« Nus », « yeux bandés » et « attachés à leurs lits »… Un médecin alerte sur les conditions de détention de prisonniers palestiniens dans une prison israélienne

Selon plusieurs ONG de défense des droits de l’homme, le camp de prisonniers palestiniens de Sde Teiman, dans le désert du Néguev, est comparé à Guantanamo. Un médecin, qui a pu s’y rendre quelques semaines après le début de la guerre entre Israël et le Hamas, raconte ce qu’il a vu.

Les yeux bandés, les mains entravées, des opérations chirurgicales sans anesthésie… Y a-t-il un Guantanamo à l’israélienne ? Voici le témoignage rare et anonyme d’un médecin qui a pu se rendre à l’intérieur de la base militaire de Sde Teiman, située à 30 kilomètres de Gaza, au milieu du désert du Néguev. Il affirme que « les détenus n’y sont pas traités comme des êtres humains » et dit « souhaiter sa fermeture ». « Je ne pense pas que des tentes dans le désert qui servent d’hôpital puissent exister dans un pays occidental en 2024 ».

Ce chirurgien israélien est entré une heure dans ce camp militaire, à la demande de l’armée. Il découvre alors une base séparée en deux espaces : un centre de détention et un hôpital de campagne. C’est là qu’il soigne un patient gravement blessé par balle. « Les patients n’ont pas de noms. Ils sont disposés sur deux rangées. Il y a entre 15 et 20 détenus. Ils sont tous attachés et restent allongés sur des lits. Ils ne peuvent pas bouger. Ils ont les yeux bandés. Ils sont nus. Ils portent des couches », décrit-il.

« C’est une violation assumée de la Convention de Genève et du code de déontologie de l’Organisation mondiale de la Santé. C’est de la torture physique et psychologique. »

Un chirurgien israélien à franceinfo

Des prisonniers hospitalisés à Sde Teiman sont morts. « À Guantanamo, en 20 ans, 20 personnes ont perdu la vie. Mais là, en six mois, on parle de 40 morts. C’est peut-être pire que Guantanamo », avance Nadji Abbas de l’ONG israélienne Physicians for Human Rights qui a déposé plusieurs recours devant la plus haute juridiction du pays, sans résultat.

« Une politique de disparition forcée »

« Personne ne peut entrer. Et personne n’a d’informations sur ce qui se passe au quotidien là-bas, affirme  Nadji Abbas. La seule explication que je trouve, c’est le sentiment de revanche que ressent la société israélienne. Et le ministère de la Santé est d’accord pour ne pas soigner correctement ces prisonniers. Ce que l’armée israélienne fait par rapport à ces détenus, c’est ce qu’on appelle une politique de disparition forcée ».

Face à la pression de l’opinion, et peut-être aussi de la justice internationale, l’armée a ouvert en milieu de semaine dernière, une enquête sur Sde Teiman. Il y a, selon Naji Abbas, d’autres centres de détention similaires comme celui d’Ananot, à l’Est de Jérusalem.