun espoir de voir son cas entendu dans un tribunal.

Sur le web documentaire :

Familles Effacées est un web documentaire interactif qui raconte les histoires personnelles de familles palestiniennes de la Bande de Gaza dont la vie a été fracassée pendant l’offensive militaire israélienne de 2014. Il comporte dix chapitres, chacun racontant l’histoire de l’une des ces familles avec des textes, des photos, des vidéos et autres médias. Il est dirigé par Anne Paq, photographe française, et Ala Quandil, reporter palestino-polonais, avec le soutien d’ACAT France. Son but est de montrer la tragédie qui se cache derrière les statistiques communément utilisées pour décrire l’offensive israélienne sur Gaza.

Le web documentaire Familles Effacées qui, parmi d’autres, raconte l’histoire de la famille Shuheibar, sortira le 8 juillet.