Défendre les libertés d’expression sur la Palestine : un enjeu académique  

La pétition ci-dessous a été élaborée par un groupe de chercheurs et d’universitaires qui nous a demandé de la relayer et de la proposer à la signature de nos adhérents.

“Nous chercheur·ses, juristes, anthropologues, sociologues, historien·nes, géographes, économistes, politistes, spécialistes des sociétés du Moyen-Orient et des mondes arabes, ainsi que nos collègues de l’ESR solidaires”

Nous souhaitons interpeller nos tutelles et collègues face aux faits graves de censure et de répression auxquels nous assistons dans l’espace public français depuis les événements dramatiques du 7 octobre. Au sein de nos universités, nous subissons des intimidations, qui se manifestent par l’annulation d’événements scientifiques, ainsi que des entraves à l’expression d’une pensée académique libre. Nous recensons de plus en plus de messages envoyés par les directions des universités, des laboratoires de recherche, du CNRS et par le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche lui-même, invitant les chercheur·ses et enseignant·es-chercheur·ses à signaler l’expression des idées jugées non conformes. Des  accusations graves d’antisémitisme ou d’apologie du terrorisme ont déjà été  proférées à l’encontre de certain·es collègues spécialistes de la région. 

Le conflit israélo-palestinien est un des révélateurs de la police de la pensée qui s’est installée dans le monde académique français depuis plusieurs années, dans la continuité de l’invention de l’islamo-gauchisme pour disqualifier certains discours scientifiques. Cela a pu engendrer des phénomènes d’autocensure chez les chercheur·ses, entravant notre réflexion intellectuelle et remettant en cause notre déontologie professionnelle, dans une conjoncture où celle-ci s’avère d’autant plus cruciale. Cette (auto) censure ne concerne d’ailleurs pas tout le monde puisque des collègues non spécialistes ont, quant à elles et eux, pu librement multiplier tribunes, articles et communiqués sans réelle contradiction. 

La recherche libre, qui est une garantie du bon fonctionnement démocratique d’une société, a pour objectif d’informer et d’éclairer des réalités au moyen d’outils d’analyse historiques, géographiques, anthropologiques, sociologiques, économiques, juridiques et politiques. Ces outils nous permettent de produire des connaissances et des regards critiques et pluriels sur le monde. Les dynamiques inquiétantes que nous observons au sein de la sphère académique reflètent un phénomène structurel plus large de répression des paroles et d’expressions de pensées non hégémoniques. Les censeur·ses ont un biais idéologique qu’ils et elles imposent sans précaution, en refusant l’échange intellectuel, qui est au cœur de nos pratiques.

Notre communauté scientifique, constituée en large partie de précaires, doit dénoncer ce climat de menace qui engendre peur et autocensure au détriment de la libre expression de nos paroles, analyses et positions politiques. Notre éthique de chercheur·ses repose sur le droit à exposer nos travaux et analyses sans détournement, interruption et procès d’intention. Nous souhaitons également réaffirmer notre droit de pouvoir soutenir des causes et exprimer nos solidarités à titre individuel, comme tout·e citoyen·ne. Pour cela nous demandons à nos tutelles de veiller à ce que cessent les intimidations, diffamations et restrictions de la parole scientifique et que nos collègues puissent être protégé·es dans leur mission de diffusion des savoirs scientifiques.

Cosignataires et formulaire de signature ici