L’appel citoyen au boycott des produits de l’État d’Israël constitue-t-il une infraction ?

AJ Pénal 2012 p. 592

Crim. 22 mai 2012, n°10-88.315

Ghislain Poissonnier, Magistrat

et François Dubuisson, Chargé de cours à l’Université libre de Bruxelles

“Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris, l’arrêt retient qu’en invitant les clients du magasin Carrefour à boycotter tous les produits venant d’Israël, Mme Y … a incité à entraver l’exercice normal d’une activité économique et visé de façon discriminatoire les producteurs et fournisseurs de ces produits en raison de leur appartenance à une nation déterminée, en l’espèce Israël ; que les juges ajoutent que la constitution de partie civile de la chambre de commerce France-Israël est recevable au regard de ses statuts qui l’autorisent à engager, toute action pour lutter contre les discriminations commerciales, et que cette association a subi un préjudice direct et certain à la suite de la commission des faits visés à la prévention;”
“Attendu qu’en se prononçant ainsi, par des motifs exempts d’insuffisance comme de contradiction et qui répondent aux chefs péremptoires des conclusions dont elle est saisie, la cour d’appel a justifié sa décision;”

Observations :

Le 9 juillet 2005, une campagne internationale civique et non violente Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS)(1) a été lancée par la société civile palestinienne(2) afin de faire pression sur l’État d’Israël pour qu’il modifie sa politique et respecte le droit international(3). Cet appel a été lancé le premier jour anniversaire de l’avis sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé rendu par la Cour internationale de justice de La Haye le 9 juillet 2004(4). Il est relayé par des organisations non gouvernementales (ONG) dans le monde entier et prend de l’ampleur, alors que la construction du mur et la colonisation israélienne se poursuivent bien qu’elles aient été déclarées contraires au droit international(5). L’appel au boycott économique, culturel et académique, dans le cadre de cette campagne BDS, est perçu par des militants associatifs comme un moyen d’action palliant ce qui est perçu comme une défaillance des États et des institutions internationales à obtenir le respect du droit international par l’État d’Israël(6).

La France, où est également conduite la campagne BDS, se singularise par rapport aux autres États européens et même occidentaux(7) par une politique de poursuites judiciaires visant des militants ou des personnalités ayant publiquement promu le boycott de produits israéliens. Cette politique a été initiée par le ministère de la Justice(8). Les militants, qui se rassemblent régulièrement dans les centres commerciaux pour lancer auprès des consommateurs des appels à boycotter les produits israéliens disponibles en rayon, sont concernés par ces poursuites pénales.

Le 30 mai 2009, dans le rayon d’un grand magasin de Mérignac, une militante de la campagne BDS apposait sur une bouteille de jus de fruits provenant d’Israël et sur une caisse du magasin deux étiquettes autocollantes portant les mentions suivantes : « Campagne boycott ; boycott apartheid Israël ; boycott de tous les produits israéliens ; principales marques : Carmel, Jaffa, Top, Or, Teva ; tant qu’Israël ne respectera pas le droit international ». Cette militante était poursuivie par le ministère public devant le tribunal correctionnel de Bordeaux pour ces faits, nullement contestés, qualifiés de provocation à la discrimination nationale sur le fondement de l’article 24, alinéa 8, de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse. Par jugement du 10 février 2010, le tribunal la déclarait coupable des faits reprochés et la condamnait à une peine d’amende de 1 000 €. La militante faisait appel de la décision. Le 22 octobre 2010(9), la cour d’appel de Bordeaux rendait un arrêt confirmant la décision de première instance, tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine prononcée. La militante formait un double pourvoi en cassation. Le premier portait sur le refus de la cour d’appel de Bordeaux de saisir la Cour de cassation en vue d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 24, alinéa 8, de la loi de 1881. Le 7 juin 2011, la Cour de cassation rendait un arrêt refusant de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soumise(10). Le second pourvoi portait sur le fond de l’arrêt d’appel lui-même. Le 22 mai 2012, la Cour de cassation rendait un arrêt de rejet du pourvoi. Cet arrêt de la Cour régulatrice ne nous paraît pas avoir tranché la question de savoir si l’appel lancé par un citoyen au boycott des produits d’un État est punissable pénalement et s’inscrit dans un contexte judiciaire particulier où les juges du fond manifestent leur attachement à la liberté d’expression.

