Bande dessinée : Décris-Ravage

Rencontre avec la dramaturge Adeline Rosenstein et le dessinateur Alex Baladi autour de leur bande dessinée Décris-Ravage (tome 1 : Décrire l’Égypte, Ravager la Palestine), éditée par Atrabile.

Samedi 24 septembre à la librairie la Petite Égypte

« Décris-Ravage, c’est tout d’abord une pièce de théâtre d’Adeline Rosenstein, une pièce qui s’inscrit dans la mouvance du théâtre dit documentaire. Dans cette pièce, il est question de la Palestine, du rapport entre l’Occident et le Moyen-Orient (en remontant à Napoléon Bonaparte), mais aussi de la représentation de cette région, ou encore des enjeux qui y sont liés. Pour évoquer tout cela, sont ainsi convoqués des récits historiques, des témoignages, mais aussi des textes de pièces de théâtre pour tenter de comprendre « ce qui a bien pu se passer pour qu’on en arrive là ». Baladi est parti du texte de la pièce de théâtre pour en livrer une adaptation en bande dessinée, et ceci en allant également se nourrir aux mêmes sources que celles consultées pour l’écriture du spectacle. Dans ce premier épisode se succèdent alors paroles d’artistes, textes d’auteurs arabes et descriptions de la campagne d’Égypte de 1798. Dense, passionnant et éclairant, ce Décris-Ravage est un livre sans réel équivalent, aussi bien dans la bibliographie de l’auteur que dans le paysage actuel de la bande dessinée, une tentative inédite de réflexion sur le sujet qui multiplie des sources et des points de vue souvent oubliés, voire méprisés. Avec une introduction de l’historien Henry Laurens. »

Présentation des éditions Atrabile

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Baladi déambule en Palestine, passant du théâtre à la BD

La tribune de Genève du 22 août 2016

Bande dessinée Avec Adeline Rosenstein, le dessinateur genevois crée «Décris-Ravage». Un projet ambitieux

Propos ambitieux, traitement original: au moment où la rentrée BD s’amorce tout doucement, Alex Baladi publie un album qui sort des sentiers battus. Pilier de la scène indépendante genevoise, l’auteur établi depuis plusieurs années à Berlin signe avec la scénariste Adeline Rosenstein le premier volume de Décris-Ravage, une saga sur la Palestine et le rapport entre Occident et Moyen-Orient. Pas facile de mettre en cases, ou en mots, un sujet épineux qui abordera à terme la création d’Israël et le conflit israélo-palestinien.

Adeline Rosenstein, qui a grandi à Genève et travaille entre Buenos Aires, Berlin et Bruxelles, a créé une pièce de théâtre qui reconstitue en six épisodes cette histoire compliquée. Elle s’est basée sur des récits historiques, des images d’archives, des œuvres d’art, des témoignages de gens qui ont vécu dans la région, des textes théâtraux, des cartes et des infographies. A partir de ce matériau brut, elle a multiplié les points de vue. Alex Baladi adapte en bande dessinée ce texte écrit pour la scène. Il le fait avec un langage graphique qui n’appartient qu’à lui. En noir et blanc, variant le trait et la composition des pages au fil du propos, il montre autant qu’il suggère, comptant sur l’intelligence de son lecteur.

Qu’avez-vous éprouvé en découvrant le texte d’Adeline Rosenstein, fruit de sept ans de réflexion?

J’ai contacté Adeline Rosenstein pour participer au deuxième numéro de la revue Mon Lapin (Ed. L’Association, octobre 2013), dont j’étais le rédacteur en chef. Elle a scénarisé cinq planches que j’ai dessinées. On les retrouve, légèrement modifiées, dans le livre. Je lui ai demandé si elle voulait réaliser une bande dessinée sur la Palestine, sachant qu’elle travaillait sur ce sujet pour un spectacle. Elle m’a proposé d’adapter sa pièce, dont j’ai découvert des bribes de texte lorsqu’on a procédé aux premiers essais dessinés. Puis j’ai vu les premiers épisodes de Décris-Ravage au théâtre, à plusieurs reprises. J’ai tout de suite été enthousiaste, tout en me rendant compte de la difficulté d’adapter ceux-ci en bande dessinée.

Dans sa pièce, l’auteure parie sur l’imagination du spectateur, en ne montrant aucune image. Comment traduire cela en BD?

Adeline Rosenstein m’a souvent proposé des solutions expérimentales, en me demandant si ça se faisait en bande dessinée. Parfois, c’était difficilement réalisable et il fallait trouver des solutions, c’était très stimulant. Depuis des années, j’expérimente les possibilités du langage de la bande dessinée, tout seul ou au sein de l’OuBaPo (Ouvroir de bande dessinée potentielle). Ces expérimentations sont souvent de simples exercices formels. Je suis heureux de pouvoir mettre cette recherche au service d’une œuvre.

Quel parti pris avez-vous adopté d’un point de vue graphique?

Il fallait que je traduise par le dessin les règles qu’elle s’imposait dans la mise en scène. Par exemple, faire apparaître dans un même témoignage les différents mondes imaginaires du témoin. Ou utiliser un graphisme spécifique qui respecte les multiples genres d’écriture. Adeline me donnait souvent une idée assez précise de la direction à prendre. Je lui soumettais des propositions selon ses indications et elle me guidait par ses critiques.

Êtes-vous resté fidèle au texte original?

Elle voulait plus de matière dans le livre que dans la pièce. Parfois, elle me donnait un story-board précis à suivre case par case, ou alors un texte que je devais couper et adapter moi-même. On devait souvent effectuer des changements, recommencer.

Vos images révèlent un minimum d’informations, mais suggèrent beaucoup. Pour donner envie au lecteur d’aller plus loin?

Pas forcément. La bande dessinée permet beaucoup, sans trop dévoiler, en mêlant l’image au texte, ou en n’utilisant que l’image ou que le texte. Je crois que mes pages préférées sont celles du dernier chapitre, quasi sans images.

Cette adaptation comptera au total six volumes. Il fallait cela pour faire le tour d’une question aussi épineuse?

Six volumes, ce n’est pas tant que ça. Ils correspondent aux six épisodes de la pièce. Nous espérons en publier un par an.

«Décris-Ravage», premier épisode: «Décrire l’Egypte, ravager la Palestine.» Par Baladi et Adeline Rosenstein. Ed. Atrabile, 72 p.