À Gaza, environ 300 immeubles d’habitation détruits chaque jour par les robots chargés d’explosifs de l’armée israélienne

Territoire palestinien – L’armée israélienne détruit environ 300 immeubles d’habitation chaque jour à Gaza Ville et Jabalia, en utilisant une quinzaine de robots qui transportent presque 100 tonnes d’explosifs.

Ces bombardements ont lieu à une cadence sans précédent, avec pour objectif de détruire Gaza Ville et de déplacer ses habitants, dans le contexte d’une dangereuse escalade du génocide en cours contre les Palestiniens dans la Bande de Gaza depuis presque 23 mois.

L’équipe de terrain d’Euro-Med Monitor a recueilli des éléments sur l’utilisation intensifiée par l’armée israélienne de robots blindés chargés d’explosifs pour démolir des secteurs résidentiels à un rythme accéléré. La plupart des logements et des infrastructures à Jabalia al-Balad et Jabalia al-Nazla ont déjà été détruits, pendant que l’armée avance en se livrant à des destructions systématiques vers le cœur de Gaza depuis le sud, l’est et le nord.

Depuis que l’armée israélienne a annoncé vendredi dernier [29 août] la fin de ce qu’elle avait appelé une « pause tactique humanitaire” à Gaza Ville, « pause » qui, selon elle, s’appliquait pendant la journée, l’équipe de terrain d’Euro-Med Monitor Monitor a recensé un doublement du nombre d’explosions de robots chargés d’explosifs, ayant passé d’environ sept à presque 15 par jour.

Chacun de ces robots, chargé de matériaux hautement explosifs, qui peuvent peser jusqu’à sept tonnes, est programmé pour exploser à Jabalia al-Balad et Jabalia al-Nazla au nord de Gaza Ville, dans les quartiers de Zeitoun, al-Sabra, al-Shuja’iyya et al-Tuffah au sud et à l’est de Gaza Ville, ainsi que dans les secteurs d’al-Saftawi et d’Abu Iskandar au nord-ouest de Gaza Ville.

Le rythme sans précédent de la destruction de quartiers d’habitation à Gaza Ville au moyen de robots chargés d’explosifs montre qu’Israël est déterminé à gommer cette ville de la carte. À la cadence actuelle, le reste de la ville pourrait être détruit en l’espace de deux mois, échéance qui pourrait même se rapprocher compte tenu de la puissance de feu colossale de l’armée israélienne et de l’absence de toute pression pour qu’elle cesse de commettre ses crimes contre les Palestiniens.

Après avoir mené des évaluations préliminaires des attaques des robots, Euro-Med Monitor estime que chaque robot peut détruire complètement ou partiellement une vingtaine d’unités d’habitation. Prochainement, des centaines de milliers de personnes pourraient se retrouver sans demeure ou sans abri, ce qui les forcera à fuir de nouveau dans des conditions meurtrières, sans disposer du strict minimum pour survivre.

Les robots utilisés pour ces bombardements sont pour l’essentiel des véhicules militaires israéliens, notamment des transports de troupes blindés M113 obsolètes, chargés de tonnes d’explosifs et pilotés à distance dans des quartiers où vivent des civils. Ils sont programmés pour exploser dans des lieux soigneusement choisis en vue de maximiser les destructions. Dans certains cas, le robot n’est pas équipé de façon à exploser mais il est muni de grosses caisses d’explosifs qui sont déchargées sur le site ciblé, après quoi le véhicule revient à la base pour être réutilisé lors d’autres opérations. Cela indique une stratégie militaire organisée visant à détruire systématiquement les quartiers d’habitation et à maximiser l’ampleur de la dévastation.

L’impact catastrophique des robots chargés d’explosifs va au-delà de la destruction physique de quartiers d’habitation et prend l’aspect d’un usage systématique de la terreur psychologique contre les civils. Délibérément, l’armée israélienne fait exploser la plupart de ces robots tard dans la nuit ou à l’aube pour répandre la peur et la panique et forcer les habitants à fuir. Les explosions produisent des bruits assourdissants qui ébranlent Gaza Ville, pendant que les bâtiments restants tremblent sous les violentes ondes de choc, aggravant les souffrances de la population et transformant la vie quotidienne en état constant de terreur et d’insécurité.

Le bruit des explosions de ces robots parvient souvent au-delà de la Bande de Gaza, se faisant entendre à plus de 40 km du lieu de l’explosion. Cela montre l’immense force destructive de ces armes, qu’Israël emploie pour raser les villes de l’enclave.

L’inaction et la complicité flagrantes de la communauté internationale, ainsi que le refus de la part d’États influents, d’organes de l’ONU et d’organisations internationales compétentes, de tenir Israël pour responsable de ses actes, l’ont autorisé à parachever ouvertement la destruction de Gaza Ville, sans même essayer d’invoquer des justifications juridiques pour légitimer ce crime.

Cette impudence est illustrée par les propos tenus le 22 août par Israel Katz, ministre israélien de la Défense, qui a déclaré : “Si eux [le Hamas] n’acceptent pas les termes définis par Israël, Gaza deviendra Rafah et Beit Hanoun. Comme je l’ai promis – il en sera ainsi.”

La première utilisation documentée de robots par l’armée israélienne pour détruire des quartiers d’habitation a eu lieu lors des deux campagnes contre le camp de réfugiés de Jabalia dans le nord de la Bande de Gaza en mai et en octobre 2024, avant que leur déploiement ne s’étende à d’autres secteurs de la Bande.