Une question non tranchée

Il peut être tentant de déduire de l’arrêt du 22 mai 2012 que la Cour de cassation considère que l’appel citoyen au boycott des produits d’un État constitue une infraction. Si tel était le cas, la Cour régulatrice aurait rendu un arrêt contraire tant à la lettre qu’à l’esprit de la loi pénale. À notre sens, il n’en est rien. La Cour de cassation ne s’est pas encore clairement prononcée sur la question de la légalité de l’appel citoyen au boycott. Plusieurs arguments plaident en faveur de cette interprétation. L’arrêt rendu est un arrêt de rejet et l’on sait qu’il est difficile de tirer de ce type d’arrêt des enseignements très clairs, surtout lorsqu’ils sont rendus par la Chambre criminelle, dont la mission est certes de contrôler que les juridictions pénales rendent des décisions conformes à la loi mais aussi de ne pas menacer des procédures pénales pour des motifs bénins ou de forme. Il s’agit, en outre, d’un arrêt de section, rendu par une formation restreinte de la Chambre criminelle, qui n’a pas la portée d’un arrêt rendu en chambre plénière. Enfin, à notre sens, il s’agit d’un arrêt de circonstance. En effet, la cour d’appel de Bordeaux qui a condamné la militante de la campagne BDS a insisté dans sa motivation sur le fait qu’un autocollant appelant au boycott avait été collé sur un des produits israéliens figurant en rayon. Même si les juges du fond n’étaient pas saisis de faits de dégradations légères(11) mais de provocation publique à la discrimination nationale, il semble qu’ils aient trouvé le procédé abusif et aient voulu marquer leur réprobation face à une telle pratique. La Cour de cassation valide le raisonnement tenu par les juges de Bordeaux et ayant abouti à la condamnation pénale : « l’arrêt retient qu’en invitant les clients du magasin Carrefour à boycotter tous les produits venant d’Israël, [la militante] a incité à entraver l’exercice normal d’une activité économique et visé de façon discriminatoire les producteurs et fournisseurs de ces produits en raison de leur appartenance à une nation déterminée, en l’espèce Israël ». Mais c’est en vain que l’on cherchera dans cet attendu l’expression « a justifié » ou « a jugé à bon droit » qui marque l’approbation de principe de la Cour de cassation. En réalité, l’arrêt de rejet de la Chambre criminelle ne contient aucun attendu de principe. Il se borne à considérer que la cour d’appel de Bordeaux s’est prononcée « par des motifs exempts d’insuffisance comme de contradiction »(12). Il s’agit d’une sorte d’approbation qui peut être qualifiée de « service minimum » délivré par la Cour régulatrice à l’arrêt bordelais. On peut le regretter mais c’est ainsi : il n’est pas rare que la Chambre criminelle « sauve » des procédures pénales dont la légalité est discutable, dans l’attente d’un grand arrêt de principe qui viendra éclairer utilement l’état du droit.

L’argument principal du pourvoi portait sur le fait que l’article 24, alinéa 8, de la loi du 29 juillet 1881, qui interdit, entre autres choses, la discrimination fondée sur l’origine nationale, ne peut se combiner avec l’article 225-2 du code pénal relatif à la discrimination caractérisée par une entrave à l’exercice normal d’une activité économique. L’argument, à notre sens, emporte la conviction. L’article 24, alinéa 9, de la loi de 1881 sanctionne les provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence, à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle, ou de leur handicap, en se référant expressément à l’article 225-2 du code pénal visant notamment la discrimination caractérisée par une entrave à l’exercice normal d’une activité économique. Le texte de l’article 24, alinéa 9, de la loi de 1881 est issu de la loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. Or, en 2004, le législateur n’a pas entendu étendre le champ d’application de l’article 225-2 du code pénal à d’autres cas de discriminations. Ainsi, l’article 24, alinéa 8, de la loi de 1881, issu de la loi n° 72-546 du 1er juillet 1972 relative à la lutte contre le racisme, ne renvoie pas à cette disposition lorsqu’il incrimine la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, à une nation, à une race(13) ou une religion déterminée(14). La cour d’appel de Bordeaux, pour retenir une provocation consistant à entraver une activité économique, en l’occurrence le boycott de produits en provenance d’Israël, en raison de l’appartenance des fabricants à cette nation, a combiné l’article 24, alinéa 8, de la loi de 1881 avec l’article 225-2 du code pénal. En étendant ainsi le champ d’application de la loi pénale à une situation non prévue par les textes, les juges de Bordeaux ont méconnu, nous semble-t-il, le principe tant national que conventionnel(15) de la légalité des délits et des peines ainsi que la règle de l’interprétation stricte des règles de droit pénal(16). Car la lecture et l’application de l’article 24, alinéa 8, de la loi de 1881, issu de la loi du 1er juillet 1972, ne pouvaient se faire qu’à la lumière de l’article 24, alinéa 9, de la loi de 1881, issu de la loi du 30 décembre 2004(17).

