Netanyahou exhorte Trudeau à condamner l’éventuelle investigation du CPI dans les présumés crimes de guerre israéliens

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a fait personnellement appel au Premier ministre Justin Trudeau pour qu’il condamne la Cour Pénale Internationale pour avoir engagé une étape importante en vue….

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a fait personnellement appel au Premier ministre Justin Trudeau pour qu’il condamne la Cour Pénale Internationale pour avoir engagé une étape importante en vue d’enquêter sur Israël pour de supposés crimes de guerre contre les Palestiniens.

La Procureure Générale du CPI, Fatou Bensouda, a annoncé la semaine dernière qu’il y a matière à investigation en Israël pour ses actions dans les territoires palestiniens occupés, et en particulier pour les frappes aériennes mortelles pendant la guerre de 50 jours contre Gaza en 2014, mais elle demande d’abord à la cour si elle a ici compétence.

La procureure aimerait aussi enquêter sur les tirs des Forces de Défense Israéliennes contre les manifestants palestiniens lors des manifestations du printemps 2018 à la frontière entre Gaza et Israël au cours desquelles le docteur palestinien-canadien Tarek Loubani a été blessé par un sniper israélien alors qu’il était en train de prodiguer des soins médicaux.

L’enquête officielle que Mme. Bensouda s’apprête à initier vérifierait aussi la possibilité de crimes de guerre du Hamas, groupe militant islamique qui dirige Gaza.

M. Netanyahou a condamné la décision de la procureure, disant qu’elle a transformé la Cour Pénale Internationale en « outil pour délégitimer l’État d’Israël » et a exhorté les alliés d’Israël à défendre fermement Jérusalem.

Dans une lettre du 20 décembre à Mr. Trudeau, obtenue par The Globe and Mail, le dirigeant israélien a dit de la décision de la procureure qu’elle était « infondée et scandaleuse ».

M. Netanyahou a dit que le CPI n’a pas compétence pour investiguer, arguant que les Palestiniens ne répondent pas aux critères qui définissent un Etat parce qu’ils n’ont pas de souveraineté sur des frontières définies. Il a écrit que la décision de la procureure perpétuera le conflit israélo-palestinien et ne contribuera pas à des négociations de paix.

« A la lumière de nos relations particulières et de la solide amitié qui lie nos deux pays, je vous exhorte à condamner publiquement cette décision erronée, à reconnaître qu’il n’y a pas d’État palestinien, que la cour n’a pas compétence en cette matière, qui comporte des questions politiques qui doivent être déterminées par les parties, et à exprimer votre profonde inquiétude concernant ses dangereuses conséquences pour la cour et la région », a écrit Netanyahou.

Le Secrétaire d’État américain Mike Pompeo a déjà condamné l’annonce de la cour, disant qu’il « cible injustement » Israël.

« Une décision comme celle-là, influencée par une manoeuvre palestinienne, transforme le CPI en arme politique pour faire une guerre politique contre les Etats démocratiques et, en ce cas, contre l’État d’Israël », a écrit M. Netanyahou dans sa lettre à M. Trudeau.

Le Bureau du Premier ministre n’a pas répondu à une demande de commentaires. Adam Austen, porte-parole du ministre des Affaires étrangères Philippe Champagne, s’est fait l’écho de la position d’Israël, mais n’a pas condamné Mme. Bensouda du CPI pour son initiative.

« La très ancienne position du Canada est qu’il ne reconnaît pas un Etat palestinien et qu’il ne reconnaît donc pas l‘accession d’un Etat de ce genre aux traités internationaux », a dit Mr. Austen.

Il a ajouté que le Canada « surveille l’examen de la situation par le CPI en Cisjordanie, y compris Jérusalem Est et la Bande de Gaza » et soutient la « création d’un Etat palestinien, vivant côte à côte avec Israël dans la paix et la sécurité, obtenu grâce à des négociations directes entre les parties ».

Quand Stephen Harper était premier ministre, le Canada a déposé une protestation officielle début 2015 auprès de Mme. Bensouda lorsqu’elle a parlé pour la première fois d’engager une enquête préliminaire sur de supposés crimes de guerre israéliens en Cisjordanie et à Gaza.

Irwin Catler, ancien ministre de la justice et président du Centre Raoul Wallenberg pour les Droits de l’Homme, a dit qu’il pensait que le CPI n’avait pas la compétence sur les territoires palestiniens parce que la condition préalable à cette compétence, c’est l’existence d’un Etat palestinien. « La route qui y mène passe par des négociations directes entre les parties », a-t-il dit.

Le docteur Loubani, qui est médecin urgentiste à London, Ontario, a dit que le Canada devait défendre la justice pour les civils palestiniens dont il dit qu’ils se font abattre par les soldats israéliens.

« La communauté internationale a failli à faire cesser par les voies habituelles l’assassinat et la mutilation de civils qui manifestent pacifiquement et, si le CPI peut permettre l’indispensable responsabilité dans le but d’atténuer ce qui se passe, alors je soutiens cela », a dit le docteur Loubani.

Israël n’est pas membre du CPI et n’accepte pas sa compétence, mais les Palestiniens sont reconnus comme Etat membre et ont sollicité l’enquête du CPI. Le processus de paix en panne a conduit les Palestiniens à utiliser le droit international pour faire rendre compte à Israël pour violation supposée des droits de l’Homme, dont l’expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie, contrôlée par l’Autorité Palestinienne.

On a donné 120 jours à un jury de trois magistrats de France, de Hongrie et du Bénin pour émettre son jugement sur le champ de compétence de la cour – décision qui sera vraisemblablement émise après les prochaines élections israéliennes.

Mohammad Eghnaim, président de l’association Communautaire Palestinienne, a dit que tout le monde devrait accueillir avec joie l’enquête du CPI, ajoutant qu’il attend de voir cela depuis « très longtemps ».

« Si le Canada pense que cette cour est juste et équitable, qu’il n’est sous l’influence d’aucun autre pays, qu’il recherche la vérité, qu’il recherche les faits … le Canada devrait résister fermement à toute oppression, quel que soit celui qui l’exerce », a-t-il dit.