Ramallah, 12 novembre 2025 — Des enfants palestiniens continuent de disparaître à Gaza lorsqu’ils vont chercher de la nourriture et de l’aide humanitaire au milieu du blocus israélien, selon la documentation collectée par l’association Defense for Children International – Palestine (DCIP).
De gauche à droite : Siraj Ismail Fayeq Abdel Aal, 16 ans, Mahmoud Jihad Hasan Abu Warda, 14 ans, Saadi Mohammad Saadi Hasanain, 16 ans, Jamal Nihad Jamil Ayyad, 13 ans, Haitham Mohammad Jamil Al-Masri, 17 ans, et Saifan-Allah Fahd Awni Ayash, 16 ans. Photos familiales.
Au cours des derniers mois, DCIP a documenté que six enfants palestiniens supplémentaires ont disparu à Gaza : Siraj Ismail Fayeq Abdel Aal, 16 ans, Mahmoud Jihad Hasan Abu Warda, 14 ans, Saadi Mohammad Saadi Hasanain, 16 ans, Jamal Nihad Jamil Ayyad, 13 ans, Haitham Mohammad Jamil Al-Masri, 17 ans, et Saifan-Allah Fahd Awni Ayash, 16 ans.
« Les forces israéliennes font disparaître les enfants palestiniens en profitant de la famine et du siège », a déclaré Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme de responsabilisation à DCIP. « Des familles cherchent leurs enfants, sans réponses, tandis qu’Israël continue à cacher les identités et les emplacements des détenus de Gaza ».
Saadi, 16 ans, a disparu le 22 octobre 2025, après être entré dans la zone incluant sa maison détruite afin de rassembler quelques affaires et du bois. Saadi et quatre autres sont allés sur le site peu après le retrait des forces israéliennes de l’endroit. Des témoins ont rapporté que des drones israéliens ont ouvert le feu, forçant le groupe à s’éparpiller. Deux des garçons se sont échappés, tandis que Saadi et un autre garçon sont restés derrière. Le matin suivant, sa famille a trouvé le téléphone de Saadi, ses chaussures et son pantalon, ainsi que sa chemise entourant le corps du garçon avec qui il fuyait. La tête du garçon était écrasée. Sa famille n’a reçu depuis aucune information sur l’endroit où il se trouve, et ils craignent qu’il ait été pris par les forces israéliennes.

« Je crois que mon fils a choisi de ne pas abandonner son ami blessé, qui saignait et qu’il a essayé d’aider, mais les forces israéliennes les ont pris par surprise et ont emmené mon fils », a dit la mère de Saadi. « Je ne peux pas comprendre pourquoi c’est arrivé. »

Jamal, 13 ans, a disparu le 6 octobre 2025, après avoir quitté sa maison autour de midi. Jamal et sa famille avaient été déplacés à cause des attaques militaires israéliennes intensifiées et Jamal voulait retourner dans la ville de Gaza. Ce matin-là, après une dispute avec son frère, Jamal a quitté sa famille et il n’est pas revenu. Plus tard ce jour-là, un parent a rapporté l’avoir vu près de Tabat al-Nwairi, portant un petit sac avec des affaires personnelles et se dirigeant vers la ville de Gaza, malgré les blocages des routes et les hostilités en cours. Sa famille a cherché dans les hôpitaux, les morgues, et les centres de déplacement dans tout Gaza, mais n’a trouvé aucune trace de lui. Le lieu où se trouve Jamal reste inconnu, et sa famille craint qu’il aurait pu être arrêté par les forces israéliennes en essayant de retourner dans la ville de Gaza.

Saifan-Allah, 16 ans, a disparu le 7 juin 2025, peu après avoir participé à la prière de midi avec son père. La famille a cherché partout mais n’a pas pu le localiser. Saifan souffre d’épilepsie, a besoin de médicaments régulièrement et a des capacités mentales limitées, ce qui rend sa disparition particulièrement inquiétante. Le soir suivant, le père de Saifan a reçu un appel d’un homme s’identifiant comme membre du renseignement israélien, qui a confirmé que Saifan avait été arrêté car il serait entré dans une zone à accès restreint. Le père a plaidé son cas en expliquant les conditions de santé, médicales et mentales, de Saifan, mais l’homme a mis fin à la conversation, en disant seulement que « l’armée allait s’en occuper ». Le jour suivant, la Croix rouge a informé la famille que Saifan était détenu dans la prison Asqalan, bien qu’aucune autre information n’ait été donnée. Depuis, le famille n’a reçu aucune nouvelle information sur sa condition ou le lieu où il se trouve.