À cet argument, l’arrêt du 22 mai 2012 ne donne aucune réponse. L’avis de l’avocat général n’y répond pas non plus, se contentant de compiler les textes applicables, pour en déduire sans le démontrer que « l’appel au boycott, quel que soit son support, est également une infraction ». Pour le parquet général, il s’agirait d’une évidence qui se déduirait de la jurisprudence de la Cour de cassation, et notamment des arrêts du 28 septembre 2004(18) et du 18 décembre 2007(19). En réalité, les deux arrêts en question ne sont guère pertinents par rapports aux faits de l’espèce. Le premier visait la situation d’une autorité publique, en l’occurrence un maire, qui avait annoncé son intention d’adopter une décision de boycott des produits israéliens par sa commune. Le second arrêt appliquait l’article 225-2 du code pénal à un acteur économique français pour avoir donné effet au boycott d’Israël imposé par un État étranger. Rappelons que cet article est issu de la loi n° 77-574 du 7 juin 1977, qui visait, selon le législateur, « à lutter contre le boycott par certains pays des entreprises ayant des relations commerciales avec Israël »(20). En clair, elle avait pour objet de protéger les entreprises françaises contre une obligation de ne pas contracter avec des entreprises israéliennes imposée par les États de la Ligue arabe, et pas d’interdire l’appel public lancé par des individus à ne pas consommer des produits israéliens. Ces deux décisions ne concernaient donc pas le cas de l’appel au boycott émanant d’associations et de citoyens, dont la liberté d’expression bénéficie par ailleurs, selon la jurisprudence de la CEDH(21), d’une protection renforcée. On peut donc reprocher aux arrêts de la cour d’appel de Bordeaux et de la Cour de cassation une méconnaissance des règles pénales mais également une insuffisante prise en compte de la situation particulière des associations citoyennes et de la manière stricte dont doit s’appréhender à leur égard toute limitation de la liberté d’expression. Dans une telle situation, la marge d’appréciation dont disposent les autorités pour juger de la « nécessité » d’une mesure limitant l’exercice de la liberté d’expression est particulièrement restreinte(22). C’est une telle approche plus respectueuse de la liberté d’expression des acteurs de la société civile qui a été adoptée par un courant jurisprudentiel récent.

