L’ONU découvre qu’Israël a fait des douzaines de morts dans les écoles de Gaza mais évite de demander qu’il rende des comptes

Une commission d’enquête officielle a découvert qu’Israël avait tué et blessé des centaines de Palestiniens dans les sept attaques sur les écoles de l’ONU dans la Bande de Gaza l’été….

Une commission d’enquête officielle a découvert qu’Israël avait tué et blessé des centaines de Palestiniens dans les sept attaques sur les écoles de l’ONU dans la Bande de Gaza l’été dernier.

Le Secrétaire Général de l’ONU Ban Ki-moon a envoyé lundi un résumé de ce rapport au Conseil de Sécurité. Mais il y avait un manque notoire dans sa lettre d’accompagnement du rapport, l’absence de demande de prise en compte de la responsabilité d’Israël dans les atrocités qu’il énumère.

« Je déplore qu’au moins 44 Palestiniens aient été tués à la suite des actions israéliennes et au moins 277 blessés dans les locaux des Nations Unies utilisés comme abris d’urgence », écrit Ban.

Chris Gunness, porte-parole de l’UNWRA, agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens qui gérait ces abris, a envoyé un tweet pour dire que son organisation « accueille favorablement » ce rapport et « étudierait » ses recommandations.

Mais en renonçant à nouveau à demander la prise en compte de ces attaques par ceux qui les ont perpétrées, Ban est presque sûr qu’Israël tuera à nouveau – à la fois des civils palestiniens et du personnel de l’ONU.

Ce n’est pas la peine de spéculer à ce sujet ; Ban note dans sa lettre que c’est la deuxième fois qu’il est amené à demander une enquête à propos d’attaques israéliennes sur les écoles et locaux de l’ONU à Gaza.

Le rapport précédent sur les attaques israéliennes de 2008-2009 n’a entraîné aucune conséquence ni responsabilité pour Israël, le laissant libre de conduire des attaques encore plus brutales.

L’été dernier, plus de 2.200 Palestiniens ont été tués pendant les 51 jours de bombardements aériens et d’assaut terrestre par Israël.

Israël savait où étaient les écoles

Le rapport fait le récit des attaques, dans les régions du nord, du centre et du sud de Gaza, sur sept écoles gérées par l’UNWRA entre le 21 juillet et le 26 août 2014. En aucun cas il n’y eut la moindre évidence crédible qui puisse justifier, de près ou de loin, des attaques sur des lieux connus pour abriter des civils.

Il confirme que le personnel de l’ONU a régulièrement informé les autorités militaires israéliennes sur l’emplacement exact de toutes ses installations, y compris les mises à jour biquotidiennes sur les coordonnées GPS de chaque local utilisé en tant qu’abri.

Et pourtant, Israël a lancé des attaques directement sur les écoles. Le 21 juillet par exemple, le bombardement a redoublé à proximité de l’Ecole Préparatoire de filles Maghazi gérée par l’UNWRA au centre de Gaza. L’UNWRA a poussé les personnes qui avaient trouvé un abri dans l’école à aller vers une autre école qu’ils estimaient être dans une zone plus sure.

Beaucoup avaient obéi tard dans l’après midi, mais des centaines étaient restés dans l’école lorsque, vers 16 H.50, « le toit de l’école a été frappé par un tir direct » d’un tank de l’armée israélienne, blessant un homme et un enfant.

Le résumé de Ban dit qu’« aucun des témoins interrogés par l’UNWRA n’avait eu connaissance de la présence de quelque groupe activiste que ce soit, dans l’école ou dans son voisinage ».

La commission d’enquête remarque que l’école était tout le temps bien gardée et que toute personne qui y entrait était enregistrée.

Et cependant, le résumé déclare qu’Israël a prétendu que son armée « avait identifié une présence significative d’ennemis dans les environs et apparemment aussi à l’intérieur de l’école ».

Dès le lendemain, l’ONU a organisé une plage de deux heures avec Israël, afin que ses experts puissent examiner les dégâts sur l’école.

Alors qu’un expert était sur le toit vêtu d’un gilet clairement identifiable, l’école a de nouveau été frappée par deux tirs de mortier. Le membre de l’équipe a couru et a pu s’échapper sans blessure, mais l’école a subi des dégâts supplémentaires.

A l’appui de photographies des restes d’explosifs fournis par l’ONU, les experts en munitions de l’armée israélienne ont déclaré que ces munitions pouvaient être du style de celles utilisées par le Hamas.

Mais la commission d’enquête « a cependant trouvé que l’école avait été frappée par des tirs de mortier de 81 millimètres tirés par les FDI (armée israélienne) » est-il dit dans le résumé.

Attaques préméditées

D’autres incidents documentés par le rapport et décrits dans le résumé ne laissent aucun doute sur le fait que les attaques sur les écoles étaient préméditées.

Le 24 juillet par exemple, « le Bureau Local de l’UNWRA à Gaza a reçu un appel d’un officier de terrain des FDI indiquant que les FDI allaient viser un groupe de quatre autres écoles de Beit Hanoun, à 800 mètres d’une Ecole Elémentaire Mixte ‘A’ et ‘D’ au nord de Gaza.

Les fonctionnaires locaux se sont immédiatement mis à évacuer l’école élémentaire, située dans une zone déclarée « zone tampon » par Israël, avec l’aide de l’UNWRA et du Croissant Rouge. Les civils hébergés se sont réunis dans la cour pour attendre l’évacuation.