Mahmoud, 14 ans, originaire de Deir al-Balah, a disparu le 4 juillet 2024, après avoir quitté sa maison pour retourner au nord de Gaza. Déplacé de Jabalia à cause des attaques israéliennes, Mahmoud a eu du mal à s’adapter au déplacement et il aspirait à retrouver les membres de sa famille qui restaient au nord, dont un frère qui a plus tard été tué. Le jour où il a disparu, Mahmoud a dit à sa mère qu’il voulait retourner chez lui, mais ses parents ont rejeté le projet comme improbable à cause du danger extrême le long du couloir Netzarim. Malgré des recherches étendues dans les hôpitaux, les morgues et les centres de déplacement, la famille de Mahmoud n’a trouvé aucune trace de lui. Récemment, des détenus palestiniens ont rapporté avoir vu Mahmoud en vie dans une prison israélienne, bien que les autorités israéliennes n’aient fourni aucune information concernant sa détention ou le lieu où il se trouve.
Sa mère a ajouté : « Je porterai son sac de vêtements avec moi chaque fois que nous sommes déplacés, en espérant qu’il reviendra. »

Siraj, 16 ans, a disparu le 22 juin 2024, après avoir quitté son abri temporaire pour collecter du bois. Déplacé lors des attaques israéliennes en cours, Siraj a rejoint trois membres de sa famille cherchant à retourner vers la ville de Gaza à travers champs pour éviter les forces israéliennes. Vers 6 heures du soir, les tanks israéliens ont ouvert le feu sur le groupe, tuant un garçon et blessant d’autres. Seul le cousin de Siraj, Tawfiq a survécu et a été plus tard relâché après une brève détention. Malgré des recherches étendues, aucun corps n’a été trouvé. Des mois plus tard, plusieurs proches détenus par les forces israéliennes ont rapporté avoir entendu le nom de Siraj dans la prison Ofer, indiquant qu’il pourrait être détenu dans une prison israélienne. Plus d’un an après sa disparition, sa famille n’a toujours reçu aucune information sur le lieu où il se trouve.

Haitham, 17 ans, a disparu depuis près de deux ans, le 10 février 2024, après avoir quitté un abri de déplacement pour traverser la ville via le checkpoint Netzarim qui sépare la Bande de Gaza en deux sections. Sa famille a cherché dans les hôpitaux, les morgues et les organisations humanitaires, mais n’a reçu aucune information. Près de deux ans plus tard, les détenus relâchés ont dit au père de Haitham que son fils était détenu dans la prison Naqab.
« Je lutte psychologiquement », nous a dit son père. « J’ai souffert de deux AVC récemment ; l’un a touché ma jambe. J’ai été admis au complexe médical Nasser. Ma femme est extrêmement bouleversée. Ces AVC sont un résultat de toute la situation. Comment mon fils peut-il être avec moi à un moment et simplement s’évaporer ? Je suis rempli de désespoir et je me sens perdu. Ce n’est qu’un enfant. Il n’est pas impliqué dans quoi que ce soit de cela. »
Les disparitions de ces enfants font partie d’un schéma plus large documenté par DCIP pendant toute l’année 2025, alors que le chaos et les déplacements de masse dans tout Gaza ont laissé des familles sans aucune information sur le bien-être ou le lieu où se trouvent leurs proches. Les forces israéliennes ont détenu arbitrairement des centaines de Palestiniens, y compris des enfants, sans accusation, ni procès, ni notification à leurs familles. Des parents cherchant leurs enfants sont laissés dans l’angoisse, ne recevant ni information, ni confirmation, de la part des autorités israéliennes indiquant si leurs enfants sont vivants et où ils sont détenus.
Selon le droit international, la disparition forcée et la détention arbitraire des enfants sont des actes prohibés, qui peuvent équivaloir à des crimes contre l’humanité. Les actions d’Israël violent aussi ses obligations selon la Convention sur les droits de l’enfant, dont l’article 37, qui exige que la détention d’un enfant ne soit utilisée qu’en dernier recours et l’article 9, qui garantit que les enfants ne doivent pas être séparés de leurs parents contre leur volonté et doivent être autorisés à maintenir un contact régulier avec eux.
La disparition forcée des enfants palestiniens au milieu du blocus en cours et des attaques d’Israël reflète l’érosion totale des mécanismes de protection internationaux. Aussi longtemps qu’Israël continue à agir en toute impunité, les familles palestiniennes resteront prises au piège de l’incertitude, cherchant sans fin leurs enfants disparus.
