Le livre pour enfant « P pour Palestine » déclenche la colère de certains parents juifs américains

Le Dr. Golbarg Bashi dit qu’elle voulait écrire un abécédaire de comptines avec des tas de références à la Terre Sainte et à la culture palestinienne. Mais son livre risque d’être éclipsé par le tapage qui se développe à propos de l’index « I pour Intifada ».

Les abécédaires traditionnels pour enfants ont appris aux tout petits « A pour ami », « B pour bateau », « C pour chat ». Mais une nouveauté du genre cherche à apprendre aux enfants l’ABC de la culture palestinienne.

Le livre, intitulé « P pour Palestine » a été publié la semaine dernière et a rapidement créé de l’agitation parmi des parents juifs de New York s’il s’agit d’apprendre aux enfants « I pour Intifada ».

L’auteure, le Dr Golbarg Bashi, née iranienne, a fait la promotion de son livre et d’une lecture dans une librairie de quartier, par un post de la semaine dernière sur une page Facebook réservée à des mamans de New York.

Son post a reçu des réponses mécontentes de la part de femmes qui ont traité « P pour Palestine » de propagande antisémite et anti israélienne, une accusation, que Bashi refuse.

« L’accusation d’antisémitisme est très grave et ce n’est pas quelque chose que je prends à la légère » a-t-elle dit à Haaretz. « C’est un livre écrit d’un point de vue d’amour et non de haine. C’est un livre qui célèbre les Palestiniens et donne de la force à leurs enfants sans une once de ressentiment envers quelque autre peuple que ce soit, y compris les Israéliens.

Des commentaires postés dans le groupe Facebook sont anonymes mais le style s’est tellement échauffé que les modérateurs songent à fermer la page.

Des parents pro israéliens sont particulièrement furieux à cause du « I pour Intifada » dans le livre, une femme suggérant que si Bashi voulait favoriser la diversité, « ‘I’ aurait pu être mis pour Israël »

D’autres ont qualifié le livre de propagande à peine voilée visant l’esprit de jeunes enfants, une autre femme suggérant « Lavage de cerveau » pour « L ». D’autres encore sont en fureur du fait que les administrateurs de la page Facebook n’ont pas retiré ce qu’ils considèrent comme un post incendiaire qui n’a pas, selon eux sa place dans un groupe de soutien à des mamans.

Certains ont cité la Ligue Anti Diffamation dans leurs commentaires, espérant qu’elle agisse.

Bashi, qui est professeure d’histoire à l’Université Pace et qui vit à New York avec sa famille, a fondé un organisme d’éducation en 2013, « pour promouvoir une éducation progressiste pour la petite enfance, en diversifiant la littérature pour enfants » et pour renforcer les enfants à travers ce qu’elle décrit comme « une pédagogie ludique sur le genre et la conscience raciale ».

Son organisation a créé des pièces de bois qui représentent les lettre des alphabets perse et arabe (une version hébraïque vient d’être réalisée) et « P pour Palestine » est le premier livre d’une série prévue de livres pour enfants sur la diversité.

Il rejoint les rangs de livres pour enfants récemment publiés qui visent à transmettre en maternelle le type de progressisme et de politique sur l’identité courant sur les campus universitaires.

La décision de Bashi d’être l’auteure d’un livre pour enfants sur la Palestine vient de son enfance. Elle a passé ses premières années entre l’Iran du Sud et Londres, et sa famille a immigré en Suède quand elle était au collège.

Elle se souvient encore aujourd’hui des dsifficultés de sa scolarité itinérante.

« Ayant grandi en Suède en tant qu’enfant réfugiée, j‘ai un souvenir vivace de comment j’étais contrariée de ne pas trouver de matériel éducatif, de jouets ou de livres sur la partie du monde d’où je viens » a dit Bashi à Haaretz.

« Je viens d’une famille d’enseignants et l’alphabet est quelque chose qui semble être dans notre ADN » a dit Bashi. « Au cours des années, j’ai amassé une grande collection d’abécédaires, en particulier sur différentes parties du monde et j’ai été stupéfaite de découvrir qu’il n’y avait pas un seul abécédaire pour enfants en anglais, sur la Palestine ou la culture palestinienne ».