Un attachement des juges du fond à la liberté d’expression

Deux jours après que soit prononcé l’arrêt de la Cour de cassation, soit le 24 mai 2012, la cour d’appel de Paris a rendu un arrêt indiquant que l’appel citoyen au boycott des produits israéliens ne constituait pas une infraction(23). Cet arrêt a été rendu à la suite d’un appel interjeté par le ministère public contre un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 8 juillet 2011(24). Le jugement avait considéré que l’appel au boycott des produits d’un État par un citoyen n’est pas punissable en droit français et avait ainsi relaxé la prévenue poursuivie pour avoir diffusé sur le site internet de son association une vidéo contenant des appels à ne pas consommer de produits israéliens en raison de la situation dans les territoires palestiniens. L’analyse du tribunal s’appuyait sur une distinction de bon sens entre l’interdiction de la discrimination économique et la protection de la liberté d’expression. L’arrêt de la cour d’appel de Paris reprend cette analyse et en tire les mêmes conséquences. Comme l’indique l’arrêt, « c’est […] à bon droit que le tribunal a jugé qu’en elle-même la mise en ligne d’une vidéo montrant une manifestation de quelques minutes durant laquelle des militants ont appelé les consommateurs d’une enseigne de la grande distribution à ne pas acheter des produits en provenance d’Israël et à soutenir un tel boycott pour des motifs politiques sur un sujet d’intérêt général […] qui mobilise depuis des années la communauté internationale […] en vue d’un règlement pacifique du conflit ne caractérise en aucun de ses éléments le délit de provocation à la discrimination, la haine ou la violence contre un groupe de personnes en raison de leur appartenance à une nation, en l’espèce Israël ». En effet, pour la cour, l’appel d’un citoyen au boycott des produits d’un État constitue une forme de « critique pacifique de la politique d’un État relevant du libre jeu du débat politique, qui se trouve, aux termes de la jurisprudence de la CEDH, au coeur même de la notion de société démocratique ». La pénalisation de l’appel au boycott constituerait donc une atteinte excessive à la liberté d’expression garantie par les articles 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme de 1950 et 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966. La cour d’appel adopte une motivation convaincante et concise, qui s’appuie sur celle claire et détaillée développée par le tribunal de grande instance de Paris. Le jugement rappelait, par exemple, l’ancienneté (depuis l’Espagne franquiste et l’Inde de Gandhi jusqu’à la campagne anti-française au Mexique en 2011) de la tradition de l’appel citoyen au boycott, sa diversité de formes (boycott de tous les produits, de certains types de produits ou de certains produits, contre des sommets internationaux, des évènements culturels ou des manifestations sportives)et la variété des États ciblés (des plus dictatoriaux aux plus démocratiques), sans que ces appels aient été jamais incriminés dans l’ordre des abus de la liberté d’expression. L’actualité récente permet d’ailleurs d’observer à quel point l’appel au boycott fait partie de notre tradition d’action politique, qu’il s’agisse de l’Euro 2012 de football organisé en Ukraine et boycotté par les ministres français eu égard à l’emprisonnement de l’opposante Ioulia Timochenko ou de l’appel lancé par Martine Aubry à boycotter le Mexique à la suite de l’affaire Florence Cassez(25).

En réalité, l’arrêt de la cour d’appel de Paris s’inscrit dans une tendance quasi-générale des juridictions du fond à refuser la pénalisation de l’appel citoyen au boycott et à relaxer les militants poursuivis : Paris(26), Mulhouse(27), Bobigny(28), Pontoise(29). Toutes ces juridictions du fond ont marqué leur attachement, d’une part, au principe de l’interprétation stricte du droit pénal et, d’autre part, à la liberté d’expression. Cet attachement est tout à fait logique s’agissant d’actions menées par des citoyens ou des ONG(30). Il s’inscrit pleinement dans la jurisprudence de la CEDH qui accorde à de tels acteurs et à « l’expression politique y compris sur des sujets d’intérêt général » un « niveau élevé de protection »(31). L’évaluation du caractère discriminatoire d’un appel au boycott ne peut se faire sans prendre pleinement en compte les objectifs poursuivis, en l’occurrence protester contre les violations du droit international par Israël(32). De tels appels au boycott participent incontestablement d’un débat public d’intérêt général. Ils entrent dans le cadre normal d’une liberté essentielle dans une société démocratique, à savoir le droit de s’exprimer librement sur des sujets politiques. On voit mal pourquoi cette forme d’action citoyenne pacifique doit être interdite par le droit pénal, dès lors que l’appel à la mobilisation n’invite pas à commettre des infractions pénales. Et on comprendrait mal que la France, terre des droits de l’homme et État promoteur du respect du droit international, se singularise par une politique répressive aussi inopportune que contraire aux grands principes du droit.

Mots clés :

DISCRIMINATION * Discrimination économique * Boycott * Liberté d’expression * Appel citoyen * Provocation à la discrimination

(1) Pour une explication détaillée des raisons et des modalités de cette campagne internationale : O. Barghouti, BDS contre l’apartheid et l’occupation de la Palestine, éd. La Fabrique, 2010 et www.bdsfrance.org.

