Des organisations de défense des droits de l’homme critiquent avec force Microsoft pour avoir investi dans une société israélienne de reconnaissance faciale

Les militants mettent en avant le contexte politique « problématique » de cet investissement de Microsoft dans la start-up AnyVision, société qui commercialise la technologie militaire qu’Israël utilise en Cisjordanie.

Microsoft est pris à partie par des organisations de défense des droits de l’homme pour avoir investi dans une start-up israélienne dont la technologie en reconnaissance faciale est utilisée en Cisjordanie, rapporte le magazine Forbes ce week-end.

Comme l’indiquait le mois dernier le journal économique TheMarker, AnyVision, dont la technologie de reconnaissance biométrique est utilisée par les forces de sécurité israéliennes, a obtenu, en juin, pour 74 millions de dollars de financement auprès d’un groupe d’investisseurs comprenant notamment le géant états-unien de la technologie, Microsoft.

Amos Toh, chercheur principal sur l’intelligence artificielle à Human Rights Watch, a indiqué au Forbes que l’utilisation d’une telle technologie « dans un contexte politique très tendu, pouvait être problématique », se référant à l’occupation de la Cisjordanie par Israël.

« Je pense qu’il incombe à Microsoft d’examiner de près ce que cela signifie en matière de risques pour les droits de l’homme en lien avec l’investissement dans une société qui fournit cette technologie à une puissance occupante. Il ne s’agit pas uniquement d’un risque pour la vie privée, mais également d’un risque pour la vie privée d’un groupe minoritaire qui souffre de répression et de persécution depuis un long moment » affirme Toh.

Le Forbes cite aussi un tweet de l’entrepreneur en cybersécurité, Matt Suiche, qui qualifie l’investissement de Microsoft de « scandaleux ».

L’Union américaine pour les libertés civiles critique vivement, elle aussi, cet investissement. Son directeur de la technologie, Shankar Narayan, a déclaré au Forbes qu’il avait rencontré Microsoft au sujet de la technologie de reconnaissance faciale et qu’à l’époque, la société semblait ouverte à l’idée de fixer des limites à son utilisation.

Cependant, ajoute-t-il, « Cet investissement particulier n’est pas une grosse surprise pour moi : il existe un fossé aisé à démontrer entre l’action et la rhétorique dans le cas de la plupart des grandes entreprises de technologie, et de Microsoft en particulier ».

Il a également dit au Forbes qu’il se demandait dans quelle mesure AETHER, le conseil consultatif de Microsoft sur les questions d’éthique entourant l’utilisation de l’intelligence artificielle, avait bien examiné l’investissement dans AnyVision.

L’article du Forbes signale qu’une politique, concernant la reconnaissance faciale et conçue par le président de Microsoft Brad Smith, a été adoptée par Microsoft en décembre, avec six principes : l’équité, la transparence, la responsabilité, la non-discrimination, la notification et le consentement, et la surveillance légale.

En juin dernier, AnyVision a annoncé qu’elle avait obtenu une levée de fonds de 74 millions de dollars, auprès de M12, le fonds de capital-risque de Microsoft, de DFG Growth, et d’OG Technologie Partners. Qualcomm, Lightspeed Vendure Partners et la Bosch Corporation avaient déjà mis de l’argent dans la start-up.

AnyVision affirme que la technologie de reconnaissance faciale peut améliorer la sécurité publique, une position qu’elle défend devant le gouvernement des États-Unis à travers ses lobbyistes, le Franklin Square Groupe à Washington.

Selon le Forbes, en plus de l’utiliser en Cisjordanie, AnyVision vend sa plate-forme Better Tomorrow en Russie et à Hong Kong. Des manifestants à Hong Kong la semaine dernière ont utilisé des lasers pour tenter de stopper la reconnaissance faciale qui leur dressait le portrait. AnyVision recherche un directeur des ventes à Hong Kong.

Le Forbes constate qu’en Russie, la technologie d’AnyVision a été installée à l’aéroport de Moscou-Domodedovo.

Le Forbes note encore que la technologie de l’entreprise s’est aussi déployée à Macao, apparemment dans les casinos.

L’article évoque les liens étroits entre AnyVision et d’anciens hauts responsables de la sécurité israélienne – l’ancien chef du Mossad Tomer Pardo en est un conseiller. Et le président de l’entreprise, Amir Kain, a dirigé le département de la Sécurité au ministère de la Défense de 2007 à 2015.