Muin Ghassan Fahed Salahat. Avec l’aimable autorisation de la famille Salahat

Ramallah, le 4 mars 2025 – Conformément à un ordre de détention administrative, les forces israéliennes ont arrêté un jeune Palestinien de 14 ans en Cisjordanie occupée.
Les forces israéliennes ont arrêté Ghassan Fahed Salahat, âgé de 14 ans, chez lui à Beit Fajjar, au sud de Bethléem en Cisjordanie occupée, le 19 février au cours d’un raid avant l’aube, et ont émis contre lui le 2 mars un ordre de détention administrative de quatre mois, d’après les renseignements récoltés par Défense des Enfants International – Palestine (DCIP). Il s’agit du plus jeune enfant palestinien faisant l’objet d’un ordre de détention administrative depuis que DCIP a commencé à contrôler en 2008 la détention administrative des enfants.
« La détention administrative viole les droits fondamentaux de la défense, et pourtant, les forces israéliennes se mettent à étendre cette politique draconienne pour arrêter des enfants palestiniens indéfiniment, sans charge ni procès », a dit Ayed Abu Eqtaish, directeur du programme des responsabilité à DCIP. « Le cas de Muin crée un dangereux précédent, montrant qu’aucun enfant palestinien, quel que soit son âge, n’est à l’abri d’un emprisonnement arbitraire selon le régime militaire israélien. »
Muin, élève de troisième et unique enfant de sa famille, a été placé sous détention administrative, pratique par laquelle les autorités israéliennes arrêtent les Palestiniens, y compris des enfants, sans charge ni procès, en se fondant sur des « preuves secrètes » que ni les détenus ni leur avocat ne peuvent consulter.
Les soldats israéliens ont pénétré de force chez Muin à 3 H.40 du matin le 19 février. Le père de Muin a été immédiatement arrêté, les yeux bandés et les mains attachées derrière le dos. Quand Muin s’est réveillé et est allé chercher son père, les soldats israéliens l’ont attrapé et ont commencé à fouiller la maison.
La famille n’a pas reçu de mandat d’arrêt et on leur a dit de ne pas bouger tandis que les soldats endommageaient leurs biens et confisquaient les téléphones et un ordinateur.
Les soldats ont tenté de bander les yeux de Muin et de lui attacher les mains derrière le dos tout en l’emmenant. Après quoi, un soldat a averti le père de Muin qu’il ne devait pas bouger pendant au moins dix minutes.
La détention de Muin est prévue du 2 mars au 18 juin 2025 et sera réexaminée sous 12 jours par un tribunal militaire israélien, changement significatif par rapport à la politique antérieure au 7 octobre 2023 quand ces examens étaient menés dans un délai de quatre jours. Un ordre de détention peut être émis plusieurs jours après l’arrestation de l’enfant, retardant d’autant tout examen procédural.
Au 31 décembre 2024, les forces israéliennes ont arrêté 112 enfants palestiniens en détention administrative, d’après les renseignements partagés par le Service Carcéral d’Israël, chiffre le plus élevé d’enfants détenus depuis que DCIP a commencé à contrôler ce chiffre en 2008.
L’utilisation routinière par Israël de la détention administrative contre les Palestiniens, y compris les enfants, constitue une détention arbitraire et viole le droit international des droits de l’homme. En plus, la Quatrième Convention de Genève interdit strictement à une puissance occupante de transférer de force ou d’emprisonner illégalement des personnes protégées, faisant de la pratique d’Israël une violation évidente de ses obligations légales.
Priver arbitrairement les enfants palestiniens de leur droit à la liberté en utilisant la détention administrative, emprisonnement d’individus pour des périodes prolongées sans charges ni procès, en se fondant souvent sur des preuves secrètes, correspond à une détention arbitraire.
Les autorités israéliennes ont imposé de sévères restrictions aux avocats qui essaient de conseiller ou de rendre visite aux détenus palestiniens, y compris les enfants, détenus dans les prisons israéliennes depuis le 7 octobre 2023. Les représentants juridiques se voient souvent opposer des refus d’accès, des délais arbitraires, des obstacles bureaucratiques, rendant presque impossible la possibilité d’une défense appropriée. En plus, les tribunaux militaires israéliens s’appuient régulièrement sur ces ‘preuves secrètes’ que ni le détenu ni son avocat ne peuvent connaître, privant efficacement les prisonniers palestiniens de leur droit à un procès équitable. Dans de nombreux cas, les enfants palestiniens emprisonnés en détention administrative passent des semaines sans voir un avocat, aggravant le cycle de l’emprisonnement arbitraire et de l’impunité.
Les ordres de détention administrative sont émis par le commandant israélien de la zone, ou un officier délégué par ce commandant, et peuvent durer jusqu’à six mois, mais il n’y a pas de limites au nombre de fois où un ordre de détention administrative peut être renouvelé. Les ordres sont approuvés par les juges du tribunal militaire, donnant l’illusion d’un contrôle juridique indépendant, et pourtant, les tribunaux militaires israéliens ne respectent pas les normes internationales au sujet de l’indépendance et de l’impartialité parce que les juges des tribunaux militaires sont des officiers d’active ou de réserve dans l’armée israélienne.
En octobre 2015, après une suspension de trois ans de cette pratique, les autorités israéliennes ont commencé à arrêter et à emprisonner sans charge des enfants palestiniens en vertu d’ordres de détention administrative.
La détention administrative n’est autorisée que dans des circonstances strictement limitées et seulement dans les cas les plus exceptionnels pour « raisons impératives de sécurité » lorsqu’il n’y a pas d’autre alternative. Cette pratique ne devrait jamais être utilisée comme une alternative au dépôt de plainte ou comme moyen de dissuasion générale pour toute activité future.
Les normes internationales concernant la justice des mineurs, qu’Israël s’est engagé à mettre en place en ratifiant en 1991 la Convention de l’ONU sur les Droits de l’Enfant, exigent que les enfants ne soient privés de leur liberté qu’en dernier ressort et qu’ils ne doivent pas être arrêtés illégalement et arbitrairement.
Israël jouit de la douteuse distinction d’être le seul pays au monde qui poursuit systématiquement tous les ans entre 500 et 700 enfants dans des tribunaux militaires, tout en les privant systématiquement du droit fondamental à un procès équitable.