L’utilisation par Israël de robots chargés d’explosifs est explicitement prohibée en vertu du droit international humanitaire, car ce sont des armes intrinsèquement non discriminantes, incapables de cibler avec précision des objectifs militaires. Leur effet explosif à champ large exerce sans distinction un impact direct sur les civils et les biens civils, violant de façon flagrante les principes de distinction et de proportionnalité, piliers fondamentaux du droit international humanitaire.

Ces armes entrent dans la catégorie des armes prohibées, et leur utilisation dans des zones peuplées constitue à la fois un crime de guerre et un crime contre l’humanité, car elles provoquent des meurtres à grande échelle, des déplacements forcés, et la privation de conditions de vie élémentaires dans le contexte d’une attaque systématique ou de grande ampleur contre la population civile.

De plus, l’utilisation systématique de ces robots, telle qu’elle est actuellement pratiquée pour détruire des quartiers d’habitation et dépouiller les habitants de leur logement et de leurs moyens de subsistance, en fait un outil direct pour commettre un génocide. Ce schéma de destruction relève visiblement des actes définis dans la Convention sur le génocide, en particulier le fait d’infliger de façon intentionnelle des conditions de vie calculées afin de provoquer la destruction d’un groupe en tout ou en partie.

Non seulement l’utilisation de ces méthodes destructives, au tout premier plan les robots, cause des morts et force les habitants à des déplacements meurtriers mais, de plus, elle vise à anéantir entièrement les quartiers d’habitation et leur infrastructure, supprimant toute possibilité de vie à Gaza Ville et ruinant l’avenir des Palestiniens, ainsi que leur droit inhérent à rester sur leur terre et à regagner leur foyer.

Les robots chargés d’explosifs ne sont qu’une des méthodes utilisées par l’armée israélienne pour anéantir les villes de la Bande de Gaza. Ils constituent un élément d’un arsenal plus vaste d’instruments de destruction, notamment les bombardements aériens avec des missiles et des bombes lourdes, les tirs d’artillerie incessants, le largage par des drones de bombes et de colis explosibles, le piégeage délibéré et la destruction des bâtiments par explosion, et l’utilisation de bulldozers militaires et civils pour raser des constructions ou leurs vestiges.

Plus d’un million d’habitants palestiniens de Gaza Ville sont exposés à une menace existentielle tandis que les actions israéliennes de destruction, de mise en œuvre de la famine et de déplacement forcé se poursuivent, entourées du silence injustifiable de la communauté internationale sur ce crime sans précédent.

L’Assemblée générale de l’ONU doit appliquer dans l’urgence la résolution 377 (V) (résolution « Union pour le maintien de la Paix »), qui l’autorise à agir dans des situations où le Conseil de sécurité reste inactif en raison de l’absence d’unanimité entre ses cinq membres permanents. En vertu de cette résolution, l’Assemblée générale peut faire des recommandations aux États membres de l’ONU sur les mesures collectives à prendre pour assurer le rétablissement de la paix et de la sécurité internationale.

L’Assemblée générale doit agir dans l’urgence en vertu de la résolution susmentionnée pour établir et déployer une force internationale de maintien de la paix dans la Bande de Gaza. Cette mesure est nécessaire pour mettre fin aux crimes contre les civils, garantir leur protection, assurer un accès sans entraves à l’aide humanitaire, sauvegarder les installations médicales et de secours, et faire cesser le ciblage systématique de ces installations. L’activation de ce mécanisme est un devoir tant juridique que moral incombant à la communauté internationale afin de protéger plus de deux millions d’hommes, de femmes et d’enfants de Gaza du génocide et des graves violations en cours.

Tous les États, individuellement et collectivement, doivent remplir leurs obligations juridiques et agir de façon urgente pour faire cesser le génocide à Gaza, prenant toutes les mesures possibles pour protéger les civils palestiniens qui s’y trouvent. Ils doivent imposer à Israël le respect du droit international et des décisions de la Cour internationale de justice, et faire en sorte qu’Israël réponde de ses crimes contre les Palestiniens.

Israël doit être tenu pour responsable de ses crimes contre les Palestiniens devant les juridictions internationales et nationales. Cela inclut, sans dérogation, la mise en œuvre dans les plus brefs délais des mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale contre le Premier ministre israélien et son ancien ministre de la Défense, et leur remise à la justice internationale afin qu’ils soient jugés pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis contre les Palestiniens dans la Bande de Gaza, notamment meurtres, persécutions, autres actes inhumains, et utilisation de la famine comme méthode de guerre.

La communauté internationale doit également imposer des sanctions économiques, diplomatiques et militaires à Israël en réponse à ses violations systématiques et graves du droit international. Cela inclut l’interdiction des exportations d’armes vers Israël et la cessation des achats d’armes à Israël, la suspension de toutes les formes politiques, financières ou militaires de soutien et de coopération avec Israël, le gel des avoirs des personnalités officielles impliquées dans des crimes contre les Palestiniens ou ayant incité à de tels actes, et la mise en place à leur encontre d’interdictions de voyager. De surcroît, les privilèges commerciaux et accords bilatéraux qui octroient à Israël des avantages économiques, lui permettant de commettre des crimes, doivent être suspendus.