Alors que l’armée israélienne innocente ses soldats des meurtres de familles à Gaza, les Palestiniens se tournent vers La Haye

L’armée israélienne a innocenté ses soldats des méfaits criminels, dans des violations alléguées de droits de l’homme, et commis durant la guerre de l’été 2014 contre Gaza, selon un rapport….

L’armée israélienne a innocenté ses soldats des méfaits criminels, dans des violations alléguées de droits de l’homme, et commis durant la guerre de l’été 2014 contre Gaza, selon un rapport de l’armée publié hier. Les investigations ont clos les enquêtes sur 13 incidents, notamment les meurtres de trois familles palestiniennes et d’autres civils et les bombardements d’un centre médical, de la principale centrale électrique de Gaza et d’un refuge des Nations-Unies, entre autres infractions.

« Nous ne nous attendions à rien de moins que la justification par Israël de ses crimes de guerre », déclare le négociateur en chef palestinien Saeb Erekat après la publication du rapport de l’armée, et il exhorte la Cour pénale internationale à enquêter sur les infractions.

Dans certains dossiers de tués et blessés, l’avocat général militaire des Forces de défenses israéliennes (IDF MAG) reconnaît que des soldats ont été négligents, mais il juge que leurs actions n’ont violé aucune des règles de la guerre.

Sept autres dossiers criminels ont été ouverts pour des « incidents exceptionnels » où des soldats opérant dans la bande de Gaza étaient « accusés de s’être livrés à des pillages, d’avoir aidé à ces pillages et de s’en être rendus complices ».

« Les poursuites judiciaires concernant ces accusations sont en cours à l’heure actuelle » dit le rapport.

Aucune inculpation pour les meurtres des trois familles

Dans des affrontements meurtriers avec des familles entières et pour lesquels les soldats n’ont pas été accusés, l’armée israélienne dit que les cibles étaient des combattants, et que des précautions avaient été prises pour limiter les victimes civiles conformément à la législation israélienne et internationale. « Le fait que, en pratique, des civils qui n’étaient pas impliqués dans les hostilités ont été blessés, est une conséquence regrettable » commence le rapport, « mais cela n’affecte en rien la légalité de l’attaque postérieurement au fait », continue-t-il.

Les dossiers clos comprennent les meurtres de sept membres de la famille Ziyadeh le 20 juillet 2014, de 12 membres de la famille Siyam le 21 juillet, et de 15 personnes lors de l’attaque contre la famille Zouarob le 12 août.

Décrivant les meurtres de la famille Ziyadeh, les enquêteurs militaires disent que malgré la présence de civils dans la zone de tir, aucun avis d’avertissement n’a été publié.

« Il n’aurait pas été possible de lancer un avertissement avant l’attaque contre le bâtiment, alors qu’on s’attendait à ce qu’un tel avertissement réduise à néant l’objectif de l’attaque » dit le rapport. Des sonneries d’avertissement ou des tracts préventifs parachutés ont été utilisés en d’autres circonstances tout au long de la guerre.

Par rapport à la famille Siyam, les enquêteurs militaires déclarent que leurs forces n’ont pas été impliquées. « Aucune attaque – aérienne ou autre – n’aurait pu conduire à une frappe sur la famille comme prétendument réalisée par les unités des Forces de défense israéliennes (FDI) dans la zone en question, et à la date considérée », transmet le rapport.

Selon l’enquête, c’est une roquette mal lancée par les Palestiniens opérant dans la zone qui a frappé les membres de la famille alors qu’ils circulaient sur une route à proximité. Alors que dans le même incident, l’armée israélienne détruisait la maison de cette même famille Siyam dans une frappe aérienne, et que personne n’était signalé avoir été à l’intérieur à ce moment-là.

Aucune inculpation pour l’attaque contre le refuge des Nations-Unies

Les enquêteurs ont également choisi de ne pas accuser les soldats d’avoir tiré le missile à guidage de précision qui a tué « de 7 à 15 » des Palestiniens qui avaient trouvé refuge dans une école de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) à Rafah, le 3 août 2014. Dans ces moments, l’école donnait refuge jusqu’à 2900 personnes par jour.

L’armée israélienne déclare que leur cible était trois automobilistes qui franchissaient la porte d’entrée du refuge au moment des explosions. Ses forces sur le terrain ne savaient pas, avant de lancer la frappe, que l’impact se produirait proche de civils.

« Les autorités opérationnelles n’étaient pas en mesure de percevoir en temps réel le groupe des civils qui se trouvaient à l’extérieur de l’école », et par conséquent, « elles ne sont pas tenues pour responsables pénalement de ces morts », indique le rapport.

Le porte-parole de l’UNRWA, Chris Gunness, a déclaré à Mondoweiss que son agence avait informé l’armée israélienne de l’emplacement de ce refuge à 33 reprises durant la guerre, « la dernière fois une heure seulement avant l’attaque » dit-il.

