Des militants pro-palestiniens protestent contre la tournée de l’orchestre de Philadelphie en Israël

Une critique sotto voce de la proche tournée de l’orchestre de Philadelphie en Israël a commencé il y a quelques semaines, mais elle a éclaté à grand bruit vendredi avec….

Une critique sotto voce de la proche tournée de l’orchestre de Philadelphie en Israël a commencé il y a quelques semaines, mais elle a éclaté à grand bruit vendredi avec une cinquantaine de manifestants qui se sont rassemblés devant le Centre Kimmel au moment où le public quittait la salle après un concert en matinée.

Les militants ont exhorté l’orchestre à annuler ses concerts à Haïfa, Tel Aviv et Jérusalem, en invoquant le traitement des Palestiniens par Israël de façon générale et en particulier les récentes actions des forces de sécurité israéliennes sur des manifestations à la frontière de Gaza, qui ont laissé plus de deux douzaines de Palestiniens morts et des centaines blessés.

« Débranchez l’Apartheid – « Pas de violon pour Israël » disaient les pancartes. Et un autre : « Des violons, pas de violence sioniste »

L’orchestre a dit qu’il ne modifierait pas sa tournée. « Absolument pas » a dit le président par intérim Ryan Fleur. « Nous avons été avertis lorsque nous avons commencé à nous préparer, qu’il y aurait des gens qui ne veulent pas que nous allions en Israël et que ces gens le feraient savoir, donc ce n’est pas une surprise pour nous ».

Les militants ont commencé à demander à l’orchestre d’annuler ses dates en Israël depuis quelques semaines ; ils ont dit que leurs demandes de rencontres ont été refusées.

« Un boycott culturel global a aidé à mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud et maintenant la société civile palestinienne a appelé les institutions culturelles internationales à ne pas se produire en Israël pour aider à faire pression sur Israël pour qu’il mette fin à sa politique d’occupation et d’apartheid » déclarait une lettre adressée au directeur musical Yannick Nézet-Séguin et à d’autres dirigeants de l’orchestre, au bas de laquelle étaient portées les signatures de dizaines de musiciens, ecclésiastiques, militants et d’autres de Philadelphie et de partout dans le monde.

Les organisateurs citent des artistes tels qu’Elvis Costello et Lorde qui ont annulé des concerts en Israël – pour certains dans le cadre de la campagne boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) – et les manifestants de Philadelphie font pression sur l’orchestre pour qu’il se joigne au mouvement.

Fleur dit que la visite de l’orchestre se situe dans une « diplomatie de peuple à peuple parce qu’Israël a beaucoup d’amoureux de la musique classique ». En plus de la valeur musicale des concerts, l’orchestre a dit que la visite l’aidera à se rapprocher de mécènes et donateurs juifs.

L’orchestre, a-t-il dit, ne fait pas de politique. « Nous ne prenons pas de positions politiques sur la Chine, sur Israël ou sur la Mongolie » pays où l’orchestre a aussi joué. « Dès que nous nous engageons dans un dialogue politique, nous perdons notre objectif » a-t-il dit.

Mais Susan Abulhawa, une écrivaine de Philadelphie qui représente le groupe de protestataires, a dit que l’orchestre, «fait du mal, par sa seule présence là-bas ». Ils prétendent que ce n’est pas une mission politique mais ils disent qu’ils vont célébrer le 70ème anniversaire d’Israël. Ils ont aussi prévu leur itinéraire en concertation avec le gouvernement israélien. Dans leur parcours, ils ont des rencontres avec des représentants haut-placés du gouvernement.

Abulhawa cite une réunion que l’orchestre a prévue avec Miri Regev, une politicienne israélienne controversée d’extrême droite, ministre de la culture et des sports. Le site internet de la fédération juive du grand Philadelphie, partenaire de l’orchestre pour le voyage en Israël, parle du démarrage de la tournée de mécénat qui accompagne l’orchestre par un dîner de bienvenue de shabbat auquel Regev et le maire de Tel Aviv, Ron Hudai, sont invités.

La tournée de mécénat comprend un groupe de donateurs, des membres du bureau, et des fans qui accompagnent l’ensemble pour les concerts mais qui ont leur propre programme d’activités pendant la journée. La tournée de mécénat mentionne pour le 3 juin une réception à déjeuner avec le président d’Israël, Reuven Rivlin, et d’autres dignitaires invités.

Naomi Adler, présidente et directrice générale de la fédération, a dit qu’aucun invité n’était confirmé pour le moment, et qu’il s’agissait d’une diplomatie consistant à parler aussi bien aux gens avec lesquels on est d’accord qu’avec ceux avec lesquels on ne l’est pas. « Le mouvement BDS essaie d’empêcher tout type de relation et nous croyons vraiment qu’il est essentiel pour des gens de toutes croyances et de toutes mentalités d’interagir avec Israël, pour apprendre ce qu’il se passe, pour arriver à connaître les gens » a dit Adler.

Cinquante mécènes environ se sont engagés à faire partie de la tournée, a-t-elle dit.

Un des signataires de la lettre exhortant l’orchestre à ne pas se rendre en Israël, le compositeur irlandais Raymond Deane, a dit dans un courriel que la présence d’artistes étrangers en Israël est destinée à « normaliser » ce qui est anormal, « c’est à dire l’oppression des Palestiniens… si l’orchestre de Philadelphie va en Israël en violation de l’appel palestinien au boycott, ce sera un pied de nez collectif aux opprimés ».

Fleur a noté qu’un groupe de musiciens de l’orchestre travaillera avec et se produira pour des élèves de Beit Amusica, une école de la ville israélienne de Shefa’amr.

La partie israélienne de la tournée de l’orchestre succède à des concerts en Europe et se termine à Jérusalem le 5 juin avec la Symphonie n°4 de Tchaïkovsky et la Symphonie n°2 de Bernstein pour piano et orchestre, une œuvre sous-titrée « L’Ère de l’Inquiétude ».