Le seul autre livre anglais connu sur la Palestine, dit-elle, c’est « Garçons et Filles du Proche Orient » de Bay Robinson et Florence Fremantile, publié en 1936.

Plutôt que de confier le projet à des éditeurs de livres pour enfants, Bashi s’est tournée vers LaunchGood, une plateforme de financement participatif centrée sur la communauté musulmane du monde entier, dans le but de lever 15 000 dollars (12 500 €) pour un premier tirage de 2000 exemplaires. L’appel a reçu des dons des États Unis, du Canada et d’Europe et le montant a été dépassé d’environ 900 dollars (750 €).

« Je me considère palestinienne de cœur » a dit Bashi et je voulais écrire et publier un livre qui était très nécessaire – un livre abécédaire de comptines classique, ludique, rempli de références à la Terre Sainte (Noël, Jésus Christ, Bethléem, Nazareth), à la cuisine palestinienne, à la danse, à la culture, à la géographie et au multiculturalisme de la région ».

Bashi a fait équipe avec un collègue iranien, l’illustrateur Golrokh Nafisi, pour l’iconographie du livre qui suit le modèle de ce qui se pratique pour des abécédaires en ce qui concerne le texte. Dans la version de Bashi, qui est parfois guindée, on trouve :« A comme Arabe, ma langue, qui est la quatrième plus chantée !» et « B comme Bethléem, ma ville natale qui a les meilleurs baklavas, mettez les sur une assiette, pas dans un vase ! ».

Le livre inclut d’autres éléments de la culture palestinienne (« D pour Dabke », « E pour Eid –Aïd ») mais il a provoqué la colère chez des mères new yorkaises à la suite d’une présentation et lecture du livre par Bashi dans une librairie de quartier, où elle raconte souvent aussi des contes persans.

Les pages les plus controversées du livre sont celles sur l’occupation israélienne : elles incluent, comme signalé plus haut, le « I pour Intifada, l’Intifada est le mot arabe désignant le soulèvement pour ce qui est juste, que vous soyez un enfant ou un adulte ! », avec une image d’une barrière de barbelés et « M comme Miftah (la clef du retour), la maman de ma maman et ma maman de Jiddah vers laquelle vont mes aspirations ! »

Bashi a dit qu’elle espère en la paix dans la région, mais elle a ajouté que « l’intifada est un aspect de la vie palestinienne tout comme Bethléem est le lieu de naissance de Jésus Christ. Porter une thob-robe palestinienne, préparer des plats palestiniens, célébrer des fêtes palestiniennes, protéger un olivier contre un bulldozer… sont des formes d’intifada ».

« C’est seulement dans l’esprit de ceux qui sont déterminés à diaboliser les Palestiniens que ce terme est associé à la violence – je suis contre toute forme de violence contre tout être humain » dit-elle.

Le livre a reçu des éloges anticipés de personnages controversés dont Linda Sarsour, une militante organisatrice de la Marche des Femmes et de Rachid Khalidi, professeur à l’Université Columbia, tous deux ayant été accusés d’antisémitisme.

Le mari de Bashi, Hamid Dabashi, qui est aussi professeur à Columbia, a également été récemment accusé de poster des commentaires antisémites sur Facebook à propos de Jared Kushner.

Dabashi a mentionné « les proches de Jared Kushner qui tuent et volent les Palestiniens » et il a traité le conseiller juif de la Maison Blanche de « bête ».

Le président de l’Université de Columbia, Lee Bollinger, a pris ses distances vis-à-vis des positions de Dabashi, dans une déclaration où il dit qu’il « veut se dissocier complètement de ces idées. Ce sont des choses scandaleuses à dire, de mon point de vue ».

Pour autant, Bashi dit que son livre se vend bien sur la page de son organisation sur le site de vente en ligne Etsy. « Il semble que nous nous acheminions vers une deuxième édition très prochainement » a-t-elle dit.

Bashi a dit qu’elle ne veut surtout pas que cette « soi-disant controverse » détourne des « autres projets joyeux et importants, c’est à dire la publication du premier abécédaire au monde sur la Palestine et la culture palestinienne en langue anglaise » qu’elle a appelé « un modeste pas vers la diversification de la littérature enfantine en Amérique et en anglais ».