Gunness n’a pas été en mesure de faire un commentaire spécifique à propos de la décision israélienne de ne pas procéder à des poursuites pénales dans ce dossier – « L’UNRWA n’a pas eu la possibilité d’examiner les éléments de preuve » dit-il. Mais l’armée israélienne considère toujours que des poursuites sont possibles dans les deux enquêtes en cours sur les attaques contre les installations des Nations-Unies. Dans des frappes séparées, en juillet 2014, les FDI ont également tiré sur des refuges de l’UNRWA à Beit Hanoun et Jabiliya, tuant, dans les deux frappes, 29 personnes.

« Aune responsabilité pénale ne semble être admise pour tous les dossiers clos concernant les locaux de l’UNRWA » dit Gunness. « Les familles touchées n’ont aucun recours réels et, de leur point de vue, cela serait certainement vu comme un nouveau démenti de leurs droits ».

Durant cette guerre de 51 jours, les forces israéliennes ont ciblé sept installations de l’UNRWA alors que celles-ci étaient utilisées comme des refuges dans l’urgence en soutien aux 250 000 Palestiniens déplacés. Dans ces incidents, 44 d’entre eux ont été tués, et 227 blessés. Les propriétés des Nations-Unies et les sites humanitaires constituent une catégorie spéciale de structures qui sont considérées comme inviolables en vertu du droit international.

Les soldats sont innocentés pour la frappe sur la principale centrale électrique de la bande de Gaza.

L’une des attaques les plus intensives sur les infrastructures de Gaza durant la guerre a été également close par les examinateurs de l’armée hier. Du 22 au 29 juillet, la principale centrale électrique de la Bande assiégée, celle de Nusseirat, a été frappée à quatre reprises. Les bâtiments étaient assurés par le gouvernement des États-Unis.

L’organisation Human Rights Watch estime que Gaza a perdu 20 % de sa production d’électricité en raison du coup porté aux réserves de carburant.

Le communiqué de l’armée déclare que la centrale électrique a été endommagée lors de quatre frappes distinctes, dont trois que les FDI disent être venues des forces palestiniennes. La quatrième, l’armée israélienne dit qu’elle vient de l’une de ses unités. Pourtant, l’armée a clos le dossier, déclarant que son attaque était comme un coup indirect.

« Un grand nombre de possessions terroristes (étaient) contiguës à la centrale électrique – à une distance parfois de seulement dix mètres », dit l’armée.

Quelques jours après la frappe aérienne sur l’installation, Human Rights Watch présente un tableau différent.

« Endommager ou détruire une centrale électrique, même si elle sert aussi à des fins militaires, constitueraient une attaque disproportionnée illégale en vertu des lois de la guerre, causant plus de dommages civils que de gains militaires », dit l’organisation.

« Attaquer délibérément la centrale électrique constituerait un crime de guerre » dit Eric Goldstein, directeur adjoint d’Human Rights Watch pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, dans la même déclaration.

Le rapport de mercredi ouvre aussi des enquêtes criminelles sur des biens volés appartenant à des Palestiniens détenus par les soldats israéliens dans Gaza. « Il a été allégué que des soldats avaient pris de l’argent en liquide dans sa poche, qui ne lui a pas été rendu après sa libération » dit le rapport.

Six autres incidents sont en cours d’examen où des soldats sont accusés d’avoir « tiré sur des immeubles et des voitures de civils en violation des instructions opérationnelles des FDI ; d’avoir fait du mal à des civils en violation des instructions opérationnelles des FDI ; d’avoir infligé des dommages intentionnellement à des biens en violation des instructions opérationnelles des FDI ; et d’avoir pillé », dit le dossier.

Avec la guerre de 2014, Gaza a subi de lourdes pertes en morts, avec plus de 2100 Palestiniens tués entre le 8 juillet et le 27 août. Les forces palestiniennes ont tué 66 soldats israéliens et aussi 7 civils en Israël.

L’enquête militaire israélienne sur les possibles crimes de guerre a été conduite après que des organisations des droits de l’homme, les Nations-Unies, et des Palestiniens à titre individuel, eurent déposé plainte.

Les dirigeants palestiniens cherchent à ce qu’il y ait des poursuites pour un certain nombre d’incidents commis durant la guerre devant la Cour pénale internationale (CPI). Ces canaux ne peuvent être suivis que si des agents de La Haye déterminent si Israël a suffisamment fait des recherches et inculpations pour crimes de guerre devant ses propres tribunaux.

Le négociateur en chef palestinien Saeb Erekat a exhorté les responsables à la Cour au lancement de leurs propres procédures.

« Alors que la position officielle d’Israël est de s’innocenter lui-même de toute responsabilité et de confirmer son engagement dans la pratique des crimes de guerre, nous pensons qu’il est temps pour la Cour d’agir » dit-il.