(2) Cet appel a été lancé par 170 partis, organisations et syndicats palestiniens : « Nous, représentants de la société civile palestinienne, invitons les organisations des sociétés civiles internationales et les gens de conscience du monde entier à imposer de larges boycotts et à mettre en application des initiatives de retrait d’investissement contre Israël tels que ceux appliqués à l’Afrique du Sud à l’époque de l’apartheid ».

(3) L’appel énonce que « ces mesures de sanction non violentes devraient être maintenues jusqu’à ce qu’Israël honore son obligation de reconnaître le droit inaliénable des Palestiniens à l’autodétermination et respecte entièrement les préceptes du droit international en : 1. Mettant fin à son occupation et à sa colonisation de toutes les terres arabes et en démantelant le Mur ; 2. Reconnaissant les droits fondamentaux des citoyens arabo-palestiniens d’Israël à une égalité absolue ; et 3. Respectant, protégeant et favorisant les droits des réfugiés palestiniens à revenir dans leurs maisons et propriétés comme stipulé dans la résolution 194 de l’ONU ».

(4) Cet avis consultatif, rendu sur saisine de l’Assemblée générale des Nations unies, a déclaré le mur illégal au regard du droit international non en son principe mais en ce qu’il a été érigé en territoire palestinien occupé. L’avis rappelle également le caractère illégal au regard du droit international de la colonisation israélienne en Cisjordanie, en ce compris Jérusalem-Est.

(5) La colonisation israélienne dans les territoires palestiniens occupés et toutes les violations du droit international des droits l’homme qui en découlent ont été également déclarées illégales à plusieurs reprises par le Conseil de sécurité : par ex., les résolutions 446 du 22 mars 1979, 592 du 8 déc. 1986, 672 du 12 oct. 1990, 904 du 18 mars 1994, 1397 du 12 mars 2002 et 1544 du 19 mai 2004.

(6) Boycotter Israël, c’est lutter pour une paix juste, lemonde.fr, 17 nov. 2010.

(7) États-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, etc.

(8) La direction des affaires criminelles et des grâces a publié une directive appelant à la répression des campagnes de boycott de produits israéliens et enjoignant le ministère public d’« assurer une réponse cohérente et ferme à ces agissements » : Directive CRIM-AP, 12 févr. 2010, n°09-900-A4. Elle a été confirmé par la Directive CRIM-AP, 15 mai 2012, n° 2012-0034-A4.

(9) Bordeaux, 22 oct. 2010, G. Poissonnier, Une pénalisation abusive de l’appel citoyen au boycott, D. 2011. 931.

(10) Crim. 7 juin 2011, n° 10-88.315, D. 2011. 1763, obs. S. Lavric.

(11) C. pén., art. R. 635-1.

(12) Crim. 22 mai 2012, n° 10-88.315, D. 2012. 1405.

(13) Dans un lapsus sans doute involontaire mais qui illustre bien toute la complexité de la législation qui nécessite une étude approfondie, la Cour de cassation a indiqué dans le corps de l’arrêt du 22 mai 2012 que la militante avait été condamnée par la cour d’appel de Bordeaux « pour provocation à la discrimination raciale », ce qui est inexact. Cette erreur se retrouve également dans l’avis de l’avocat général qui évoque une « procédure suivie pour provocation à la discrimination raciale » (p. 1 de l’avis).

(14) En effet, la loi de 1972, qui transposait en droit interne la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 21 décembre 1965, avait pour objet, tout comme la Convention, de lutter contre toutes les formes de discrimination entre les êtres humains et pas de sanctionner l’appel à la discrimination consistant à entraver une activité économique.

(15) Conv. EDH, art. 7.

(16) C. pén,. art. 111-4.

(17) Motivation très claire en ce sens du TGI Mulhouse, 15 déc. 20011, deux jugements : 3309/2011 et n° 3310/2011, Gaz. Pal., 16 févr. 2012, n° 47, note G. Poissonnier ; D. 2012. 439, obs. G. Poissonnier.

(18) Crim. 28 sept. 2004, n° 03-87.450 ; Dr. pénal. 2005, comm. n° 4, obs. M. Veron.