A environ 15 H, l’école a été frappée par un tir d’artillerie : « Au moins deux projectiles de 120 millimètres hautement explosifs ont frappé l’école, l’un au milieu de la cour de l’école et le deuxième sur les marches de l’entrée de l’école. 12 à 14 résidents on été tués et 93 blessés, dont quelques uns gravement. »

« La commission a conclu que cet incident était attribuable aux FDI », confirme le rapport.

Selon le rapport, Israël a admis qu’il y avait « matière à suspecter raisonnablement l’incident comme pouvant impliquer une déviation par rapport aux règles des FDI » et qu’il avait entrepris le lancement « d’une enquête criminelle ».

Mais huit mois plus tard, aucune accusation n’a été annoncée et, si l’on se fonde sur une longue pratique, il y a peu de raisons d’attendre qu’Israël se tienne pour responsable.

Missile Spike

Le 21 juillet à environ 1 H.30 du matin, sept personnes ont été blessées lorsqu’un projectile a frappé un bâtiment où dormaient des douzaines de personnes dans l ‘Ecole Préparatoire de Filles Zaitoun « B » gérée par l’UNWRA dans un quartier surpeuplé de Gaza Cité.

Israël déclara qu’il « n’avait pas été possible d’identifier à la date en question aucune opération des FDI pouvant être liée à l’incident, y compris aucune frappe aérienne sur l’école ou son voisinage ».

Mais la commission d’enquête a trouvé de son côté que « l’école avait été frappée par un missile, peut-être un missile ‘Spike’, dans un raid aérien par les FDI ».

Le Spike, fabriqué par la société israélienne d’armement Rafael, est commercialisé en tant que missile sophistiqué destiné à « frapper sa cible à son point le plus vulnérable avec une précision remarquable ».

Le massacre de l’école de Jabaliya

Au plus fort de l’attaque israélienne sur Gaza, des centaines de milliers de personnes ont été déplacées de chez elles. Le 30 juillet, plus de 3.000 d’entre elles avaient trouvé abri à l’Ecole Elémentaire de Filles « A » et « B » de Jabaliya gérée par l’UNWRA, située dans une zone extrêmement urbanisée du camp de réfugiés de Jabaliya.

La commission d’enquête a confirmé que l’école est entourée d’un mur de trois mètres de haut, n’a qu’une entrée et est strictement gardée pour empêcher toute intrusion non autorisée. « Les armes étaient interdites à l’intérieur de l’école et les témoignages répondant aux questions de la commission ont confirmé que cette règle fut strictement observée », relate le résumé.

Alors qu’il n’y avait aucun combat dans la zone de l’école, tôt le 30 juillet, « l’école a été frappée par un tir de barrage de quatre projectiles hautement explosifs de 155 millimètres », tuant entre 17 et 18 personnes, dont un garde de l’ONU et son fils, et en blessant 99 autres.

« La commission a découvert que l’incident était imputable aux actions des FDI », dit le rapport, « et que le gouvernement d’Israël n’avait donné aucun avertissement préalable au tir de projectiles de 155 millimètres hautement explosifs sur l’école ou ses environs. »

Stockage d’armes dans des écoles de l’ONU

Le rapport n’établit pas le bien-fondé de déclarations fréquentes comme quoi les écoles de l’UNWRA seraient régulièrement utilisées par les résistants pour stocker des armes ou des activités militaires.

Il a étudié trois incident dans lesquels on a trouvé des armes stockées dans des écoles désaffectées de l’UNWRA et a déterminé que l’UNWRA agissait très vite pour s’en occuper. Contrairement aux déclarations israéliennes de l’époque, en aucun cas l’ONU n’a remis ces armes au Hamas.

La lettre de Ban déclare qu’à deux occasions, les combattants palestiniens auraient « probablement » utilisé des armes de locaux désaffectés.

Etant donné la situation catastrophique de Gaza, et du fait du manque de personnel et de moyens financiers de l’agence onusienne contre lequel elle se bat pour faire face à l’urgence humanitaire massive, le rapport a déclaré qu’il n’aurait pas été possible d’assurer une sécurité absolue dans les locaux désaffectés.

Malgré cela, l’UNWRA a organisé des inspections quotidiennes dans ses centaines de bâtiments désaffectés afin de s’assurer qu’ils n’étaient pas utilisés pour des activités armées.

Dans l’une des écoles où avait été trouvé un mortier, les gardes de l’ONU ont dû fuir à cause de « circonstances entraînant un danger de mort » dans la zone.

Aucune demande de responsabilité ou de justice

Le résumé fait par Ban du rapport complet non publié de 207 pages énumère quelques unes des recommandations de la commission d’enquête à la fois pour l’UNWRA et pour Israël.

La teneur semble être qu’Israël et l’ONU devraient travailler ensemble pour rendre les attaques israéliennes sur Gaza simplement un peu plus coordonnées.

La seule mention de « responsabilité » se rapporte au personnel de l’ONU, pas à Israël qui a été trouvé responsable de toutes les attaques sur les écoles.

Le mot de justice n’apparaît pas du tout.

L’ONU devrait publier le rapport complet afin que ce qui a été découvert ne soit pas filtré par un secrétaire général qui est largement perçu, par les Palestiniens et les défenseurs internationaux des droits de l’Homme comme trop désireux de s’incliner devant les pressions israéliennes.

Dans les semaines à venir, Ban doit décider s’il ajoute l’armée d’Israël à une liste officielle de l’ONU de ceux qui violent gravement les droits des enfants.

A la lumière des découvertes de cette enquête, sa décision sera parlante.