Gaza peine à identifier les corps rapatriés par Israël

A la date d’hier, Israël avait rendu 195 corps à la Bande de Gaza, mais seuls 57 avaient été identifiés par leur famille. Un médecin de Gaza a décrit certains cadavres revenus les mains liées ou avec une balle tirée à bout portant dans la tête ou la poitrine, tandis qu’un d’entre eux avait une corde autour du cou.

Seules 57 familles palestiniennes avaient identifié les corps sur les 195 qu’Israël avait rapatriés à Gaza jusqu’à mercredi sous cessez-le-feu, d’après le ministère de la Santé de Gaza. Six corps portaient des numéros d’identification militaires et des numéros d’identité, mais des tests ont montré que trois ne concordaient pas et trois autres sont encore en cours d’examen, a dit une source palestinienne à Haaretz.

Aucun des autres ne porte de détails d’identification ni sur les circonstances et le lieu de la mort. Les FDI ont fourni les tests ADN pour 90 corps, mais l’équipement pour faire les tests correspondants et trouver des membres de la famille n’est pas disponible à Gaza. Un site spécial a été dédié à Deir al-Balah à l’enterrement des corps non identifiés rapatriés ces deux dernières semaines. Cinquante-quatre corps y ont été enterrés mercredi lors d’une cérémonie spéciale, chacun dans sa propre tombe.

Le septième rapatriement a eu lieu mercredi, quand davantage de cadavres de Palestiniens ont été rendus grâce à la Croix Rouge, après le retour en Israël des corps d’Arye Zalmanovich et de Tamir Adar de Nir Oz. Les corps des Palestiniens, qu’Israël conservaient en chambre froide, ont été transférés à l’Hôpital Nasser de Khan Younis dans des camions frigorifiques commerciaux.

En même temps, les familles des personnes manquantes sont allées à l’hôpital pour voir les photographies des corps sous différents angles, projetées sur un écran dans le hall de l’hôpital. Et on demande à toutes les familles de fournir à l’équipe médicale de l’hôpital 10 signes d’identification de leurs fils.

Une personne présente à l’hôpital mardi dernier a dit à Haaretz que, lors des premiers transferts, les représentants d’environ une centaine de familles sont arrivées à chaque fois dans l’espoir d’identifier leur fils – mardi, seules 10 sont arrivées et seule une famille a identifié son fils. On pense que, dans de nombreux cas, les parents adultes qui pouvaient identifier les corps ont été tués dans les bombardements ou sont morts de maladie ou de faim au cours des deux dernières années.

Le Bureau du Porte-parole des FDI a dit à Haaretz : « Tous les cadavres renvoyés [à ce mercredi] venaient de combats sur le territoire de la Bande de Gaza et n’étaient pas des détenus emmenés vivants en Israël. »

Mais d’après les Palestiniens, certains corps sont ceux de personnes qui ont participé à l’attaque du 7 octobre par le Hamas. Une famille qui a identifié son fils mardi a dit que, d’après tout ce qu’ils savent, il a été blessé et détenu au centre de détention de Sde Teiman ; ils en ont conclu qu’il avait été arrêté en Israël. Jusqu’ici, la famille pensait qu’il était vivant.

Mardi, le Dr. Ahmed Dheir, pathologiste et directeur du département de médecine légale, a rencontré des représentants des organisations de la société civile à l’Hôpital Nasser. Il leur a parlé de la condition générale des cadavres : certains portaient des uniformes militaires et d’autres des vêtements civils. Certains corps sont arrivés nus. Certains avaient les mains liées derrière le dos, et l’un d’entre eux avait une corde autour du cou. Certains corps avaient les yeux bandés. Certains portaient des signes de tirs à bout portant à la poitrine ou à la tête, et d’autres avaient des blessures d’éclats d’obus. Certains étaient encore couverts d’un mélange de sang et de saleté.

Bien que les corps soient arrivés congelés, certains avaient commencé à se décomposer. On a assuré aux participants assemblés qu’un rapport complet, assorti de photographies, serait préparé plus tard, avec des détails sur la condition de chaque corps. Le Dr. Dheir a souligné qu’il décrivait ce qui était visible extérieurement, et non la cause de la mort.

En se fondant sur l’apparence des cadavres, d’autres sources du ministère palestinien de la Santé à Gaza ont conclu que ces gens avaient été maltraités, torturés et exécutés en captivité.

Le Bureau du Porte-parole des FDI a dit à Haaretz : « La prétention que les FDI auraient profané les corps post-mortem est mensongère et sans fondement. » Et il a ajouté : « La prétention que les FDI ont attaché les corps avant de les rendre à la Bande de Gaza est mensongère », bien qu’on prétende le contraire : les gens ont été tués alors qu’ils étaient attachés et vivants. Le Bureau du Porte-parole des FDI a refusé de répondre à la question d’Haaretz en réponse à la déclaration des Palestiniens disant que les FDI avaient capturé ces gens vivants pour les exécuter.

L’un des participants à cette réunion a demandé au Dr. Dheir si des organes avaient été retirés des corps, à quoi il a répondu que non. Il a dit mardi à la télévision palestinienne qu’un examen a révélé qu’une opération avait été pratiquée sur l’une des personnes et qu’une opération post-mortem avait été pratiquée sur une autre. Une source civile palestinienne a dit à Haaretz qu’un des corps présentait des signes laissés par une véhicule pesant roulant sur lui et qu’un autre avait été brûlé.

Le Guardian et CNN ont rapporté qu’au moins certains des corps rapatriés portaient des étiquettes avec des numéros  (mais pas de noms), du centre de détention Sde Teiman dans le Neguev ; il y a eu quantité de rapports sur des détenus qui y sont morts sous la torture ou de négligence médicale. En mai 2024, Haaretz a rapporté qu’une enquête de la Police militaire a découvert que des soldats avaient battu à mort deux prisonniers qui avaient été amenés de Gaza au centre de détention.