(19) Crim. 18 déc. 2007, n° 06-82.245, Bull. crim. n° 312 ; D. 2008. 416 et 893, note S. Detraz ; ibid. 1719, chron. D. Caron et S. Ménotti ; ibid. 2009. 130, obs. T. Garé ; AJ pénal 2008. 140, obs. G. Roussel ; RTD com. 2008. 402, obs. D. Legeais ; AJDA 2008. 606 ; Gaz. Pal. 2 oct. 2008, H2256, note Y. Monnet.

(20) Rapport fait par M. Augustin Chauvet, Assemblée nationale, session ordinaire 1976-1977, n° 2925, 26 mai 1977, p. 9. La loi visait « plus particulièrement à donner aux entreprises les moyens de ne pas céder au boycott exercé par certains États étrangers et, en particulier à celui exercé par certains pays de la Ligue arabe contre les entreprises entretenant des relations commerciales avec Israël » : Rapport fait par M. Yvon Coudé de Foresto, Sénat, session ordinaire 1976-1977, n° 235, 5 avr. 1977, p. 60.

(21) Par ex. : CEDH 15 févr. 2005, Steel & Morris c/ Royaume-Uni, n° 68416/01, AJDA 2005. 1886, chron. J.-F. Flauss. Cet arrêt est pertinent au regard du problème posé, en ce que la Cour a jugé que la distribution par des militants de tracts à l’entrée d’un restaurant Mc Donald’s incitant les consommateurs à ne pas y manger était protégée par leur droit à exercer leur liberté d’expression sur des sujets d’intérêt général, comme celui, par exemple, de la qualité de l’alimentation ou du respect de l’environnement.

(22) Par ex. : CEDH 15 févr. 2005, Steel & Morris c/ Royaume-Uni, § 90 ; 7 nov. 2006, Mamère c/ France, § 20 CEDH, 7 nov. 2006, n° 12697/03, Mamère c/ France, D. 2007. 1704, note J.-P. Marguénaud ; RSC 2008. 140, obs. J.-P. Marguénaud et D. Roets ; 25 févr. 2010, Renaud c/ France, § 33.

(23) Paris, p. 2, ch. 7, 24 mai 2012, n° 11/6623, Gaz. Pal. 25-26 juil. 2012, note G. Poissonnier.

(24) TGI Paris, 8 juil. 2011, n° 0918708077, Gaz. Pal. 1er sept. 2011, I6928, note G. Poissonnier.

(25) Elle avait déclaré le 11 février 2011, après le rejet du pourvoi en cassation déposé par Florence Cassez devant la Cour suprême mexicaine : « Je propose dès maintenant aux collectivités locales dirigées par des socialistes de ne pas participer aux manifestations organisées dans le cadre de l’année du Mexique en France et d’annuler celles qui dépendent d’elle ».

(26) V. aussi : Paris, p. 2, ch. 7, n°11/05257, 28 mars 2012, sur appel d’un jugement du TGI de Créteil du 7 janvier 2011 : annulation de la procédure en raison de la nullité de la citation.

(27) TGI Mulhouse, 15 déc. 20011, préc.

(28) TGI Bobigny, 3 mai 2012, n° parquet 09-07782469 : relaxe des prévenus en application de la règle de l’interprétation stricte des textes pénaux.

(29) TGI Pontoise, 14 oct. 2010 : annulation des poursuites en raison de la prescription de l’action publique.

(30) Voir sur cet aspect les développements du jugement du TGI de Paris du 8 juill. 2011.

(31) CEDH 15 févr. 2005, Steel & Morris c/ Royaume-Uni, § 88 ; 25 févr. 2010, Renaud c/ France, § 33.

(32) La CEDH interprète la notion de discrimination en soulignant « qu’une distinction est discriminatoire si elle « manque de justification objective et raisonnable », c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un « but légitime » ou s’il n’existe pas de « rapport raisonnable de proportionnalité » entre les moyens employés et le but visé » (Chassanou et autres c/ France, 23 avril 1999, § 91). La définition du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale est également établie en ce sens (Recommandation générale XIV, Définition de la discrimination, article 1 (1), 22 mars 1993).

Ghislain Poissonnier, Magistrat

et François Dubuisson, Chargé de cours à l’Université libre de Bruxelles

AJ Pénal © Editions Dalloz 2012